Eau, chaleur renouvelable, précarité énergétique : les chantiers de rentrée d'Amorce
Le réseau d’élus et d’entreprises Amorce alerte le Premier ministre sur le sérieux décrochage de la filière chaleur renouvelable, muscle son activité de conseil aux collectivités dans le domaine de la gestion de l’eau et propose la création d’une commission nationale sur la précarité énergétique rassemblant ministères, associations et acteurs du secteur.
Du nouveau chez Amorce : l’association d’élus et d’entreprises plonge dans le (grand) bain des enjeux liés à la gestion de l’eau dans les collectivités et a indiqué, le 6 septembre lors de sa conférence de presse de rentrée, qu’elle affirmerait son positionnement, seule ou certainement aux côtés d’autres réseaux d’élus, dans ce domaine en proposant également ses services à son large réseau de près de 600 collectivités - soit deux tiers de ses adhérents, le dernier tiers étant constitué de professionnels. Une chargée de mission vient d’être recrutée.
Parmi les principes auxquels l’association est attachée, relève son délégué général, Nicolas Garnier, se trouve celui dit de "l’eau paie l’eau". Après un recours contre l’arrêté ministériel publié en avril dernier "ponctionnant les agences de l’eau" au profit d’actions en faveur de la biodiversité, l’association va poursuivre sur ce front l’offensive judiciaire. Des passerelles seront tendues avec son créneau historique, celui de la gestion des déchets, en vue de faire des propositions ciblées sur la réduction des nouveaux polluants et notamment les microplastiques et macro-déchets, un domaine dans lequel l’effort de recherche par ailleurs s’accentue (voir les travaux du Cedre implanté à Brest).
Assises de l'eau : peut mieux faire, dit Amorce
Par ailleurs Amorce a déjà pointé son nez sur des sujets aussi sensibles que le transfert aux communautés de communes des compétences eau et assainissement et la loi relative à sa mise en oeuvre promulguée cet été (voir notre article du 27 août). Elle partage aussi une vision critique des mesures annoncées à l’issue de la première phase des Assises de l’eau. L’expérimentation par les collectivités volontaires d’un chèque-eau pour les ménages précaires, à l'image de ce qui existe dans l’énergie (mesure 17) ? "C’est un dispositif curatif qui ne traite pas les vraies causes du problème. Il ne suffit pas, des dispositifs complémentaires sont nécessaires", estime Amorce. Les nouveaux financements proposés aux collectivités pour moderniser leurs réseaux ? "Ils ne sont pas à proprement parler nouveaux, ces financements existent mais sont relativement peu utilisés. En fait, il s’agit plus d’une redistribution des financements apportés par les agences de l’eau". Et la nouvelle redevance de solidarité entre villes et territoires ruraux remplaçant celle de modernisation des réseaux ? "Elle reste floue et ne donne aucune garantie sur les évolutions à attendre". Amorce veut néanmoins être associée étroitement aux travaux portant sur cette redevance et soutient par ailleurs l’idée de mieux mobiliser les fonds européens (voir notre article dans l’édition du 6 juin 2018), "tout en restant attentif à ce qu’un accompagnement administratif fort soit apporté aux collectivités dans le montage et le suivi de ces dossiers de subventions qui sont très lourds administrativement".
Chaleur renouvelable : le constat fait froid dans le dos
Amorce vient en outre de relancer son club de la chaleur renouvelable pour tirer plus efficacement le signal d’alarme sur ce secteur. L’instance réunit tous les acteurs du secteur. D’une voix commune, ils s’apprêtent à alerter dans un courrier le Premier ministre sur le complet décrochage de cette filière "qui se développe à un rythme très éloigné des objectifs fixés par la loi de transition énergétique (LTECV)". Les réseaux de chaleur, ces mal-aimés de la transition énergétique, se développent selon Nicolas Garnier "trois fois moins vite qu’il le faudrait pour être dans les clous de la trajectoire prévue". Les raisons sont connues : dispositifs de soutien sous-dimensionnés et stagnation du fonds Chaleur, attractivité insuffisante et déficit de notoriété, etc. (voir notre article dans l’édition du 15 décembre 2017). Résultat, "la moitié des projets de chaleur renouvelable n’aboutissent pas", déplore-t-il.
Concernant la rénovation énergétique, l’association dresse comme d’autres le constat d’un enjeu passé sous silence dans le cadre des débats parlementaires sur le projet de loi Elan. L’examen de son titre IV consacré à l’amélioration du cadre de vie comportait un court chapitre avec quelques mesures ciblées sur les politiques d’économies d’énergie dans les bâtiments à usage d’habitation et tertiaires (voir notre décryptage). Mais presque rien sur la précarité énergétique. Pour avancer, Amorce défend l’idée, soumise à la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), de création d’une commission dédiée au niveau national, baptisée "commission - 15" en référence à l'objectif fixé par la LTECV de réduire de 15% la précarité énergétique d'ici 2020. Elle réunirait plusieurs ministères (Cohésion des territoires, Transition écologique et solidaire), des professionnels, des bailleurs et des associations. "Nous défendons également un modèle de politiques territoriales de résorption de la précarité énergétique, avec des stratégies pour coordonner les actions existantes, la mise en place d’une instance de suivi et de concertation sur le sujet, et travaillons au lancement d’un programme de certificats d’économie d’énergie pour financer ce type de politiques", conclut l’association.