Dunkerque et Fos-sur-Mer : premières zones industrielles bas carbone

Le ministre délégué à l'industrie, Roland Lescure, a dévoilé lundi les deux premières zones industrielles bas carbone (Zibac) sélectionnées dans le cadre du plan d'investissement France 2030. Il s'agit des zones industrielles et portuaires de Dunkerque et de Fos-sur-Mer qui représentent à elles seules près de la moitié des émissions industrielles de CO2 en France. Elles recevront 17 millions d'euros pour concevoir de nouveaux modes de production et de captation du CO2.

Les zones industrielles et portuaires de Dunkerque (Nord) et Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) ont été désignées, lundi 16 janvier, comme les premières "zones industrielles bas-carbone" (Zibac). Elles ont été sélectionnées par appel à projets lancé dans le cadre du plan d’investissement France 2030. Ces deux sites concentrent près de la moitié des émissions industrielles de CO2 en France. Ils "ont vocation à constituer des territoires pionniers de la décarbonation de l’industrie française ainsi que des territoires industriels 'clé en main' pour les entreprises désireuses d’investir dans la transition écologique", souligne le ministère délégué chargé de l’industrie dans un communiqué. Il s’agit d’en faire "un levier majeur" de la "réindustrialisation verte", qui fera l’objet d’un projet de loi prochainement. Les deux sites recevront plus de 17 millions d’euros d’aides pour les aider à adopter de nouveaux procédés plus vertueux.

Autoroute de la chaleur

Baptisé DKarbonation, le projet de décarbonation de la zone de Dunkerque, qui concentre de nombreuses activités sidérurgiques, métallurgiques et chimiques, est porté par le groupement d’intérêt public Euraénergie regroupant une trentaine d’acteurs publics et privés : la communauté urbaine de Dunkerque, les groupes Arcelor Mittal, Alvance Aluminium Dunkerque... Dans le cadre de l’appel à projets, il recevra une aide de 13,6 millions d’euros de l’État pour réaliser des études d’ingénierie et de faisabilité de décarbonation de la zone. Ces études permettront de "disposer d’une vue complète des besoins en infrastructures pour la décarbonation de la zone (13,8 MtCO2eq émis en 2019, soit 21% des émissions françaises actuelles)", précise le communiqué.  Il s’agira aussi de prendre les meilleures options possibles afin de "consolider" les 17.000 emplois concernés par ces transitions industrielles, et "contribuer à terme à la création de 3.000 emplois supplémentaires directs et 7.500 indirects". Le complexe d’Arcelor-Mittal à Dunkerque, plus grand site de production d’acier en Europe, émet à lui seul 80% des gaz à effet de serre du Nord. L’un des projets emblématiques porté par le GIP est celui "d’autoroute de la chaleur" qui permettra aux industriels et aux logements de la région de récupérer la chaleur produite par les procédés industriels d’Arcelor Mittal. Autre projet très prometteur, dans les matériaux de construction cette fois : la décarbonation du plus gros site de production de chaux en France, du groupe Lhoist, basé à Réty (Pas-de-Calais). Le projet CalCC, mené en association avec Air Liquide, vise à capter et purifier 94% du CO2 provenant des fours à chaux de l'usine. Le gaz ainsi capté sera ensuite transporté par pipeline vers une plateforme multimodale d'exportation de CO2, déployée dans le cadre de l’appel à projets Zibac. Il sera ensuite expédié pour être stocké géologiquement en mer du Nord. L’ensemble du projet bénéficie d’une aide de 120 millions d’euros du fonds pour l’innovation européen.

Nouveau règlement européen 

À noter que les deux départements du Nord et du Pas-de-Calais sont les premiers à avoir bénéficié du fonds pour la transition juste européen (FTJ), visant justement à soutenir les territoires économiquement les plus impactés par les impératifs de décarbonation, avec une enveloppe de 228 millions d'euros sur un milliard pour la France. D’ailleurs la politique française de décarbonation de l’industrie – qui se traduira dans le projet de loi de réindustrialisation verte annoncé par Bruno Le Maire - est au diapason avec le Pacte vert européen ("Fit for 55") qui ambitionne de faire de l’Europe "le premier continent neutre en émission de gaz à effet de serre d’ici 2050". La loi relative à l’énergie et au climat du 8 novembre 2019 en a fixé les objectifs pour la France. Le 8 novembre 2022, Emmanuel Macron avait donné le coup d’envoi de ce changement de paradigme en réunissant les 50 sites industriels les plus émetteurs pour leur demander de diviser par deux leurs émissions à réduire leurs émissions de CO2 sous dix ans, avec l’objectif de planifier cette décarbonation par bassins industriels. En direct du forum de Davos, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé, mardi 17 janvier, un nouveau règlement pour viser "une industrie à zéro émission nette" en gaz à effet de serre. Au programme : simplification et accélération des procédures d'autorisation de nouveaux sites de production.

Une dizaine de Zibac

À l’autre bout de la France, la zone portuaire et pétrochimique de Fos-sur-Mer, qui émet un quart des émissions industrielles françaises (18 MtCO2), recevra pour sa part une aide de 4 millions d’euros pour réaliser une trentaine d’études d’ingénierie et de faisabilité. Le programme baptisé Syrius (SYnergies régénératives industrielles Sud) mobilise quarante industriels.

"Demain, l’attractivité d’un territoire se mesurera à la présence des infrastructures indispensables pour l’industrie décarbonée : l’électricité, l’hydrogène, la capture de CO2", a commenté le ministre délégué à l’industrie Roland Lescure, qui a dévoilé ces deux projets à Dunkerque, lundi. L’appel à projets se poursuit : le gouvernement ambitionne de sélection une dizaine de sites industriels, notamment dans la vallée de la Seine, l'Alsace et la Lorraine. Après la phase de "maturation" (financement des études) viendra celle de l’accompagnement et de suivi de la trajectoire de décarbonation des différentes Zibac. Parallèlement, des "contrats de transition écologique" seront passés avec chacun des 50 plus grands sites industriels.