Economie sociale et solidaire - DLA : un soutien aux associations "utile" mais "perfectible"
Créé il y a dix ans pour aider les associations à maintenir leurs emplois et à se développer, le dispositif local d'accompagnement (DLA) est aujourd'hui apprécié tant "par les pilotes, les collectivités territoriales que le monde associatif". Il est "utile" mais reste "perfectible" en raison d'un certain nombre de lourdeurs, constate l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans une évaluation commandée par Xavier Bertrand et Roselyne Bachelot-Narquin en mai 2011.
Dans leur lettre de mission, les ministres du Travail et de la Solidarité demandaient de s'assurer que le DLA offrait "une réponse adaptée pour consolider l'emploi dans le champ de l'économie sociale et solidaire qui représente près de 10% de l'emploi salarié". En effet, si le DLA a été instauré par l'Etat et la Caisse des Dépôts pour soutenir les associations de petite taille après la fin des emplois jeunes, il s'adresse aujourd'hui à l'ensemble des structures d'utilité sociale. Toutefois, les associations restent son coeur de cible : entre 2002 et 2010, il a permis d'accompagner 24.000 associations et chaque année, 3 à 4% des associations qui emploient des salariés en France sont ainsi soutenues, indique l'Igas. L'objectif a donc été tenu : 71% des structures accompagnées comptent moins de 10 salariés, même si 10% d'entre elles n'ont pas de salarié et 8% emploient plus de 50 salariés.
L'inspection demande par ailleurs de mettre fin à une certaine ambiguïté : "Ou bien l'emploi reste prioritaire ou bien le DLA devient un dispositif général d'accompagnement des associations employeuses." Et de plaider pour la première option.
Renforcer l'accompagnement à "moyens constants"
Le rapport montre que le dispositif est rapidement monté en charge entre 2004 et 2006 avec un pic de 7.900 structures accompagnées, avant de retomber à 6.600 structures en 2010. Un recul qui, selon l'Avise, tête de pont du dispositif, s'explique par une surcharge administrative liée aux nouvelles mesures de conventionnement des DLA et aux mesures d'impact que les 105 DLA départementaux ont dû mener auprès de 300 structures soutenues. A terme 30% des associations doivent faire l'objet de cette mesure d'impact destinée à évaluer les résultats du dispositif. Tâche qui, selon l'Igas, reste difficile à l'heure actuelle.
Si le DLA est le dispositif d'accompagnement préféré des associations, comme le montrait un sondage publié en octobre dernier à l'occasion de la journée nationale des DLA, sa mise en oeuvre est "lourde, coûteuse et disparate", souligne encore le rapport. Chaque association reçue fait l'objet d'un diagnostic partagé qui peut donner lieu à un plan d'accompagnement assorti de missions de conseil confiée à des cabinets spécialisés. La qualité de l'accompagnement et le nombre d'associations suivies pourraient être renforcés "à moyens constants", estime l'Igas, qui s'interroge sur la répartition des crédits alloués au DLA. Le budget prévisionnel s'élevait à 27,5 millions d'euros en 2010. Des fonds répartis principalement entre l'Etat (11,8 millions), la Caisse des Dépôts (6,2), les collectivités (4,4) et le fonds social européen (4,2). Or le DLA s'est éloigné de sa vocation première : les crédits ingénierie, qui servent à financer les prestataires, ont en effet eu tendance à baisser depuis 2008 pour s'établir à 12 millions d'euros en 2010 (44% du total), au profit des frais de fonctionnement. Le système de reporting baptisé "ENEE" s'avère "coûteux" et mobilise jusqu'à 10% du temps de travail des chargés de mission. "Plus de la moitié du budget est consacré à l'animation du dispositif, ce qui est très élevé", considère l'Igas, qui recommande une organisation régionale pour recentrer les crédits sur l'ingénierie et diminuer ceux des structures qui ne sont pas en lien direct avec les associations.
Des coûts qui restent peu élevés
Par ailleurs, tous les DLA n'ont pas le même "rendement". La variation d'activité entre les chargés de mission est "extrêmement forte", constate l'Igas. Le nombre moyen d'accompagnements par chargé de mission varie en effet de 20 à 124. Afin d'aplanir les charges de travail, l'Igas suggère de créer des associations interdépartementales voire régionales.
Mais selon l'Avise, certaines données de l'évaluation doivent être nuancées. Tout d'abord, le rapport reprend le budget prévisionnel et non ce qui est vraiment dépensé en fin d'année, soit environ 25 millions d'euros. Par ailleurs, les budgets de fonctionnement englobent eux-mêmes une part d'ingénierie. "Il faut prendre en compte tout le travail du chargé de mission qui fait aussi de l'appui à travers le diagnostic partagé et le suivi, un travail qu'on peut évaluer entre 6 et 7 millions d'euros", indique Sandrine Aboubadra, responsable du programme auprès de l'Avise. Au total donc, les trois quarts du budget seraient en réalité consacrés à l'accompagnement direct des associations, loin des 44% mentionnés par l'Igas. "On peut sans doute un peu rationnaliser les dépenses, mais tout le travail mené en termes de reporting, qui permet de produire des données en temps réel, est un véritable atout, attention à ne pas le casser", prévient-elle.
L'Igas s'interroge aussi sur le profil des chargés de mission qui sont jeunes, un peu plus de 40% ont moins de 31 ans, d'un niveau de formation élevé (78% sont de niveau bac+5 minimum), avec une dominante en économie gestion, développement local, économie sociale. Le turnover est important (40% ont moins de deux ans d'ancienneté). Certaines formations spécifiques leur ont été préparées par l'Avise et les centres nationaux d'appui et de ressources (Cnar), mais l'Igas propose d'aller plus loin et préconise un référentiel de compétence, ainsi qu'un parcours de formation initiale pour les nouveaux arrivants après validation de leurs acquis et expériences. "C'est une bonne idée, appuie Sandrine Aboubadra. Il faudrait un vrai passeport de formation." Elle souligne pourtant que, compte tenu de leur niveau de formation, les salaires des chargés de mission "ne sont pas très élevés". De même que les prestations de conseil, évaluées par l'Igas à 880 euros par jour. Ce qui écarte mécaniquement les gros cabinets, beaucoup plus gourmands.