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Intercommunalité - DGS de communauté : la fin de l'âge d'or ?

Hier, ils oeuvraient à des projets de développement. Mais avec la réforme territoriale notamment, l'organisation de l'activité des services et le management ont envahi leur quotidien. Une page s'est tournée pour les DGS de communauté, comme l'ont constaté les participants d'une récente rencontre de l'Association des directeurs généraux des communautés de France (ADGCF).

Avec la généralisation et le renforcement de l'intercommunalité, une page s'est tournée pour les directeurs généraux des communautés. Les premiers à occuper la fonction se sentaient l'âme de "pionniers", comme l'ont souligné plusieurs d'entre eux lors d'une rencontre organisée le 11 septembre à Paris par l'Association des directeurs généraux des communautés de France (ADGCF) sur le thème du "métier de DG de communauté". "Nous étions fiers d'être des hommes de projet et de ne pas avoir les mains dans le cambouis", a aussi témoigné Jean-Paul Vogel, ancien DGS de la communauté d'agglomération du Grand Besançon. Ces cadres bénéficiaient d'une plus grande souplesse d'action qu'aujourd'hui, ayant moins à subir la triple pression des élus, des agents et des habitants. De plus, les finances intercommunales se portaient mieux qu'à présent.
Aujourd'hui, les DGS d'intercommunalité ont le sentiment que leur métier est "moins flamboyant", a constaté Hervé Joan-Grangé. Le dirigeant du cabinet Code-Bdx a mené, en vue d'une étude pour l'ADGCF et la Caisse des Dépôts, des entretiens avec des DGS d'intercommunalité, en particulier des directeurs de communautés "XXL".
Pour autant, a-t-il poursuivi, les DGS d'intercommunalité se sentent encore "plus utiles" qu'avant et leur métier "se diversifie, s'enrichit, se muscle". Travaillant dans l'urgence, les intéressés voient leurs nouvelles missions se multiplier. Leur capacité à "piloter le changement" et à expliquer la complexité des projets est devenue essentielle. De plus, leur rôle de conseil auprès des élus s'est renforcé.

"Pilotage de l'action"

Stéphanie Baffou, DGS de la communauté de communes des terres de Montaigu (Vendée) a confirmé que le management a pris une place centrale dans ses fonctions. En charge de la préparation de la fusion avec la communauté de communes du canton de Rocheservière, elle s'est "concentrée sur le pilotage de l'action". Concrètement, elle définit les tâches des dix directeurs de services afin que, dans le contexte de la fusion, ils "ne s'éparpillent pas" et parviennent à continuer à gérer les missions du quotidien.
Avec l'agrandissement des périmètres, la mutualisation est une autre évolution forte. Certains DGS des communautés occupent, dans cette logique, la fonction de DGS de la ville centre. Dans leur cas, "n'y a-t-il pas une banalisation de la fonction de DGS d'intercommunalité ?", s'est interrogé Jean-Paul Vogel. Ainsi, cette fonction se rapprocherait de celle de DGS de commune.
En charge de l'organisation interne, les DGS d'intercommunalité ne s'occupent plus seulement de piloter l'élaboration du projet de territoire. Pourtant, la notion de projet, synonyme de stratégie et de marges de manoeuvre, reste très valorisée chez eux, alors que la gestion quotidienne, plus contraignante, est souvent déconsidérée. David Guéranger, sociologue au Laboratoire Techniques Territoires Sociétés (Latts) a fait cette observation à l'occasion d'une trentaine d'entretiens qu'il vient de mener auprès de DGS de communautés. "Il y a une convergence étonnante dans la manière dont les DGS tracent la frontière entre les valeurs positives et négatives de leur métier", souligne le sociologue.
Au-delà de ce point commun, il observe la grande diversité des parcours et des profils professionnels des DGS de communautés, mais dégage trois grands types de DGS. Plutôt jeune, le "missionnaire"* détient un diplôme de troisième cycle et a réussi un concours de la fonction publique territoriale. Mobile, il peut travailler pour n'importe quelle institution. Il construit sa légitimité sur "les savoirs gestionnaires" et pense qu'il a un rôle important de pédagogie auprès des élus.

La fin des "notables" ?

Lui aussi jeune et diplômé d'un troisième cycle, le "commissaire" doit sa nomination aux étroites relations qu'il entretient avec un élu ou un parti. De ce fait, il est chargé d'exécuter, au nom de l'élu, des missions qui prennent un caractère temporaire. Il met en avant ses qualités et son expérience professionnelle, y compris s'il est issu du secteur privé. Vis-à-vis des élus, il s'attache à "fluidifier les mécanismes de prise de décisions" et à "anticiper les tensions qui pourraient surgir".
Enfin, plus âgé, le "notable" a acquis une position sociale importante sur un territoire. Il y dispose d'un fort réseau relationnel. Il met en avant sa très bonne connaissance du territoire, des lieux, des personnes, mais aussi de l'institution intercommunale. Il a lancé cette dernière, l'a développée et il la dirige souvent encore aujourd'hui.
Au cours de leur carrière, les DGS peuvent évoluer de l'un à l'autre des profils-types. Ceux-ci n'étant d'ailleurs pas exclusifs : les DGS empruntent souvent à plusieurs d'entre eux.
Les évolutions de l'intercommunalité ont évidemment des conséquences différentes selon le type de DGS. Mais elles n'expliquent pas tout. La nationalisation de la vie politique est un autre facteur important. En particulier, la tendance à la nationalisation des critères de recrutement des DGS, au détriment des critères locaux, affaiblit plus spécifiquement ceux qui se rapprochent du type "notables".

Thomas Beurey / Projets publics

*L'auteur prévient qu'à ce stade, la typologie est susceptible d'évoluer. L'étude définitive sera publiée par l'ADGCF à la fin de l'année.