Elections - Deux mois avant les régionales, quelles pistes pour limiter l'abstention des jeunes ?
A un peu plus de deux mois du premier tour des élections régionales, les listes électorales seront ouvertes jusqu'au 30 septembre 2015 inclus. Pour ce scrutin inédit à bien des égards – désignation des conseillers des treize nouvelles grandes régions, collectivités aux compétences modifiées, vote en décembre et non au printemps comme c'est généralement le cas –, un délai supplémentaire a en effet été accordé pour permettre l'inscription ou la réinscription – en cas de déménagement principalement - sur les listes électorales (voir ci-contre notre article du 10 mars 2015).
Automatiquement inscrits dans le cadre de leur recensement en vue de la journée défense et citoyenneté, les jeunes atteignant l'âge de 18 ans au plus tard la veille des élections régionales doivent cependant s'inscrire auprès de leur commune en cas de changement d'adresse depuis leur recensement. En outre, si l'inscription d'office n'est pas notifiée au 6 octobre 2015 – par courrier et par un tableau des nouvelles inscriptions affichées en mairie –, un recours au tribunal d'instance du lieu de domicile sera alors possible dans les 10 jours, spécifie le ministère de l'Intérieur sur sa page dédiée.
L'inscription sur les listes n'est toutefois qu'une première étape. Pour inciter les jeunes à aller voter les 6 et 13 décembre prochains, l'Association nationale des conseils d'enfants et de jeunes (Anacej) propose aux collectivités différents outils d'information et de communication à destination des nouveaux électeurs : des affiches, des flyers et le site je-vote.fr, déjà actif lors des dernières élections depuis les présidentielles de 2012. L'association tient aussi à la disposition de ses adhérents un kit "Prêt à voter ?" présentant le fonctionnement des institutions.
Une hausse de la participation des 18-24 ans aux dernières municipales
La contribution des collectivités – et en premier lieu des communes et des régions - à cette campagne ne sera pas de trop pour tenter de limiter l'abstention des jeunes et des moins jeunes. Publiée en juillet 2015, une note (voir lien ci-contre) de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep) analyse les données disponibles relatives à la participation des différentes tranches d'âge aux élections municipales et départementales.
Si, lors des premiers tours des derniers scrutins, les 18-24 ans ont à nouveau été les plus abstentionnistes, leur participation a toutefois été plus importante que lors des élections précédentes : 47% de participation aux municipales de 2014 (+ 6% par rapport à 2008) et 29% aux départementales de mars 2015 (+ 5% par rapport à 2011).
Si la hausse de la participation aux dernières élections départementales – largement imputable à la portée nationale de l'événement, du fait du renouvellement complet, pour la première fois, des assemblées – a concernée toutes les tranches d'âge, l'augmentation de la participation aux municipales de 2014 n'a été que le fait des 18-24 ans et des plus de 65 ans – tranche d'âge ayant le plus voté, avec 80% de participation.
Du fait également d'une baisse de la participation de 11% aussi bien chez les 35-49 ans (pour atteindre 61%) que chez les 50-64 ans (69%) aux dernières municipales par rapport aux précédentes, l'écart s'est resserré entre ces deux tranches d'âge et les plus jeunes.
Vote électronique, droit de vote à 16 ans... des pistes pratiques
Le niveau d'abstention de ces derniers restant toutefois tendanciellement élevé, le chercheur de l'Injep évoque trois pistes susceptibles de faciliter et d'encourager le vote. L'inscription universelle, d'abord, permettrait de mieux prendre en compte "les groupes sociaux les plus mobiles de la population, notamment les plus jeunes", des populations mobiles qui "représenteraient 15% des inscrits en France", sans compter les non-inscrits qualifiés d'"abstentionnistes invisibles".
Deuxième piste, l'abaissement du droit de vote à 16 ans "obligerait les politiques à s’adresser directement à ce jeune électorat devenu numériquement plus nombreux et susceptible de faire basculer des élections". La proposition mérite d'être débattue, a également estimé France Stratégie, en juin 2015, dans un rapport intitulé "Reconnaître, valoriser, encourager l'engagement des jeunes".
Enfin, la troisième proposition est de reconsidérer l'intérêt du vote électronique, notamment pour les personnes les plus mobiles.
Interrogés en 2014 dans le cadre d'une étude de l'Anacej (voir lien ci-contre), les jeunes eux-mêmes ont évoqué d'autres démarches qui pourraient les amener à voter davantage. Concernant les modalités pratiques du scrutin, ils proposaient l'"organisation d’un vote anticipé permettant aux électeurs de voter (…) jusqu’à 2 semaines ou un mois (suivant les pays) avant la date officielle du scrutin".
L'éducation à la citoyenneté et le vote des jeunes font-ils la paire ?
Les autres pistes évoquées correspondaient davantage à un appel à faire vivre la démocratie, à travers notamment "un plus grand recours au referendum", l’"organisation systématique de débats au lycée en période électorale en lien avec les représentants des organisations jeunesse des partis politiques" et la "limitation des mandats électoraux dans le temps à pas plus de deux mandats consécutifs".
"On ne devient pas citoyen le jour de ses 18 ans, ça se prépare", estime Marie-Pierre Pernette, déléguée générale adjointe de l'Anacej. Selon elle, les différents sondages menés dans le cadre de la campagne "Je vote" démontrent ainsi que, pour les jeunes, la pratique du vote s'inscrit dans une éducation plus vaste à la citoyenneté, à l'école ou dans d'autres sphères. Au-delà de l'accès à l'information, des solutions techniques destinées à faciliter le vote et de ce bagage citoyen indispensable, Marie-Pierre Pernette pointe la "distance avec les élus", un problème de confiance en la parole politique qui détournerait désormais du vote même des jeunes impliqués dans la vie citoyenne.