Archives

Protection de l'enfance - Détermination de l'âge d'un mineur étranger isolé : le HCSP prône "une combinaison de méthodes"

Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) publie un avis rendu le 23 janvier dernier et portant sur "l'évaluation de la minorité d'un jeune étranger isolé". A l'origine, le ministère de la Justice avait saisi celui de la Santé sur la contribution des données médicales cliniques et paracliniques à l'évaluation de l'âge des jeunes concernés, dans le cadre de ses négociations menées par la Justice avec l'Assemblée des départements de France sur le dispositif de prise en charge de ces mineurs. La question de l'âge détermine en effet les modalités de prise en charge, mais aussi le financement par le département (mineurs) ou par l'Etat (majeurs).

Un examen médical "en dernier ressort"

Sollicité à son tour par la ministre de la Santé, le HCSP rend un avis sur un sujet très controversé (voir notre article ci-contre du 21 mai 2012) et qui a suscité des tensions entre les associations, l'Etat et les départements (voir notre article ci-contre du 24 septembre 2009). Cett question a d'ailleurs déjà fait l'objet de deux avis par le passé : celui du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) en 2005 - qui soulignait la faible fiabilité des tests osseux et soulevait des questions éthiques - et celui de l'Académie nationale de médecine en 2007, qui jugeait que l'estimation de l'âge osseux n'est plus fiable à partir de quinze ans (donc inopérante pour déterminer la majorité ou la minorité).
A l'issue d'un passage en revue des différents aspects médicaux et juridiques, le HCSP conclut "qu'il n'y a pas de nouvelles données scientifiques permettant de déterminer avec précision et fiabilité l'âge d'un individu". L'avis formule cependant plusieurs recommandations. Ainsi, il estime que "l'examen médical ne doit intervenir qu'en dernier ressort après évaluation sociale et examen des documents d'état civil", ce qui est au demeurant prévu par la circulaire du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés (voir notre article ci-contre du 4 juin 2013). En outre, cet examen doit être réalisé dans une unité hospitalière de médecine légale, "avec au préalable un entretien en présence d'un interprète, si nécessaire, pour la bonne compréhension de l'objectif de l'examen et l'acceptation indispensable du sujet", avec interdiction de réaliser l'examen en cas de refus de l'intéressé. L'avis précise aussi qu'en cas de suspicion de grossesse, l'examen radiologique ne doit pas être pratiqué.

Des recommandations qui s'imposent sur tout le territoire

Sur la finalité de l'examen, le HCSP précise que "l'examen médical doit permettre d'identifier les évènements de vie et les pathologies qui ont pu influencer le développement du jeune et de prendre en charge ses éventuelles pathologies". Il estime également que l'évaluation de l'âge pubertaire n'est pas indispensable et ne permet pas de fixer un âge d'état civil. Comme le CCNE et l'Académie de médecine avant lui, le HCSP confirme que "la détermination d'un âge osseux ne permet pas de déterminer l'âge exact du jeune lorsqu'il est proche de la majorité légale. De façon plus large, "aucune méthode à elle seule ne peut scientifiquement donner un âge précis. La confrontation des données récoltées lors de l'examen médical est recommandée. Cet examen sert à détecter des arguments médicaux de forte probabilité de minorité. Le médecin doit se prononcer sur la compatibilité entre l'âge allégué et l'âge estimé. Le bénéfice du doute sur la majorité doit toujours profiter au jeune". Au terme de son avis, le HCSP demande "que ces recommandations s'imposent sur le territoire national".