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Démocratisation du sport : la loi définitivement adoptée

Après un cheminement de plus d'un an, la loi visant à démocratiser le sport en France a été définitivement adoptée ce 24 février par l'Assemblée nationale. Les collectivités sont concernées par plusieurs mesures touchant au sport-santé, au sport scolaire et à la gouvernance locale du sport avec, notamment, l'élaboration d'un "plan sportif local".

Finalement, l'actuel quinquennat aura eu sa loi sur le sport. La proposition de loi visant à démocratiser le sport en France a été définitivement adoptée par le Parlement ce jeudi 24 février à l'issue d'une lecture définitive de l'Assemblée nationale. Une adoption in extremis, parmi les toutes dernières de la législature. Ce qu'a d'ailleurs regretté le député Régis Jouanico, évoquant une adoption "dans les arrêts de jeu", au terme d'une "course de lenteur incompréhensible" malgré la procédure accélérée (une seule lecture par chambre) et espérant, à l'approche de Paris 2024, "que les décrets seront pris rapidement". Le texte a en tout cas été adopté par 67 voix pour, 6 voix contre et 7 abstentions.

Le texte, dont le dépôt à l'Assemblée remonte à plus d'un an, reflète la position des députés après l'échec de la commission mixte paritaire du 31 janvier dernier. La principale pomme de discorde a porté sur un article, adopté par le Sénat puis supprimé par l'Assemblée, interdisant le port de signes religieux ostensibles pour la participation aux événements sportifs et aux compétitions sportives organisés par les fédérations sportives et les associations affiliées.

Reste un texte dont les mesures intéressant les collectivités sont regroupées dans le titre Ier relatif au "développement de la pratique pour le plus grand nombre". Elles touchent essentiellement au sport-santé, au sport scolaire et à la gouvernance locale du sport.

Des missions précises pour les maisons sport-santé

En matière de sport-santé, la pratique d’activités physiques et sportives et d’activités physiques adaptées font désormais partie des missions d'intérêt général et d'utilité sociale de l'action sociale et médicosociale. Et les personnes prises en charge par les établissements et services médicosociaux devront être informées de l’offre d’activités sportives et d’activités physiques adaptées assurées en leur sein, à proximité de ces établissements et services ou à proximité du lieu de résidence de ces personnes.

Sur ce chapitre encore, le texte assigne deux missions aux maisons du sport-santé, mises en place depuis 2019 : d'une part, l’accueil, l’information et l’orientation de tout public sur la pratique d’activités physiques et sportives à des fins de santé et sur la pratique d'activité physique adaptée ; d'autre part, la mise en réseau et la formation des professionnels de la santé, du social, du sport et de l’activité physique adaptée.

Les écoles ouvertes aux clubs

En ce qui concerne les équipements sportifs scolaires, le texte prévoit que lors de la création d’une école, d'un collège public ou d’un établissement public local d’enseignement (EPLE) soit aménagé un accès indépendant aux locaux et équipements affectés à la pratique d’activités physiques ou sportives. Un tel accès devra également être aménagé quand ces locaux et équipements font l’objet de travaux importants de rénovation, mais à condition que le coût de cet aménagement soit inférieur à un pourcentage du coût total des travaux. Ce taux sera fixé par décret en Conseil d’État.

En outre, la possibilité pour les présidents du conseil général, pour les collèges, et du conseil régional, pour les lycées, d'autoriser l'utilisation de locaux et d'équipements scolaires par des associations est étendue aux pratiques sportives. Une disposition similaire permet aux associations, aux établissements scolaires et aux établissements d'enseignement supérieur l'usage des locaux et équipements de l’État et de ses établissements publics, le cas échéant après accord de la collectivité propriétaire des bâtiments.

Les mesures touchant aux équipements sportifs comprennent encore un recensement, mis à jour tous les deux ans et transmis aux collectivités, des lieux publics, locaux et équipements susceptibles de répondre aux besoins de l’enseignement de l’éducation physique et sportive ainsi que de la pratique des activités physiques et sportives volontaires des élèves.

Deux derniers points importants concernent le sport scolaire. Outre le programme d’enseignement de l’éducation physique et sportive, l’État garantit une pratique quotidienne minimale au sein des écoles primaires. Il s'agit de la généralisation de l'expérimentation des trente minutes d’activités physiques quotidiennes à l'école lancée à la rentrée 2020. Enfin, les programmes scolaires comporteront obligatoirement l’enseignement de l’aisance aquatique. 

Naissance du plan sportif local

Plus généralement, les communes et EPCI peuvent établir un plan sportif local. Son but : formaliser et ordonner les orientations et actions visant à la promotion et au développement de la pratique des activités physiques et sportives sur leur territoire. Ce plan doit obligatoirement être élaboré en association avec des représentants du mouvement sportif, de l'État, du handicap, des établissements d'enseignement supérieur, des établissements publics de santé, etc.

À propos du plan sportif local, une difficulté surgit. L'article 3, qui l'institue, précise en effet qu'il doit prendre en compte le projet sportif territorial (PST) défini par la conférence régionale du sport. Parallèlement, l'article 4 – qui enrichit au passage le PST de nouveaux objectifs : savoirs sportifs fondamentaux, sport-santé, intégration par le sport, la promotion de l’inclusion et développement durable – dispose que la conférence régionale du sport est chargée d'établir un projet sportif territorial en cohérence avec les plans sportifs locaux de son ressort territorial. Difficile dans ces conditions de savoir lequel doit inspirer l'autre…

En tout état de cause, lorsqu'un plan sportif local existera, l’État et les collectivités impliquées mettront en œuvre "une alliance éducative territoriale" qui favorisera dans les établissements du premier degré l’organisation d’activités de nature à susciter l’engagement des élèves dans le cadre de projets culturels, sportifs, artistiques ou citoyens, le cas échéant à travers la création d’associations dans chaque école. Ces associations seront distinctes des associations affiliées à l'Usep (Union sportive de l'enseignement primaire, qui fédère dans une école publique sur quatre plus de 10.000 associations sportives scolaires), ce qui fait craindre chez les syndicats d'enseignants "la disparition du sport scolaire" dans sa forme actuelle.

Les fédérations intègrent les contrats de ville

On notera encore que l'accès au sport fera désormais partie des objectifs de la politique de la ville, tels qu'ils sont prévus par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine de 2014, et que le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), le Comité paralympique et sportif français (CPSF) et les fédérations sportives agréées sont ajoutés aux organismes autorisés à signer des contrats de ville, lesquels devront dorénavant définir des actions stratégiques dans le domaine du sport (un volet qui entre en résonance avec le rapport que Karl Olive vient de remettre au gouvernement - voir notre article du 23 février 2022).

Enfin, loin du sport pour tous, une dernière mesure intéresse expressément les collectivités propriétaires de stades : à titre expérimental et pour une durée de trois ans, le préfet pourra, sur demande de l’organisateur de la manifestation sportive et du propriétaire de l’enceinte sportive qui l’accueille, y autoriser l’introduction, la détention et l’usage d’engins pyrotechniques. Cette autorisation, demande récurrente des associations de supporteurs de football, s'accompagnera de mesures propres à préserver la sécurité des personnes et des biens. Le maire de la commune sur le territoire de laquelle se situe l’enceinte devra être informé de la délivrance de cette autorisation.