Délégation de la compétence emploi : Etat et régions enterrent la hache de guerre
Cinq mois après l'instruction ministérielle qui avait mis le feu aux poudres, l'Etat et les régions sont parvenus à un accord sur l'expérimentaiton de la délégation de la compétence emploi.
"La mobilisation en faveur des demandeurs d’emplois ne peut réussir sans un partenariat solide entre l’Etat et les régions." Dans un communiqué commun du 16 mars, le ministère du Travail et l’association Régions de France se félicitent de l’accord trouvé sur la délégation de la compétence emploi. Et ce cinq mois après une instruction de la ministre du Travail du 14 octobre 2016 qui avait suscité une vive émotion chez les présidents de région volontaires pour expérimenter cette délégation. Pointant le fait que cette instruction "tout simplement pas acceptable" n'avait fait l'objet d'aucune concertation, ces derniers en avaient demandé le retrait dans un courrier du 21 novembre 2016 (voir ci-dessous notre article du 24 novembre 2016).
L’enjeu ? Cette instruction avait pour but d’expliciter la mise en œuvre des articles 6 et 7 de la loi Notr (portant nouvelle organisation territoriale de la République) du 7 août 2015 ainsi que la plateforme Etat-régions "Ensemble pour l’emploi" du 30 mars 2016 (voir ci-dessous notre article du 8 novembre 2016). Il s’agissait ainsi de préciser les conditions dans lesquelles l’Etat peut déléguer la coordination du service public de l’emploi. A cet égard, l’accord trouvé a permis plusieurs avancées ou éclaircissements.
Tout d’abord, s’agissant de l’élaboration de la stratégie Etat-régions en matière d’emploi, d’orientation et de formation professionnelle (SCEOFP) - les régions y voyaient "un outil de recentralisation des compétences des régions" et un obstacle à la délégation -, Etat et régions se sont entendus pour lui donner "une grande souplesse". Cette stratégie, élaborée par le président du conseil régional et le préfet de région, pourrait se présenter sous la forme d’une "feuille de route partagée". Autre avancée : les régions ont obtenu que la délégation puisse durer six ans maximum (ce que prévoyait la loi), et non trois comme recommandé dans l’instruction.
Les missions locales échappent à la délégation
Concernant le périmètre de la délégation, Etat et régions rappellent qu’elle ne porte que sur la coordination des acteurs du service public de l’emploi (en dehors des dispositifs nationaux) et pas sur la gestion des dispositifs des politiques de l’emploi. Ainsi peuvent être déléguées les missions d’animation et de mise en œuvre de la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) territoriale, la coordination des maisons de l’emploi, l’animation des plans régionaux pour l’insertion des travailleurs handicapés (Prith). Le ministère a accepté que des enveloppes FSE "à définir région par région" puissent aussi être déléguées.
En revanche, les missions locales ne seront pas touchées, Myriam El Khomri ayant jugé que "dans un contexte marqué par la rénovation du droit à l’accompagnement et la généralisation de la garantie jeunes, la situation n’est pas encore aboutie pour envisager des délégations de compétences".
Enfin, les régions se plaignaient qu’aucune compensation financière ni transfert d’agents ne soient envisagés pour les tâches déléguées. Les transferts en crédits et personnels "demeurent conditionnées à une évaluation des premières délégations au terme de leur durée initiale", conformément à la lettre de la plateforme Etat-régions. Cependant, la ministre a accepté que l’Etat puisse mettre à disposition des agents des Direccte "par la voie du détachement" pour répondre aux besoins d’expertise exprimé par certaines régions.