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Rencontres Action coeur de ville - Déjà 1.500 actions engagées pour revitaliser les villes moyennes

Les maires et présidents d'intercommunalités du programme Action coeur de ville étaient réunis à Poitiers, mardi 11 décembre, à l'initiative de la Banque des Territoires, pour partager leurs expériences dans des ateliers qui se voulaient très pratiques. L'occasion aussi de dresser un premier bilan de ce programme qui entre à présent dans le concret : 1.500 actions sont engagées pour un montant de 140 millions d'euros, selon le directeur du programme Rollon Mouchel-Blaisot.

Neuf mois après son lancement, le programme Action coeur de ville entre dans le vif du sujet. Les délais sont tenus : 220 villes sur les 222 retenues dans le programme ont signé leur convention. "Tout a été mené dans un temps remarquablement rapide et ce, grâce à la souplesse du programme et au très fort engagement des élus et des partenaires pour s’investir. C’est extrêmement positif et réconfortant", se réjouit le préfet Rollon Mouchel-Blaisot, directeur du programme, interrogé en marge des Rencontres Cœur de ville organisées par la Banque des Territoires, le 11 décembre à Poitiers (Vienne). Les services du préfet recensent d’ores et déjà 1.500 actions engagées : des études, de l’assistance à maîtrise d’ouvrage ou même des réalisations concrètes, pour un montant total de 140 millions d’euros. Des montants qui englobent l’ensemble des partenaires (y compris les collectivités et le privé), au-delà donc du "package financier" apporté par la Caisse des Dépôts, Action logement et l’Anah. Les trois institutions mettent une grande part des cinq milliards d’euros prévus pendant les cinq ans de ce programme de revitalisation des centres de villes moyennes. Des villes "médianes" plus que moyennes, puisque c’est leur rôle de centralité, entre métropoles et ruralité, qui a été déterminant dans le choix. Lors de ces rencontres, Olivier Sichel, le directeur de la Banque des Territoires, a précisé que celle-ci avait à ce jour engagé 50 millions d’euros : 8 en ingénierie, 30 en fonds propres et 12 en prêts. Plus de 1.300 rendez-vous ont été pris cette année par la Banque des Territoires pour mener à bien ce programme, soit plus de six par ville, a-t-il tenu à préciser, y voyant une illustration de la volonté de la Caisse des Dépôts de se rapprocher du terrain.

Des projets qui se placent sur au moins deux mandats

En lançant Action cœur de ville, le gouvernement a voulu sortir d’une logique d’appel à projets en partant de projets locaux déjà lancés de longue date ou bien à un niveau de maturité suffisant. "On se place sur des projets de moyen et long terme, d’au moins deux mandats", insiste Rollon Mouchel-Blaisot. Ainsi le projet de transformation du centre-ville de Sedan (Ardennes) a-t-il été écrit dès 2008 et "il se prolongera jusqu’en 2027", explique le maire de la ville, Didier Herbillon, qui voit dans Action cœur de ville "la dernière pierre de l’édifice" et "un ensemblier sur l’ensemble des thématiques" de son opération de revitalisation. Ailleurs, le plan a permis à des élus de relancer des projets remis à plus tard en raison des restrictions budgétaires. "Mes envies ont été freinées par la baisse des dotations. Ce que j’ai dénoncé, c’est la disproportion et la non-différenciation des territoires. Certains avaient certaines latitudes pour amortir le choc, pour d’autres c’était leur mettre la tête sous l’eau", témoigne ainsi auprès de Localtis Denis Thuriot, le maire de Nevers (Nièvre), élu en 2014 sur un programme de revitalisation.

"Ce qui se joue derrière Cœur de ville, c’est la transformation de pans entiers des politiques publiques", a assuré Sébastien Lecornu, ministre auprès du ministre de la Cohésion des territoires, à l’occasion des rencontres. "Désormais, on revient dans une logique de guichets et d’intégration, c’est à l’État d’arriver à s’unir." Changement de politique dont il voit la traduction dans plusieurs mesures récentes qui renforceront les capacités d’action des maires, au-delà des seules 222 villes du programme. "Une bonne partie des réponses qu’attendent les élus sont contenues dans la loi Elan (évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, ndlr) avec la création des opération de revitalisation de territoire, qui viendront épouser le champ des cœurs de ville", a souligné le ministre, avant d’égrainer plusieurs des dispositions phares de la loi en matière d’urbanisme commercial : suppression des autorisations en CDAC (commission départementale d’aménagement commercial) pour les projets de moins 5.000 m2 en centre-ville, suspension par le préfet des autorisations commerciales en périphérie (après avis ou à la demande des élus), droit de préemption renforcé... "Il faut continuer d’aller dans ce sens", a-t-il insisté évoquant l’amendement "Pinel-Denormandie" adopté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019, créant un dispositif de défiscalisation pour la rénovation dans l’ancien dans le périmètre des ORT. Cette mesure permettra, selon lui, de "redonner une bouffée d’oxygène". S’agissant de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), le ministre a plaidé pour que soit instituée une "pluri-annualité" des crédits, "sous une forme de contractualisation".

Communauté d'élus

Sébastien Lecornu a aussi salué le renforcement de l’ingénierie de l’État à travers la création de l’Agence nationale de cohésion des territoires, reconnaissant que les préfectures et sous-préfectures avaient été "un peu paupérisées" dans ce domaine. Le ministre a évoqué l’idée de "speed-dating" au ministère entre élus, membres du gouvernement, grands patrons, "tous les deux ou trois mois". "Le pays a grandement besoin qu’on fasse péter quelques cloisons", a-t-il lâché. Olivier Sichel a rebondi sur cette idée, en clôture des rencontres, en proposant "peut-être avant l’été", une "réunion speed-dating entre les maires Cœur de ville et les grands patrons d’entreprises françaises : la SNCF, La Poste, Orange, Carrefour, la Fnac, etc." pour évoquer en direct leurs difficultés ou leurs besoins. Il a aussi développé son projet d’"université des territoires", "pas du tout concurrente avec le CNFPT", qui permettrait de proposer des modules de formation courtes (24 ou 48 heures) dans lesquels les collaborateurs de la Banque des Territoires comme les maires pourraient approfondir certains sujets et se "co-former ensemble".

Mais ces rencontres ont surtout été l’occasion pour les élus de se retrouver en ateliers pour entendre et partager des retours d’expériences très concrets : le projet alimentaire territorial d’Albi, la Smart City avec l’exemple de Nevers, le réaménagement de Sedan et son château fort transformé en hôtel, la rénovation thermique de l’habitat ancien à Cahors, la production locale d’énergie à Arras… Autant de situations que de solutions différentes. "Ce que vous avez initié à Poitiers, c’est cette capacité à se placer dans une logique de communauté, d’avoir des échanges", a appuyé Sébastien Lecornu. "Nous reparlerons longtemps de ces rencontres, les élus ont finalement peu d’occasion d’échanger concrètement. (…) Les maires sont très concrets. L’amour c’est bien, les preuves c’est mieux", a pour sa part commenté Agnès Le Brun, maire de Morlaix (Finistère), porte-parole de l’AMF.

Rollon Mouchel-Blaisot juge lui aussi l’initiative "très intéressante". "Je suis très heureux de ces échanges, cela crée une communauté d’acteurs qui partagent le même engagement, c’est très stimulant." Ce lien devrait être renforcé par la création d’une plateforme dédiée aux élus d’Action cœur de ville début 2019. Olivier Sichel a laissé entendre qu'une nouvelle édition de ces rencontres aurait "vraisemblablement" lieu. En attendant, un grand colloque sera organisé par le ministère de la Cohésion des territoires en mars, à la Cité de l’architecture, sur le thème de l’innovation dans les villes moyennes. Reste le risque de créer un sentiment de déception chez les villes qui ne font pas partie du programme. Le gouvernement devrait prochainement annoncer de nouvelles dispositions portant sur un champ beaucoup plus large de villes. Édouard Philippe devait justement intervenir ce mardi soir pour les trente ans de l’association Villes de France...

 

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