Environnement - Déchets : le réemploi en quête d'une meilleure assise
Le 20 octobre, les premières assises nationales du réemploi ont permis de faire le point sur cette solution, une seconde vie préconisée par la plupart des textes réglementaires sur les déchets. La nouvelle directive-cadre européenne en fait ainsi une priorité. Et globalement, le secteur se porte bien et croît progressivement, à mesure que sa clientèle s’étend et se diversifie. En France, l’Ademe recense 1.810 établissements qui le pratiquent (lieux de vente, de don ou les deux). Quant aux piliers du secteur, ils sont bien connus. Il y a ceux dont la vocation est sociale (Emmaüs, Envie, Croix-Rouge et le réseau des Ressourceries) mais aussi, derrière eux, d’autres acteurs, associations ou entreprises d’insertion. Concurrencé par le marché de l’occasion qui se développe notamment sur internet, le secteur génère de 200 à 300 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploie plus de 16.000 équivalents temps plein (ETP). En 2008, plus d’un demi-million de tonnes de biens usagés ont été collectés par ce biais, essentiellement du textile, des encombrants et des déchets d'équipements électriques et électroniques.
Au niveau territorial, des structures s’intéressent à la promotion et au développement du réemploi. La métropole rennaise a par exemple réalisé un guide du réemploi dans le cadre de sa politique locale de prévention. Pour aider localement la filière et les recycleries, le conseil général de la Lozère a passé un accord-cadre avec les associations. Mais signé par des institutionnels et non par des collectivités, le texte prend difficilement sur le terrain où persistent des problèmes : domination du circuit officieux en déchetterie, manque d’attractivité économique du secteur, manque d’implication des intercommunalités. A condition de reposer sur de solides bases, le réemploi peut pourtant représenter des opportunités pour les territoires. Un point de vue défendu par le Smictom du nord de l’arrondissement de Redon (Ille-et-Vilaine), qui a passé un partenariat entre la collectivité et la recyclerie employant vingt ETP. Coût pour la collectivité, hors location du bâtiment de travail : trente euros par tonne de flux réemploi vendue.
L’intégration d’une recyclerie dans le panel de services offerts par une collectivité locale est un choix fait par la communauté de communes du Plateau picard (Oise). La recyclerie devient de fait un service administratif, mais pas comme un autre puisqu’il est géré par une régie autonome sur le plan financier. Avantage : un gain d’image pour la collectivité et une sécurité d’emploi pour la structure. Inconvénient : cela a un coût et nécessite des moyens techniques. Dans tous les cas, le sur-mesure prévaut car il n’existe pas une seule mais diverses formes juridiques de partenariats possibles entre collectivités et structures de réemploi, qu’il s’agisse d’une simple subvention, d’un marché passé ou d’un service public délégué.
Morgan Boëdec / Victoires éditions
Filière ameublement : les inquiétudes s'installent
Emmaüs et le réseau des Ressourceries se disent attentifs à l’émergence d’une filière REP (responsabilité élargie du producteur) dans le domaine de l’ameublement. Suite à la loi Grenelle II, le décret d’application est en effet en cours. Le ministère de l’Ecologie se veut rassurant sur son contenu et souligne qu’avant tout, le transfert d’une part des charges de collecte et de traitement des meubles usagés sur les metteurs sur le marché favorisera leur réemploi et réduira leur mise en décharge ou leur incinération. Mais les inquiétudes vont crescendo car le problème est que cette filière existe déjà. Pour la Fédération professionnelle des activités du déchet, le nouveau dispositif ne doit surtout pas déséquilibrer le système existant, qui représente plusieurs milliers d’emplois et des investissements importants. La nouvelle REP ne doit par ailleurs pas s’imposer au détriment des collectivités qui ne parviendraient pas à l’appliquer. Et ce notamment du fait que si ce nouveau dispositif s’appuie essentiellement sur les déchetteries, il va rencontrer un premier obstacle de poids car celles-ci sont souvent saturées. Pour sa part, Amorce préconise "de ne pas chercher, comme cela a souvent été le cas, à cadrer l’action des collectivités par un schéma de collecte unique". Pour ce réseau d’élus intervenant notamment dans le domaine des déchets, mieux vaut privilégier "un système à la carte" et "laisser le choix aux collectivités de continuer comme avant ou de rentrer dans le système REP", sans oublier de préserver la collecte en porte-à-porte, à laquelle les élus sont très attachés d’un point de vue social, à en croire l'association.
M.B.