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Politiques de l'emploi - Crise : le COE revient sur l'exception allemande

Les pays qui ont entrepris d'importantes réformes structurelles ont mieux résisté à la crise, analyse le COE. A commencer par l'Allemagne qui fait figure d'exception au sein des pays industrialisés avec une baisse de 21% de son taux de chômage quand il a presque doublé en moyenne ailleurs. La France, elle, a amorti le choc.

La "grande récession", nom aujourd'hui donné à la crise de 2008-2009, a "conduit le taux de chômage dans l'OCDE à un niveau record depuis la Seconde Guerre mondiale", souligne le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE), dans un rapport sur les politiques de l'emploi menées dans les pays industrialisés depuis la crise, adopté le 22 mai. Le taux de chômage est passé de 5,7 % en 2007 à 8,8 % en 2010 ! Mais ces chiffres masquent une grande variété de situations entre des pays comme l'Allemagne où le taux de chômage a carrément diminué de 20,8% à d'autres comme les Etats-Unis, la Grèce, l'Espagne ou le Danemark où la progression a allègrement dépassé les 90% avec un record en Irlande qui a connu un bon de 231,6%. De quoi bousculer le classement d'avant crise et remettre en cause certains modèles comme la flexisécurité à la danoise. Avec une progression de 29,5%, la France s'en est pas si mal sortie et est même passée de la 29e place avant la crise, à la 26e place, sur les 34 pays de l'OCDE. Seulement, le niveau de chômage en France reste supérieur à la moyenne, "du fait de la persistance d'un chômage structurel important depuis très longtemps".
Le COE constate que les pays qui ont su le mieux résister sont ceux qui avaient entrepris d'importantes réformes structurelles avant la crise. Il revient longuement sur cette exception allemande, tant commentée ces derniers mois. L'évolution du chômage en Allemagne est "d'autant plus remarquable que ce pays a connu une contraction de son activité particulièrement prononcée. Essentiellement tirée par les exportations, la production allemande a été frappée de plein fouet par la chute de la demande mondiale et a plus fortement baissé qu'en moyenne dans la zone euro", observe le COE. Outre le recours au chômage partiel, le succès allemand s'explique essentiellement par les réformes Hartz du milieu des années 2000 (renforcement du service public de l'emploi, durcissement de l'acceptabilité des emplois proposés et des conditions d'allocations, baisse des indemnités, etc.), rappelle le COE, mais la démographie a aussi joué un rôle : la population active a diminué de 0,4% entre les 2008 et 2010. Dans le même temps, la France a vu augmenter sa population active d'environ 400.000 personnes...
Le COE insiste aussi sur le revers de la médaille des lois Hartz, à savoir le développement de "petits boulots" payés à 400 euros et une précarisation de l'emploi, notamment dans le secteur de la sous-traitance qui n'exige pas d'accord sur les salaires. Ce qui a conduit à "l'accroissement du nombre de salariés qui, bien qu'employés à temps plein, sont faiblement rémunérés et vivent sous le seuil de pauvreté". Le taux de pauvreté est ainsi passé de 12,2 % en 2005 à 15,6 % en 2010. "Si le taux de risque de pauvreté en Allemagne est supérieur à celui de la France, il demeure inférieur à celui de pays tels que le Royaume-Uni, l'Italie ou l'Espagne", nuance toutefois le COE, pour qui l'essentiel de la hausse de la pauvreté est intervenu entre 2006 et 2007 avant un net ralentissement. "Etant donné la bonne situation économique du pays et l'amélioration de la situation de l'emploi, il est possible que cette tendance s'inverse dans les années à venir", prévoit le COE.