Covid-19 et déplacements : ce qui est de nouveau possible, ce qui ne l'est pas encore (bis)
La loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire promulguée, le gouvernement a finalement pu publier ce 12 mai le décret du 11 mai "définitif" organisant la première phase de la sortie du confinement. Comme annoncé, ont été ajoutés au décret "transitoire" publié la veille deux éléments principaux : la limitation des déplacements au sein du département de résidence ou dans un rayon de 100 km sauf exceptions et la possibilité pour les préfets d'introduire des horaires réservés dans les transports publics collectifs. Le texte retouche également les dispositions relatives à l'accueil des collégiens et interdit les rassemblements de plus de 5.000 personnes jusqu'au 31 août.
La loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions désormais promulguée, après avoir été quelque peu rabotée par le Conseil constitutionnel (voir notre article), le gouvernement a pu publier un nouveau décret du 11 mai 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. À l'exception de quelques menus ajustements rédactionnels, le texte est conforme au précédent décret – également du 11 mai mais publié le jour même – organisant la première étape de la sortie du confinement (voir notre article). Il ajoute toutefois les deux principales dispositions attendues (et annoncées de longue date - voir notre article) sur les "100 km" et les horaires réservés dans les transports et introduit quelques précisions sur l'accueil des collégiens et certains rassemblements.
Déplacements restreints au département ou dans un rayon de 100 km
"Tout déplacement de personne la conduisant à la fois à sortir d'un périmètre défini par un rayon de 100 kilomètres de son lieu de résidence* et à sortir du département dans lequel ce dernier est situé est interdit." Dit autrement, les déplacements de plus de 100 km effectués au sein de son département de résidence restent possibles, de même que ceux conduisant dans un autre département dans la mesure où ils ne dépassent pas 100 km ("à vol d'oiseau", avait indiqué le 7 mai le ministre de l'Intérieur).
Par exception, sont toutefois possibles au-delà :
- les trajets entre le lieu de résidence et le ou les lieux d'exercice de l'activité professionnelle, et déplacements professionnels non susceptibles d'être différés ;
- les trajets entre le lieu de résidence et l'établissement scolaire effectué par une personne qui y est scolarisée ou qui accompagne une personne scolarisée et trajets nécessaires pour se rendre à des examens ou des concours ;
- les déplacements pour consultation de santé et soins spécialisés ne pouvant être assurés à distance ou à proximité du domicile ;
- les déplacements pour motif familial impérieux, pour l'assistance des personnes vulnérables, pour le répit et l'accompagnement des personnes handicapées et pour la garde d'enfants ;
- les déplacements résultant d'une obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie nationales ou à tout autre service ou professionnel, imposée par l'autorité de police administrative ou l'autorité judiciaire ;
- les déplacements résultant d'une convocation émanant d'une juridiction administrative ou de l'autorité judiciaire ;
- les déplacements aux seules fins de participer à des missions d'intérêt général sur demande de l'autorité administrative et dans les conditions qu'elle précise.
Dans ces cas, doit pouvoir être présentée une déclaration (voir le modèle - qui confirme le "à vol d'oiseau") indiquant le motif du déplacement accompagnée, le cas échéant, d'un ou plusieurs documents justifiant ce motif ainsi que d'un justificatif du lieu de résidence.
Le préfet étant par ailleurs habilité à adopter des conditions de déplacement plus restrictives à l'intérieur d'un département lorsque les circonstances locales l'exigent.
Des horaires réservés dans les transports publics collectifs
Le préfet de département (ou, pour l'Île-de-France, le préfet de la région Île-de-France), est habilité à réserver, à certaines heures, eu égard aux conditions d'affluence constatées ou prévisibles, l'accès aux espaces et véhicules de transport public collectif de voyageurs, ainsi qu'aux quais des tramways et aux espaces situés à proximité des points d'arrêts desservis par les véhicules de transport routier collectifs de voyageurs, aux seules personnes effectuant un déplacement motivé par l'un des motifs exposés précédemment.
Là-encore, doivent pouvoir être présentés les documents permettant de justifier le motif de ce déplacement, les préfets pouvant déterminer les formes et modalités particulières de présentation de ces justificatifs. À défaut, outre les sanctions pénales encourues, l'accès aux transports sera refusé.
Autres dispositions
Le nouveau décret dispose par ailleurs que :
- comme annoncé, l'accueil des collégiens du public comme du privé aura bien lieu le 18 mai 2020 et seulement dans les départements de la zone verte (à noter que le décret ne donne toujours aucune date pour les lycées, un examen de la situation sanitaire devant avoir lieu fin mai). Le port du masque (limité aux personnels "lorsqu'ils sont en présence des élèves" dans le précédent décret) est en outre rendu obligatoire pour ces élèves "lors de leurs déplacements", version qui diffère encore des récentes annonces du Premier ministre (après avoir déclaré dans un premier temps que le port du masque serait obligatoire par les collégiens "dans tous les cas", il avait indiqué le 4 mai que ce ne serait finalement le cas "que si les règles de distanciation sociale risquent de ne pas être respectées") ;
- aucun événement réunissant plus de 5.000 personnes ne peut se dérouler sur le territoire de la République jusqu'au 31 août 2020 ;
- pour les vols au départ ou à destination de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, le représentant de l'État peut compléter la liste des motifs de nature à justifier les déplacements.
* Relevons qu'alors que le décret du 23 mars 2020 retenait la notion de "domicile" – défini par l'article 102 du code civil comme lieu où tout Français "a son principal établissement", i.e., selon le professeur Annick Batteur, "le siège légal de la personne, le lieu auquel la loi la rattache, même elle n'y pas réellement présente" – les deux décrets du 11 mai 2020 retiennent, eux, la notion de "résidence", définie par l'universitaire comme "le lieu où la personne vit de façon quotidienne" (A. Batteur, Droit des personnes, des familles et des majeurs protégés, LGDJ, 10e éd.).
Référence : décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. |