Congrès des maires - Mobiliser sa commune contre les violences faites aux femmes nécessite d'agir à tous les niveaux
Identifier les partenaires possibles, sensibiliser les citoyens, créer des réflexes au sein de la municipalité… divers leviers pour lutter contre les violences faites aux femmes ont été évoqués lors d'un forum au cours duquel Marlène Schiappa a fait une apparition le 17 novembre lors du Congrès des maires 2021.
Avec la délégation aux droits des femmes du Sénat, "nous avons suivi l'application des mesures du Grenelle contre les violences conjugales après confinement et nous avons constaté que chacun travaille en silo : autour du département, il y a les maires, les avocats, le bâtonnier, les centres d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF), les professions médicales… Le constat terrible, c'est que chacun travaille de son côté et possède sa propre grille d'évaluation de la situation", déplore la présidente de cette délégation. Pour changer cette donne, Annick Billon préconise de nommer un référent systématique en mairie "qu'il faut former à l'écoute, comme dans les gendarmeries".
"Toutes les places d'hébergement d'urgence ne sont pas adaptées aux familles"
Reprenant quelques-unes des 70 pistes mises en avant dans le rapport publié mi-octobre par sa délégation (lire notre article du 19 octobre 2021), la sénatrice a plaidé pour "des solutions itinérantes" complétées par des "points d'accueil" qui peuvent être organisés "pourquoi pas" au sein de centres commerciaux, de pharmacies, etc. Tous "peuvent être des relais", a-t-elle estimé, "à condition que ces acteurs soient formés". Citant les "téléphones grand danger" et les "bracelets anti-rapprochement", elle a regretté que parfois "les choses sont décidées mais mettent un temps infini" à être concrétisées. Il faut aussi des places d'hébergement d'urgence car on "n'accueille pas une famille comme n'importe qui". "Je veux qu'on me donne le chiffre exact des places ; toutes ne sont pas adaptées", exige Annick Billon.
Concernant l'enfance en danger, en l'occurrence 500 enfants dans son département de la Haute-Loire, Cécile Gallien, maire de Vorey et co-présidente de ce forum, a souligné l'importance de "tenir le maire au courant".
L'autre co-présidente de ce forum, Édith Gueugneau, maire de Bourbon-Lancy, a fait valoir l'opportunité que représentait aujourd'hui la possibilité d'avoir des maisons France Services, soulignant que dans les petites communes, c'était "plus discret, plus confidentiel" de s'y rendre que de pousser la porte de la gendarmerie. La problématique de l'anonymat dans les petites communes a en effet resurgi à plusieurs reprises.
"Donner envie aux autres femmes de devenir maires"
Sur le thème de l'éducation, ce chiffre donné par Annick Billon devrait frapper les esprits : "Dans les cours de l'école primaire, les petites filles n'occupent que 30% de l'espace." "Elles ont intégré le fait qu'il fallait se faire discrètes" et à ce sujet, il y a un véritable travail de fond à mener, estime la présidente de la délégation sénatoriale aux droits des femmes, relayée par Édith Gueugneau. "Ce travail commence par la formation des personnels à la crèche", a-t-elle ajouté, citant le partage de l'espace et la fin d'attribution de jouets stéréotypés.
Annick Billon regrette par ailleurs que de nombreuses jeunes filles en milieu rural se mettent des barrages pour entreprendre des études. Pour lever ces freins, elle rappelle l'existence de "Chemins d'avenir", des "mentorats". Et la sénatrice de terminer son intervention en observant que l'on recense 20% de femmes maires mais qu'en s'engageant, celles-ci peuvent "donner envie aux autres femmes de devenir maires".
Indéniablement, il y a une prise de conscience sociétale sur le sujet. Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'Intérieur chargée de la citoyenneté, intervenant en fin de forum, s'en félicite. Elle relève que la presse évoque désormais les "féminicides" et non plus les "fait divers", comme il y a dix ans. Qu'aujourd'hui, la réception d'une femme en gendarmerie a changé. "40 questions lui sont posées d'emblée au moment d'un dépôt de plainte", "la saisie des armes a lieu dès la plainte, avant même le début d'une enquête". Elle cite également la mise en place de la plateforme arretonslesviolences.gouv.fr, la mise en place d'intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie (ISCG) dans tous les départements. Désormais, le "3919" s'est fait une petite notoriété, alors que quatre ans plus tôt, seulement 7% de la population connaissait ce numéro. "Mais ce combat est loin d'être gagné", a conclu la ministre, estimant que "l'État ne peut pas tout tout seul" et que "les élus ont leur rôle à jouer".