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Congrès des maires - Fonds européens : "Moins de bureaucratie, moins de paperasse", implore l'AMF

Le lancement effectif de la programmation 2021-2027 approche, alors que la signature de l’accord de partenariat est prévue lors du comité État-régions du 29 novembre prochain. Les collectivités sont appelées à fourbir les armes… et à s’armer de patience. Elles, attendent simplification et confiance.

Au Congrès des maires, de forum en forum, quel qu’en soit le thème, un même mot revient comme une antienne : confiance. Confortés par l’épisode de la crise sanitaire – qui a montré au grand jour l’efficacité des collectivités territoriales –, les élus locaux réclament moins d’entraves et davantage d’autonomie (voir notre article du 16 novembre 2021). Ce fut sans surprise le cas lors du forum visant à "mieux mobiliser les fonds européens", alors que s’ouvre la programmation 2021-2027.

Moins de bureaucratie européenne...

"Moins de bureaucratie, moins de paperasse !", implore ainsi Christophe Rouillon, maire de Coulaines (72), membre du Comité européen des régions et co-président de la commission Europe de l’Association des maires de France (AMF). Un objectif que Loredana von Buttlar, cheffe d’unité à la Commission européenne, assure partager. Et de renvoyer la balle dans le camp français : "Les États membres et leurs collectivités régionales et locales ajoutent toujours une couche de réglementation" – plus ou moins épaisse – notamment pour "se couvrir face aux cours d’audit nationales", constate la fonctionnaire bruxelloise. Et de les appeler respectivement à "faire confiance aux autorités de gestion et aux bénéficiaires". D’autant que "la grande majorité des projets est correctement mise en œuvre", souligne-t-elle.

... et surtout franco-française

Une fois n’est pas coutume, les Français – du moins ceux présents – ont balayé devant leur porte, sans (trop) "rejeter la faute à l’Europe". Après que la député européenne Irène Tolleret a souligné les simplifications apportées par la Commission avec la nouvelle programmation – celle des objectifs, passant de 11 à 5, celle de la conditionnalité… –,  Thibaut Guignard, maire de Ploeuc-L’Hermitage (22), président de Leader France et co-président  de la commission Europe de l’AMF, a une nouvelle fois mis en avant la responsabilité des autorités françaises en la matière (voir notre article du 5 novembre 2021). Une thèse que les témoignages contradictoires de la salle sont venus conforter : quand un maire "écoeuré" relève que "faire du Leader aujourd’hui relève du masochisme" alors que c’était un programme "génial", un autre fait part de son enthousiasme face à "la simplificité de la procédure", à tel point qu’il a renoncé, indique-t-il, à solliciter les fonds de la région ou de l’État pour ses projets, jugeant leurs dispositifs trop complexes…  Preuve que d’une région à l’autre, voire d’un GAL à l’autre, les contraintes diffèrent.

Diagnostic et secrétaire d’État absent

Las, alors que deux ans plus tôt, dans ces mêmes lieux, la secrétaire d’État aux affaires européennes d’alors, Amélie de Montchalin, avait promis "d’ouvrir le capot" (voir notre article du 22 novembre 2019), le diagnostic – remis il y a un an par les services d’inspection missionnés – reste bloqué au coffre. Sans doute parce qu’il se rapproche davantage du moteur à explosion que de l’amortisseur, aux dires des rares qui ont pu en prendre connaissance. Clément Beaune, désormais en fonction, a pourtant annoncé à plusieurs reprises depuis plus d’un an sa publication "imminente". Le secrétaire d’État n'était pas présent au congrès, alors que la France s’apprête à présider l’Union. "Rares sont les secrétaires d’État qui n’ont pas honoré le congrès", remarque Christophe Rouillon auprès de Localtis. Auparavant, il avait plus largement déploré "un manque de dialogue avec l’État", qui s'est au mieux conduit "de façon légère", pointant singulièrement ici les négociations de l’"accord de partenariat" – qui définit les priorités d’intervention et les modalités de mise en œuvre de la politique de cohésion en France, son articulation avec le plan de relance et qui conditionne les programmes opérationnels des régions.

Accord de partenariat en vue

Christophe Rouillon ne cache pas son impatience, "espérant que cet accord sera bientôt décidé afin que nous puissions enfin bénéficier des fonds". Du moins les solliciter. Philippe Cichowlaz, chef du pôle Politique de cohésion européenne de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), justifie le retard par la publication tardive du "paquet cohésion", le 30 juin dernier (voir notre article du 16 juillet 2021). Mais se veut rassurant : "la rédaction finale est en cours", la version définitive devant être validée "lors du comité État-régions du 29 novembre prochain". Restera encore à obtenir le feu vert de la Commission européenne (on relèvera que cette dernière a adopté l’accord de partenariat de la Grèce le… 29 juillet dernier). Une chose est sûre : Bruxelles ne cédera pas sur l’interdiction du double financement "plan de relance / politique de cohésion", Loredana von Buttlar dissipant tout espoir en la matière. Ce que regrette amèrement Christophe Rouillon, qui souligne que "leurs objectifs sont distincts : relancer l’économie pour le premier, réduire les inégalités pour la seconde". Regrets d’autant plus âpres qu’il craint que "le plan de relance ne renforce les inégalités", en favorisant les collectivités déjà les mieux dotées.

Qui veut gagner des millions ?

Reste que "les fonds européens, c’est beaucoup d’argent. On aurait dû retenir comme titre du forum Qui veut gagner des millions ?", plaisante l’élu sarthois. Thibaut Guignard insiste lui sur le fait que "toutes les collectivités, mêmes les plus petites, peuvent en bénéficier". Il invite en outre ces dernières "à ne pas se limiter au programme Leader, mais à aller chercher du Feder, du FSE+, de l’Erasmus+" – programme dont il a vanté "l’extrême simplicité, avec 80% d’avances, comme quoi c’est possible !". Daniel Cornalba, maire de L’Étang-la-Ville (78), met lui en avant la richesse des dispositifs d’information disponibles, bien que sous-utilisés (Maisons de l’Europe, Représentation permanente de la Commission en France…) et invite ses collègues à la mutualisation, en profitant notamment de la recension des projets opérée dans le cadre des contrats de relance et de transition écologique (CRTE). Jacques Depieds, maire de Mane (04), alerte de son côté sur la "nécessité d’avoir toujours des projets en attente et de ne pas être impatient". Il plaide par ailleurs "pour des subventions globales, et non spécifiques, afin de laisser aux élus le choix de leurs investissements". Et rappelle, comme un coup de pied de l’âne, que c’est ce que prévoit d’ailleurs la Charte européenne de l’autonomie locale (voir art. 9-7).