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Energies renouvelables - Concessions hydrauliques : l'ouverture à la concurrence inquiète les élus

Des entreprises, syndicats et élus locaux attachés au caractère public des aménagements hydrauliques haussent le ton contre la proposition faite par le gouvernement d'ouvrir par lots à la concurrence les concessions arrivant à échéance. La députée iséroise Marie-Noëlle Battistel en a fait son cheval de bataille. Alors qu'un accord est cherché avec Bruxelles, cette parlementaire, qui préside par ailleurs l'Association nationale des élus de la montagne (Anem), s'est exprimée sur le sujet le 30 mai en commission à l'Assemblée nationale.

La députée socialiste de l'Isère Marie-Noëlle Battistel s'est vu confier la mission par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale de phosphorer sur le devenir des installations hydroélectriques dans la continuité d'un rapport déjà très complet qu'elle avait remis fin 2013 avec le député LR du Haut-Rhin Eric Straumann. Lors d'un point d'étape le 30 mai devant cette même commission, elle a réaffirmé son opposition au renouvellement et à l'ouverture à la concurrence de ces concessions. Et son soutien au fait de "garder la maîtrise sur notre plus flexible et plus compétitive source de production d'électricité d'origine renouvelable". Fort d'un rang à part dans notre mix énergétique, l'outil de production hydraulique touche par ailleurs au service public de l'eau et à ses usages et impacts associés : soutien d'étiage, irrigation, pêche, tourisme, refroidissement des réacteurs nucléaires, prévention des risques d'inondation, etc. Partie intégrante du paysage des vallées des territoires de montagne, ces 400 barrages exploités à 80% environ par EDF constituent ainsi un enjeu majeur pour les territoires et le développement durable.

Sortir de l'attentisme

Sous le précédent gouvernement, rien n'a été vraiment acté, le programme de remise en concurrence a continué à cumuler du retard et aucun appel d'offres n'a été lancé. En février dernier, le gouvernement a relancé le dossier pour répondre au contentieux lancé fin 2015 par la Commission européenne. Ce qui suscite depuis une levée de boucliers de la part d'élus locaux (tribunes dans la presse, chaîne humaine près d'un barrage isérois, courrier de 172 élus au président Emmanuel Macron pour prolonger la concession de la Compagnie Nationale du Rhône) qui craignent les effets d'une ouverture même progressive sur ce "bien national dont l'Etat doit se réserver l'usage", indique Eric Straumann. "L'actualité est pressante. Le gouvernement n'a pas rendu publique sa réponse à Bruxelles. Obtenir des réponses est compliqué. Le scénario proposé de remise en concurrence par lots de concessions - dont deux dès cette année et en plafonnant l'accès aux lots par candidat - ne convient en tout cas pas. D'ailleurs les directions générales de la Commission européenne rencontrées m'ont confirmé que cette méthode d'allotissement et de plafonnement n'est en rien imposée", critique Marie-Noëlle Battistel.

Scénarios alternatifs

Le découpage des vallées remises en concurrence est, à ses yeux, "inadéquat notamment parce qu'il ne respecte pas la méthode des barycentres", qui consiste à favoriser la création de lots unifiés sur une même vallée, "et ce afin d'éviter le saucissonnage et une gestion morcelée préjudiciable au développement de l'hydroélectricité". Selon elle, la concurrence n'est pas la seule méthode possible. Son précédent rapport, qui n'a pas pris une ride, explorait le champ des solutions alternatives et euro-compatibles. Comme d'autres députés (voir cette question au gouvernement de mars dernier), elle invite le gouvernement à utiliser la procédure de prolongation des concessions contre investissements, telle qu'elle a été introduite dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV). "Il n'y a pas de fatalité juridique européenne. La mise en demeure a perdu en pertinence. Il faut avoir le courage de la contester et convaincre la Commission d'autoriser à prolonger les concessions là où la nécessité de réaliser des investissements se justifie." La règle veut que leur montant corresponde alors au bénéfice tiré de la prolongation. Une telle proposition est-elle une façon de reculer pour mieux sauter ? Les marges de manœuvre sont-elles si étroites ? "Prolongation sous condition de travaux, possibilité de créer des sociétés d'économie mixte (Sem) au capital partagé entre public et privé et associant les collectivités et riverains... Utilisons les outils qui sont dans la loi LTECV et mettons plus ouvertement le débat sur la table", conseille Marie-Noëlle Battistel.

 

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