Commerce : pour Procos, le début d'année est celui "de tous les dangers"
Les répercussions de la crise Covid-19 sont importantes sur le commerce avec une baisse de 18% du chiffre d'affaires sur l'année 2020. Le bilan de Procos, présenté le 29 janvier 2021, fait aussi état d'un début d'année 2021 difficile avec le report des soldes et le couvre-feu avancé à 18 heures.
"Si on avait fermé les magasins en décembre 2020, 50% des réseaux seraient potentiellement en cessation de paiement fin janvier." C'est avec ce constat sinistre qu'Emmanuel Le Roch, délégué général de Procos, la fédération du commerce spécialisé, a conclu la conférence de presse de présentation du bilan 2020 le 29 janvier 2021 (quelques heures avant l'allocution surprise de Jean Castex annonçant la fermeture des centres commerciaux de plus de 20.000 m2... voir notre article de ce jour). Un bilan sans appel, avec une baisse de 18% du chiffre d'affaires des magasins, jusqu'à 30% pour la restauration et 27,5% pour la chaussure. Et les ventes en ligne, qui se sont fortement développées (augmentation de 80% sur l'année 2020, jusqu'à 150% pour l'alimentation spécialisé, 132% pour la maison et 129% pour la culture, les jouets et cadeaux), ne compensent que peu la perte de chiffres d'affaires : de 2 à 4% seulement.
Les répercussions en termes d'emplois sont déjà là : 7.829 emplois en moins, avec 2.203 fermetures de magasins d'enseignes annoncées en 2020, dont 1.390 pour les centres commerciaux en centre-ville et 700 en périphérie. Globalement, comme l'indique Procos, les centres-villes sont à la peine alors que les moyennes surfaces de périphérie sont plus résilientes. Procos insiste aussi sur le cas particulier de Paris, qui subit de plein fouet l'impact de la baisse du tourisme international, de l'augmentation du télétravail, avec de grandes artères en danger, comme les Champs-Élysées, le boulevard Haussmann et la rue de Rivoli.
Pour Procos, l'année 2021 s'annonce difficile avec, déjà pour janvier 2021, un impact très lourd du report des soldes et du couvre-feu à 18 heures. "Soit on est sorti de la contrainte sanitaire forte en mars-avril 2021 et l'activité reprend normalement assez vite, soit c'est en juin, et d'ici là, comment les magasins vont-ils fonctionner et est-ce qu'ils sont encore à -20% et -30% voire dans certains sites à -40 ou -50% ?, a questionné Emmanuel Le Roch, on a mesuré la conséquence passée ; on ne sait pas la projeter, mais dans la restauration on est potentiellement à risque (de fermeture) sur 15 à 20% des sites."
"Plus la crise sera longue, plus les obligations de restructurations seront élevées"
Pour "sauver un secteur essentiel", Procos propose plusieurs actions dont l'élargissement du fonds de solidarité à toute fermeture administrative et perte de plus de 50% du chiffre d'affaires, ou la prise en compte de 70% des frais fixes. Si le réseau considère comme positive l'évolution récente des modalités du fonds, qui conduit l'État à couvrir 70% des charges fixes des entreprises administrativement fermées, et qui "permet de prendre en compte plus de structures", comme l'a souligné Emmanuel Le Roch durant la présentation, il semble nécessaire de trouver des solutions aux seuils et plafonds pour ne pas handicaper les réseaux consolidés. L'aide est ainsi limitée à 3 millions d'euros sur les mois de janvier à juin 2021 (à noter que la Commission vient tout juste de relever les seuils possibles à 10 millions d'euros ; aux États de s'ajuster - voir notre brève de ce jour).
Autres pistes : assurer un report automatique du remboursement du prêt garantie par l'Etat (PGE) pour toutes les entreprises du commerce et mettre en place des prêts participatifs (8 à 10 ans), pour "éviter les défaillances et ne pas handicaper les transformations à venir", précise le document de Procos. "Plus la crise sera longue, plus les obligations de restructurations seront élevées, a précisé Emmanuel Le Roch. Il faudra passer la crise et aussi investir sur l'avenir. S'ils sont trop endettés, certains d'entre eux seront obligés de se couper une main pour pouvoir continuer. Pour le moment, on ne sait pas dire si ce sera 10 ou 20% des sites." Le délégué général de Procos alerte aussi sur le phénomène de vacance. "Si sur des sites, il commence à y avoir des fermetures, leur attractivité va baisser", a-t-il indiqué.
Les CDAC "en chute libre"
Côté surfaces commerciales, Procos fait état d'une baisse des permis de construire : 3,3 millions de mètres carrés de surfaces autorisées en 2020, contre 3,9 en 2019 et 4,2 en 2018. Les commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) sont "en chute libre", assure Procos avec 0,62 million de m2 en 2020, contre 1,31 million en 2019. La surface moyenne des projets diminue aussi fortement, de 24.400 m2 en 2018 à 9.800 m2 pour le top 10 des grands projets déposés en CDAC. Procos liste toutefois quelques grands projets qui ont ouvert leurs portes en 2020 comme Lillenium à Lille (22.770 m2), Steel à Saint-Étienne (52.514 m2) ou encore Frunshopping à Perpignan (20.800 m2). D'autres devraient ouvrir en 2021 (Shopping Promenade Strasbourg, 48.553 m2, la Nouvelle Samaritaine à Paris, 21.302 m2, ou encore le centre commercial La Sablière à Aurillac, 19.514 m2).