Collèges et lycées se sont bien emparés de la part collective du Pass culture
Une très grande majorité des établissements du second degré s'est tournée vers la part collective du Pass culture pour soutenir des projets d'éducation artistique et culturelle. Mais les montants dépensés sont encore très loin des moyens budgétaires disponibles.
En 2022-2023, pour sa première année pleine de mise en œuvre, la part collective du Pass culture a bien produit ses effets dans les collèges et lycées qui, pour la plupart, y ont eu recours, bien que les dépenses engagées soient restées bien en deçà des budgets disponibles, selon un bilan du ministère de la Culture, porteur du dispositif.
Créé en 2019 et généralisé deux ans plus tard à tous les jeunes de quinze à dix-huit ans pour favoriser leur accès à la culture et diversifier leurs pratiques culturelles, le Pass culture a évolué en 2022 avec la création d'une part collective allouée aux établissements scolaires du second degré. Le but ? Soutenir les actions et les projets d'éducation artistique et culturelle (EAC) en milieu scolaire.
Une montée en charge "évidente"
Pour l'année scolaire 2022-2023, le ministère de la Culture chiffre à 60.000 le nombre d'activités financées grâce à la part collective du Pass culture, qu'il s'agisse de visites de musées, spectacles, concerts, projections cinématographiques, rencontres avec des artistes ou ateliers de pratique artistique. Selon ce bilan, "la montée en charge du dispositif est évidente". En effet, le nombre d'actions ou de projets utilisant la part collective a été multiplié par près de six par rapport à la première demi-année de mise en œuvre. Finalement, 86% des collèges et 89% des lycées ont utilisé ce moyen pour financer au moins une activité d'EAC.
On note un taux de recours supérieur dans les établissements publics par rapport à ceux du privé – avec un plafond à 96% pour les lycées publics et un plancher à 68% pour les collèges privés. Par ailleurs, le taux de recours est quasiment identique entre les établissements urbains et ruraux et tout à fait identique entre les établissements REP et REP+ et ceux hors REP du secteur public.
D'un point de vue géographique, le taux de recours s'étend, pour les collèges, de 32% en Corse à 100% à Mayotte. En métropole, la Nouvelle-Aquitaine fait presque carton plein (96%), tandis que seuls 74% des collèges normands ont eu recours au Pass culture. Pour les lycées, la Corse reste en queue de classement (67% de taux de recours) et la palme de l'utilisation du dispositif revient à la Bretagne et aux Pays de la Loire (98%).
Des niveaux de dépense modérés
Toutefois, les niveaux de dépense restent modestes eu égard aux budgets disponibles. La part collective s'élevait pour l'année scolaire 2022-2023 à 25 euros pour chaque élève de quatrième et troisième, 30 euros par élève de seconde et de CAP et 20 euros pour ceux de première et terminale. Les collèges utilisateurs du Pass culture ont en moyenne dépensé 46% du budget qui leur était alloué au titre de la part collective et les lycées seulement 40%.
Les collèges REP et REP+ n'ont dépensé que 43% de leur budget, contre 48% pour les collèges publics hors REP. Le taux de dépense est par ailleurs plus élevé dans les collèges ruraux (52%) qu'urbains (44%). On remarque encore que l'existence d'un référent EAC au sein des établissements coïncide avec une meilleure utilisation des crédits.
D'un point de vue territorial, les collèges de Corse n'ont dépensé en moyenne que 15% de leur budget, alors que ceux d'Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Normandie et Centre-Val de Loire n'atteignent pas 40%. Chez ceux qui ont le plus dépensé, le taux de dépense est compris entre 54% et 58% (Mayotte, Bretagne, Nouvelle-Aquitaine, Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté). Côté lycées, aucune région n'atteint un niveau moyen de dépense de 50%. Les lycées de Bretagne, Nouvelle-Aquitaine, Pays de la Loire et Guadeloupe affichent une moyenne comprise entre 47% et 49% de leur budget. En bas de classement, on retrouve les lycées du Centre-Val de Loire (25% du budget dépensé) et de Corse (14%).
Théâtre et cinéma plébiscités
En termes de domaines artistiques financés par le Pass culture, le théâtre (32% des activités au collège, 36% au lycée) et le cinéma (24% et 31%) sont largement plébiscités, devant le patrimoine (14%), les arts visuels, plastiques ou appliqués (10%) et la musique (9%). On remarque que selon le cadre de l'activité (projet à l'initiative de l'établissement, projet lié à un dispositif ou enseignement artistique), ces domaines ne sont pas sollicités de la même façon. Les projets à l'initiative de l'établissement se tournent un peu plus vers le patrimoine, tandis que plusieurs dispositifs nationaux ("Collège au cinéma", "Lycéens et apprentis au cinéma") accentuent le poids du cinéma.
Plus généralement, explique le ministère de la Culture, "le cadre institutionnel de l'EAC […] incite au partenariat avec des structures et des acteurs culturels, et le Pass culture y contribue au collège comme au lycée". Ainsi, 86% des activités bénéficiant de la part collective au collège et 90% au lycée sont organisées en partenariat avec une structure ou un acteur culturels. Parmi eux, on retrouve des théâtres et salles de spectacle (21% des activités réalisées en partenariat au collège et 27% au lycée) et les salles de cinéma (20% et 27%).
› Part individuelle du Pass culture : un bilan très contrastéParallèlement à son rapport sur la part collective du Pass culture, le ministère de la Culture tire également un bilan plus que mitigé de la part individuelle – un crédit individuel de 380 euros par an pour tous les jeunes de 15 à 18 ans. Si les bénéficiaires du dispositif sont de plus en plus nombreux – avec un taux de recours supérieur à 81% pour la génération née en 2004 – et satisfaits, ses impacts sur leurs pratiques culturelles apparaissent "contrastés" et sa capacité à transformer les pratiques culturelles est jugée "incertaine". Entre octobre 2023 et février 2024, les offres du catalogue concernaient des livres à 84% et de la musique enregistrée pour 15%. Le cinéma, les musées, le théâtre ou les concerts ne formant, ensemble, que 1,4% de l'offre. Résultat : le montant dépensé pour l'achat de livres représente 54% du total, devant le cinéma (18%). Très loin derrière, on retrouve le spectacle vivant (1%) et les musées (1%). Globalement, le rapport note "la persistance d'un lien fort […] entre les pratiques culturelles et le milieu social d'origine". De leur côté, les collectivités territoriales n'ont pas constaté, avec la mise en place de la part individuelle du Pass culture, de transfert de crédits ni de désengagement au détriment de dispositifs spécifiques. Elles souhaitent toutefois disposer de davantage de données afin d'optimiser l'articulation de leurs politiques en faveur de la jeunesse avec les offres du Pass et rendre certaines offres plus visibles, notamment celles proposées par les musées et les lieux de lecture publique situés à proximité des quartiers prioritaires de la politique de la ville. |