Cantines scolaires : l'Inrae identifie une piste "prometteuse" pour améliorer la durabilité des repas
Augmenter la fréquence des repas végétariens et servir du poisson et des viandes blanches plutôt que de la viande rouge aux autres repas est la piste mise en évidence par une enquête publiée fin mars 2022 par l'Inrae "pour réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en conservant la qualité nutritionnelle". Une évolution qui ne pourra pas se faire sans une révision de la réglementation actuelle.
"Est-il possible d’ajuster les menus pour diminuer l’impact carbone et conserver un équilibre nutritionnel ?", se sont interrogées des chercheuses de l'Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) dans une enquête qui apporte selon elles "un résultat prometteur, à l’aide d’un modèle mathématique poussé". Leurs travaux, menés en collaboration avec MS-Nutrition, parus le 24 mars 2022 dans European Journal of Nutrition, suggèrent notamment que "servir aux enfants des repas végétariens trois fois par semaine et du poisson et de la viande blanche aux deux autres repas de midi est une piste intéressante pour concilier bonne nutrition et respect de l’environnement".
Rappelons qu'en France, ce sont 8,5 millions de déjeuners qui sont servis chaque semaine dans les cantines scolaires. "Pour assurer un bon équilibre nutritionnel des menus, lutter contre la précarité alimentaire et instaurer des comportements alimentaires plus durables chez les enfants, des règles spécifiques obligatoires existent déjà", rappelle l'Institut dans son communiqué du 28 mars. Ainsi, d'après ces règles, les repas doivent être structurés avec 4 ou 5 composantes et respecter 15 règles de fréquence de service, pour 15 types de plats sur 20 repas. De plus, pour réduire l’impact environnemental des repas, la loi Egalim exige depuis le 1er novembre 2019 le service d’au moins un repas végétarien par semaine. C'est donc dans ce contexte déjà très contraint que les chercheuses ont cherché à établir "le meilleur compromis pour réduire encore plus l’impact environnemental sans faire de concessions sur la qualité nutritionnelle".
Quatre leviers identifiés pour améliorer la durabilité des repas
Pour y parvenir, elles ont identifié quatre leviers permettant d'améliorer la durabilité des repas servis aux écoliers : "réduire de 5 à 4 le nombre de composantes des repas" ; "respecter les 15 règles de fréquence imposées par la loi et 5 recommandations supplémentaires spécifiques aux repas végétariens" ; "augmenter le nombre de repas végétariens" et "éviter la viande rouge". Le communiqué précise que les leviers ont été analysés seuls ou en combinaison dans 17 scénarios différents. "Pour chaque scénario, 100 séries de 20 repas scolaires ont été générées automatiquement, en couplant un tirage aléatoire de plats au sein d’une base de données de 2.316 plats scolaires", détaille également l'Inrae. Avant de préciser que "la qualité nutritionnelle des séries de repas a été évaluée sur la base du score d’adéquation nutritionnelle moyenne (ANM) pour 2.000 kcal". Enfin, dernière précision, lors de ces travaux, l’impact environnemental a été mesuré par plusieurs indicateurs : "émissions de gaz à effet de serre (Eges), potentiel d’acidification sur les écosystèmes terrestre et d’eau douce, utilisation de l'eau et des ressources fossiles, eutrophisation d'eau douce et marine et usage des terres".
Nécessité d'une révision de la réglementation
Il ressort de ces résultats "qu'augmenter la fréquence des repas végétariens jusqu’à 12 repas sur 20 et servir du poisson et des viandes blanches aux autres repas semble être le meilleur compromis pour réduire de moitié les Eges des repas scolaires en maintenant leur bonne qualité nutritionnelle". Cette piste rejoint en partie les recommandations déjà émises par l'association Greenpeace en octobre 2020 (voir notre article du 1er octobre 2020). Cette recommandation coïncide également avec l'un des points de blocage récurrents qu'ont les élus dans la mise en oeuvre de la loi Egalim et qui avait été identifié dans une enquête de l'Association des maires de France (AMF), datant de la même année (voir notre article du 10 décembre 2020).
"Ce dernier scénario prometteur, incluant 3 repas végétariens par semaine, 1 fois du poisson et 1 fois de la viande blanche plutôt que rouge au cinquième repas, nécessite néanmoins une révision de la réglementation actuelle", prévient l'Inrae. L'Institut de recherche rappelle que celle-ci impose en effet le service de viande rouge à l’école au moins 4 repas sur 20. Ce qui est sûr, c'est que "réformer la restauration scolaire dans ce sens aurait un impact qu’il est important d’examiner sur les systèmes alimentaires, en considérant en particulier tous les acteurs des chaînes d'approvisionnement des marchés publics", estime l'Inrae.