Canicule et bâti scolaire : les syndicats en appellent aux collectivités
Alors que la France, et le Sud-Ouest en particulier, connaissent un épisode de canicule intense, les syndicats d'enseignants en appellent à des mesures fortes dans les établissements scolaires. Des mesures qui s'adressent en premier lieu aux collectivités territoriales, compétentes en matière de bâti scolaire.
L'épisode était attendu. Il n'a pas manqué son rendez-vous : la France connaît en cette semaine du 13 au 19 juin 2022 une canicule aussi intense que précoce qui a des répercussions fortes dans le domaine scolaire. Pour preuve, à la suite du placement en vigilance rouge par Météo France de douze départements du Sud-Ouest (quatorze depuis ce vendredi 17 juin), le ministère de l'Éducation nationale a annoncé dans un communiqué du 16 juin que "les parents qui le souhaitent et qui sont en mesure de le faire pourront garder leurs enfants à domicile et ne pas les envoyer à l’école ou au collège" le 17 juin. Tout en précisant que "sous réserve d’éventuelles décisions de fermeture prises par les autorités préfectorales, les écoles et établissements maint[enaient] l’accueil des élèves [et que] seules les activités physiques de faible intensité [étaient] autorisées". En outre, le ministère rappelle que des recommandations ont été envoyées en début de semaine [lire notre article du 14 juin] et que les écoles et collèges peuvent, en fonction des contextes locaux, dispenser des enseignements en plein air dans les zones ombragées.
Manque d'anticipation
Si cet épisode était attendu, donc, les syndicats de l'enseignement estiment qu'il n'a pas été anticipé. Pour le Snes-FSU, "on ne peut pas, à chaque mois de juin, s’alarmer des fortes températures en se demandant à quelques jours des examens s’il faut les reporter". Et il rappelle que, dès 2019, alors qu'un épisode caniculaire avait conduit à repousser les épreuves du DNB (diplôme national du brevet), il avait "exigé qu'une réflexion s’engage sur le bâti scolaire et son adaptation au changement climatique".
Car au-delà des recommandations d'urgence émises par le ministère de l'Éducation nationale pour inviter les personnels des établissements scolaires à maintenir les volets fermés lorsque la façade est ensoleillée, à limiter l’ouverture des fenêtres ou à s'hydrater régulièrement, c'est bien la question du bâti scolaire qui est en cause du côté des syndicats d'enseignants. Une question qui "n’a pas avancé suffisamment rapidement", selon le Snes-FSU, lequel ajoute : "La petite part du plan de relance dédiée à ces investissements ne s'est pas encore concrétisée sur le terrain, des guides et recommandations ont été édictés mais ne produisent pas encore leurs effets."
SUD éducation juge pour sa part les "espaces scolaires inadaptés" et déplore, non sans confusion à propos des compétences respectives de l'État et des collectivités, que l’Éducation nationale n’ait pas "conçu de plan d’ampleur pour rénover ou reconstruire des locaux souvent dégradés, mal isolés, mal ventilés, ni pour végétaliser des cours de récréation massivement bitumées".
Manque de contrainte pour les communes
De son côté, la FNEC FP-FO, qui a bien compris que l'État n'avait pas la main sur le bâti scolaire, demande avec plus de réalisme "que l’État employeur des agents qui exercent dans des bâtiments appartenant aux collectivités intervienne auprès de ces mêmes collectivités pour qu’elles mettent immédiatement en œuvre des mesures".
Même son de cloche au SNE, qui commence par regretter que "rien ne contraigne les communes" à mettre en œuvre les solutions existantes pour améliorer le confort thermique des écoles, avant de demander "qu’un diagnostic de confort thermique d’été soit réalisé dans toutes les écoles". Il propose même une règle : "Un score minimum serait imposé, selon les régions, obligeant les communes à engager des travaux dans un délai raisonnable." Sans ces mesures, insiste le SNE, "les conditions de travail des enfants et des enseignants de certaines régions resteront problématiques et très dépendantes de la volonté politique des communes".
Pour des températures maximales de travail
En attendant que des décisions interviennent pour encourager aussi fortement que possible l'adaptation du bâti scolaire aux nouvelles réalités climatiques, plusieurs syndicats d'enseignants avancent des solutions d'urgence. Alors que le Sgen-CFDT regrette qu'"il n’existe pas de seuil réglementaire de température maximale ou minimale entraînant l’obligation d’interrompre une activité scolaire ou de fermer un établissement scolaire", SUD éducation réclame "l’instauration de températures minimales et maximales de travail". Aujourd'hui, la décision de fermeture d'une école revient au maire, en principe avec l'accord de la direction de l’établissement et l'inspection d'académie… mais pas nécessairement celui du préfet. La Dépêche nous apprend ainsi que le maire de Saint-Benoît-de-Carmaux (Tarn) a publié un arrêté municipal de fermeture des écoles les 16 et 17 juin malgré l'opposition de la préfecture.
Parmi les autres aménagements aussi temporaires que pragmatiques souhaités par les organisations syndicales de l'éducation, citons la mise à disposition de climatiseurs, de ventilateurs, de rideaux occultants, de fontaines d’eau fraîche, etc. Et pour parvenir à ses fins, le SNE y va de ses conseils… avec une prudence de Sioux : "Toujours considérer la mairie comme un allié. Cette dernière n’a pas d’obligation en termes de confort thermique, il faudra donc faire preuve de tact et de diplomatie courtoise. Passer par le biais des élèves est un moyen de jouer sur la corde affective. Le relais des parents d’élèves permet à l’équipe enseignante de ne pas se placer en opposition avec la municipalité. Se fâcher serait contre-productif." Surtout par cette chaleur…