Environnement - Canalisations d'eau : les professionnels plaident pour une accélération de la rénovation
Canalisateurs de France, organisation fédérant 400 entreprises spécialisées dans la pose de canalisations, a appelé le 6 juillet à une accélération de la rénovation des réseaux d'eau et d'assainissement qu'ils jugent être dans un état "catastrophique". Les professionnels, soutenus dans cette démarche par André Flajolet, député UMP du Pas-de-Calais et président du Comité national de l'eau, ont rappelé quelques chiffres alarmants. 1 litre d'eau sur 4 est perdu dans les canalisations, selon le ministère de l'Ecologie. 1,3 milliard de mètres cubes d'eau potable disparaissent ainsi, soit 190.000 litres d'eau perdus toutes les 30 secondes. L'Association scientifique et technique pour l'eau et l'environnement (Astee) estime pour sa part l'indice de perte à 120 litres par abonné et par jour.
La vétusté des équipements est pointée du doigt. D'après l'enquête Cador 2002 sur le patrimoine des canalisations d'alimentation en eau potable, la moitié du réseau daterait d'avant 1972 et 20% des canalisations posées avant 1960 sont en fonte grise ou en acier, des matières cassantes ou corrodables qui favorisent les fuites. Il est donc urgent d'agir mais pour les professionnels, les moyens ne sont pas au rendez-vous. Les dépenses d'équipement portant sur l'eau et l'assainissement ont accusé une baisse estimée à 5,9% en 2010 par rapport à 2009 alors que les investissements théoriquement nécessaires seraient de 1,5 milliard d'euros par an. D'après la dernière enquête "Eau et assainissement" du ministère de l'Ecologie, le renouvellement du réseau n'est que de 5.041 km par an (sur un total de 906.000 km). "Au rythme actuel des investissements, affirment les canalisateurs, il faudrait près de deux siècles pour remplacer les canalisations. Une canalisation d'eau potable ne serait changée qu'au bout de 170 ans."
Coût des fuites : 2,4 milliards d'euros par an
Au prix moyen de l'eau potable de 1,6 euro/m3, le coût des pertes dans les réseaux serait de 2,4 milliards d'euros par an. "Avec ces moyens, 1.500 à 6.000 km supplémentaires de réseaux pourraient être renouvelés chaque année", estiment les professionnels qui avancent des propositions pour accompagner les collectivités territoriales et les inciter à renouveler les canalisations. Cela passe d'abord par une meilleure connaissance des équipements. La loi Grenelle 2 impose la réalisation d'un descriptif détaillé incluant un inventaire des réseaux avant la fin 2013. "Les collectivités locales auront de fait une obligation d'amélioration du rendement des réseaux", souligne l'organisation professionnelle qui rappelle avoir accompagné la mise en place des inventaires du patrimoine dès 1997. Elle compte continuer à les soutenir "dans la mesure où ils se pratiquent dans la neutralité et où ils sont accompagnés par une charte de qualité des réseaux d'assainissement ou de l'eau potable". Cette charte devrait être signée fin 2011 par l'ensemble des parties prenantes (ministères, Agences de l'eau, Office national de l'eau et des milieux aquatiques-Onema, professionnels, etc.).
Plus on attend pour réaliser les travaux, plus ils risquent d'être coûteux, préviennent les canalisateurs qui jugent nécessaires que les collectivités puissent prévoir dans leurs budgets l'amortissement des réseaux. Il faudrait pour cela une réforme de la comptabilité M49 spécifique à l'eau pour que les amortissements techniques et financiers soient identiques (sur 40 ans, par exemple). Selon eux, cela permettrait de couvrir la période appropriée de renouvellement du réseau, sans surcharger financièrement la collectivité. Enfin, avancent-ils, "les collectivités qui souhaitent pratiquer une baisse du prix des services de l'eau pourraient répercuter une partie de la baisse des tarifs auprès de leurs abonnés mais pourraient provisionner également une autre partie pour le renouvellement et l'entretien de leur patrimoine ainsi que pour l'amélioration du service de l'eau".