Environnement - Fuites d'eau : une enquête révèle d'importants écarts entre les grandes villes françaises
Dans son édition du 8 novembre 2009, le Journal du Dimanche a publié une enquête sur l'état du patrimoine de distribution d'eau potable des 57 plus grandes villes de France métropolitaine. Réalisée à partir des derniers rapports annuels sur le prix et la qualité du service (RPQS) d'eau potable émis par leurs maires respectifs, elle révèle d‘importants écarts de pertes d'eau potable selon les villes. En effet, les niveaux de pertes varient de 3,5% à Paris jusqu'à 41% à Nîmes, ville qui accuse le plus fort taux de pertes devant Avignon (35,5%), Rouen (31,7%), Amiens (28,7%) et Toulon (26,7%).
"Fuites jamais traitées, ruptures intempestives : à quelques exceptions près, l'état des canalisations du pays est calamiteux", résume l'enquête. Selon celle-ci, le ministère de l'Ecologie admet que le taux moyen de perte est en augmentation et atteint 25% des volumes mis en distribution. Quant aux élus et aux régies ou délégataires, "ils se renvoient les responsabilités" : les communes méconnaissent souvent l'historique et l'état de leurs propres réseaux et les opérateurs privés ne s'engagent qu'à traiter les petites fuites qui interviennent sur un réseau dont les communes restent avant tout les responsables et propriétaires.
Dans les faits, il conviendra de nuancer puisque tout se joue néanmoins au cas par cas, et contrat par contrat ; notons en ce sens que des villes comme Morlaix sont dernièrement parvenues à s'entendre avec leur délégataire (Veolia Eau) sur un renforcement de la politique et du système de détection et réduction des fuites.
Dans le cadre de cette enquête, Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat à l'Ecologie, a réagi en appelant à une prise de conscience générale et à la mobilisation des collectivités. "Nous ne pouvons plus nous permettre un tel gâchis (...). Il est faux de croire que nous aurons toujours de l'eau en abondance (...).Il suffit de compter les arrêtés liés à la sécheresse chaque été, qui couvrent jusqu'à soixante départements. Les réserves ne sont pas réparties uniformément sur le territoire et la consommation reste insuffisamment maîtrisée", a-t-elle souligné. Selon elle, "au rythme actuel des investissements, il faudrait un siècle et demi pour remplacer les canalisations. Les communes doivent accélérer." Des engagements ont été pris dans ce sens dans la loi Grenelle 1 et seront précisés dans le projet de loi Grenelle 2, a rappelé la secrétaire d'Etat. "Les collectivités ont l'obligation par la loi de rechercher les fuites. Nous prévoyons de leur demander de ramener leur taux de pertes à 15%, voire moins dans les zones urbaines denses, pour être au même niveau que les pays européens qui ont un réseau similaire au nôtre." Interrogée sur le financement des travaux, évalués à 1,5 milliard d'euros, la secrétaire d'Etat a indiqué qu'elle travaillait actuellement à la définition d'un calendrier. "Cela prendra plusieurs années, peut-être dix ans. Nous mettons en place un dispositif incitatif, a-t-elle expliqué. Les agences de l'eau, qui dépendent de l'Etat, aideront les communes à mener leur programme de rénovation, en contrepartie d'un surcroît de redevance. Quand les travaux seront achevés, ce surcoût sera supprimé."
Morgan Boëdec / Victoires-Editions