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Environnement - Bruxelles propose une nouvelle directive pour renforcer l'efficacité énergétique

Un 3X20 qui risque de se limiter à un 2X20 : c'est ce que redoute la Commission européenne à propos des objectifs fixés par le "paquet climat énergie" à l'horizon 2020. En effet, si elle estime que les objectifs de réduction de 20% des émissions de gaz à effet de serre et d'augmentation de 20% de la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale seront très probablement atteints, on est loin du compte pour celui visant à réduire de 20% les consommations d'énergie primaire. Tout au plus parviendra-t-on à une baisse de 10% en 2020.
Après les appels qui lui ont été adressés successivement par le Conseil européen du 4 février dernier, le Conseil énergie du 10 juin et le Parlement européen, la Commission a donc été amenée à réfléchir à de nouvelles mesures permettant d'atteindre l'objectif cible des 20% d'amélioration de l'efficacité énergétique. Elle a adopté un nouveau plan d'action en mars dernier qui sera traduit sur le plan législatif par une nouvelle directive qu'elle a présentée ce 22 juin. Ce texte destiné à remettre l'UE sur la bonne voie du "paquet climat énergie" prévoit des mesures pour que les Etats membres intensifient leurs efforts d'efficacité énergétique, depuis la transformation de l'énergie jusqu'à sa consommation finale en passant par sa distribution. "Notre proposition vise à permettre à chacun – particuliers, entreprises et pouvoirs publics – d'utiliser plus efficacement l'énergie au quotidien et de mieux gérer sa consommation d'énergie, a déclaré le commissaire européen chargé de l'énergie, Günther Oettinger. Potentiellement, elle devrait permettre de créer de nombreux nouveaux emplois dans l'UE."

Des objectifs sectoriels contraignants

"Le texte repose sur quatre piliers : des objectifs nationaux et indicatifs d'efficacité énergétique, un suivi de ces objectifs, avec des rapports que les Etats membres devront adresser chaque année à la Commission, des mesures générales de promotion de l'efficacité énergétique et surtout des mesures sectorielles touchant tous les acteurs (secteur public, ménages, services, entreprise d'énergie, industrie)", a expliqué Vincent Berruto, chef de l'unité Efficacité énergétique à l'Agence exécutive pour la compétitivité et l'innovation, qui dépend de la DG Energie de la Commission. Si les objectifs nationaux ne sont pas atteints en 2014, la Commission pourra les rendre contraignants. Mais d'ores et déjà les objectifs sectoriels le sont. Le secteur public – et donc les collectivités locales – est invité à donner l'exemple. Il aura d'abord l'obligation légale d'acheter des produits, services et biens immobiliers présentant des performances élevées d'efficacité énergétiques. Le projet de directive prévoit aussi la fixation d'un objectif annuel de rénovation de 3% de la surface au sol totale pour les bâtiments publics au-delà de 250 m2 (soit le double de ce qui se fait actuellement en France). Il encourage également les collectivités locales à développer les plans locaux pour l'efficacité énergétique et à introduire des systèmes de gestion énergétique. Le projet de texte entend aussi inciter les organismes publics à utiliser plus systématiquement les contrats de performance énergétique.

Plus d'informations pour les consommateurs

Du côté des consommateurs, il prévoit notamment de rendre obligatoire les compteurs individuels affichant à chaque instant la consommation d'énergie réelle et une facturation précise et fréquente sur la base des consommations réelles. Les entreprises de distribution ou de vente d'énergie au détail seront tenues de réaliser chaque année au niveau des consommateurs finaux des économies d'énergie représentant 1,5% de leurs ventes en volume à travers des mesures d'efficacité énergétique (amélioration du système de chauffage, installation de double vitrage, isolation du toit, par exemple). "Alternativement, les Etats membres pourront proposer d'autres dispositifs d'économie d'énergie, par exemple des programmes de financement ou des accords volontaires, conduisant aux mêmes résultats mais n'imposant pas d'obligation aux entreprises de distribution ou de vente d'énergie", précise la Commission.
Les PME seront encouragées  à se soumettre à des audits énergétiques et à diffuser les bonnes pratiques tandis que les grandes entreprises auront, elles, l'obligation de procéder à des audits de leur consommation d'énergie pour déceler des économies possibles.
La proposition de directive prévoit aussi un contrôle du niveau d'efficacité des nouvelles capacités de production d'énergie ainsi que l'établissement de plans nationaux décennaux pour la chaleur et le refroidissement et l'obligation de récupération de chaleur pour les centrales et les sites industriels existants et en projet. Enfin, elle veut imposer aux régulateurs nationaux de tenir compte des critères d'efficacité énergétique dans leurs décisions, notamment lorsqu'ils approuvent les tarifs de réseaux. A noter que le secteur des transports, qui a grandement besoin de renforcer son efficacité énergétique, n'est pas directement concerné par ce projet de directive. Il fera l'objet d'un texte à part entière, suite au Livre blanc "Transports 2050" publié par la Commission le 28 mars dernier, a précisé Vincent Berruto.
La proposition de directive sur l'efficacité énergétique sera discutée en juillet avec le groupe de travail Energie du Conseil, sous présidence polonaise. Les discussions se poursuivront ensuite jusqu'à la fin 2011 avec ce même groupe et avec les députés européens, sous la coordination d'un rapporteur que le Parlement devrait nommer en juillet. Si un accord politique intervient au cours du premier semestre 2012, le texte devrait entrer en vigueur au plus tard fin 2012 pour être transposé dans les législations nationales fin 2013.