Sobriété foncière : vers un objectif « Zéro artificialisation nette »

Dans un contexte d’urgence climatique et face à l’importance de la préservation des ressources naturelles, la sobriété foncière s’inscrit comme un enjeu majeur pour l’aménagement du territoire. C’est dans ce sillage que s’inscrit l’objectif « Zéro artificialisation nette » prévu dans la loi Climat et Résilience, visant à réduire la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers.

L’objectif soulève la nécessité d’une transformation profonde des pratiques d’urbanisme et d’aménagement. C’est à ce niveau qu’intervient la Banque des Territoires, en offrant notamment aux collectivités des financements et un appui en ingénierie afin de les aider à structurer des projets viables et durables.

Objectif « Zéro artificialisation nette » : l’origine et l’impact sur les territoires 

L’impact de l’artificialisation des sols

D’après les données annuelles du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), environ 20 000 hectares sont artificialisés chaque année. C’est l’équivalent de 4 terrains de football par heure.

Or, les sols jouent un rôle clé dans la lutte contre le changement climatique. Non seulement ils stockent 2 à 3 fois plus de carbone que l’atmosphère, mais ils abritent également 25 % de la biodiversité mondiale.

Au-delà de la réduction drastique de la richesse des sols, l’artificialisation a de multiples impacts écologiques et anthropologiques :

  • réduction de la capacité d’infiltration et de filtration de l’eau ; 
  • augmentation du risque d’inondation ; 
  • disparition des terres agricoles ; 
  • perte de biodiversité – avec 65 % des espèces d’insectes menacées en France.

L’objectif ZAN dans la loi Climat et Résilience

La loi Climat et Résilience de 2021 marque un tournant majeur dans la politique d’aménagement du territoire. Et pour cause, elle introduit l’objectif ambitieux de diviser par deux l’artificialisation des sols entre 2021 et 2031. Cette législation établit par ailleurs une trajectoire progressive, pour atteindre une artificialisation nette nulle d’ici 2050.

Cette transformation s’opère à travers des modalités complémentaires, dont notamment :

  • les décrets d’application de 2023, qui encadrent les mécanismes de compensation et de renaturation des sols artificialisés ; 
  • la révision des documents d’urbanisme (Plans locaux d’urbanisme, Schémas de cohérence territoriale…) d’ici 2028 ; 
  • l’attribution d’une responsabilité aux régions pour la coordination des efforts territoriaux.

Ce cadre vertueux a été pensé pour assurer l’équilibre entre les besoins de développement et les impératifs de préservation des espaces naturels. Aussi, la réussite de cet objectif repose sur deux piliers complémentaires : renaturer les espaces déjà artificialisés, et renforcer la protection du foncier naturel existant.

Les enjeux et obligations pour les territoires

La mise en œuvre de l’objectif ZAN impose aux territoires des obligations concrètes et des enjeux complexes à relever dans leur stratégie d’aménagement. Ceux-ci commencent par la compensation écologique, qui exige des collectivités qu’elles développent des actions de renaturation pour compenser l’artificialisation des sols.

Depuis 2022, les territoires sont aussi soumis à l’obligation légale de collecter des données sur leurs Zones d’activités économiques (ZAE). Elles incluent l’état des sols, l’identité des propriétaires et l'évaluation des taux de vacance.

Au-delà du recensement des besoins et opportunités, cet inventaire s’inscrit dans une logique plus large de planification régionale. En effet, les territoires doivent faciliter l’identification et la valorisation des projets de compensation dans les plans régionaux de lutte contre l’artificialisation des sols.

Cette organisation a déjà abouti à plusieurs projets de compensation :

  • des collectivités cherchent à équilibrer l’artificialisation en mettant en place des actions de compensation écologique et de renaturation ;
  • des Établissements publics d’aménagement (EPA) créent des zones d’activités en conservant la propriété foncière à long terme (portage foncier) pour préserver les espaces naturels ;
  • des collectivités achètent des bassins versants pour sécuriser le captage d’eau potable et protéger leurs ressources en eau ;
  • les territoires du littoral se prémunissent face au risque de submersion marine.

 

Le rôle des collectivités pour ralentir l’artificialisation des sols 

Comprendre et mesurer l’artificialisation des sols

La mise en œuvre de la stratégie ZAN repose avant tout sur le diagnostic de l’artificialisation. Cette évaluation approfondie s’appuie sur la cartographie des zones d’enjeu. Deux outils ont été développés en ce sens.

Tout d’abord, le portail France Foncier +. Il s’agit d’un dispositif national territorialisé actualisé en continu pour afficher en temps réel l’offre de foncier économique disponible sur l’ensemble du territoire. L’Atlas des ZAE quant à lui, vise à aider les collectivités dans la création de leurs inventaires de ZAE, toujours dans le cadre du dispositif France Foncier +.

Cet inventaire doit répondre à des critères précis de recensement des surfaces et des propriétaires des unités foncières, d'identification des occupants et d'analyse des taux de vacance. Une collecte de données indispensables dans la mesure où environ 30 000 ZAE couvrent près de 500 000 hectares de territoire en France

Par ailleurs, pour assurer la fraîcheur de ces informations et faciliter la planification de leurs actions, les collectivités sont tenues d’actualiser leur inventaire tous les 6 ans.

Renaturer le foncier artificialisé

La renaturation du foncier artificialisé s’inscrit dans une démarche globale de la planification territoriale. En ce sens, il existe un lien entre l’exécution de la stratégie ZAN et les documents d’urbanisme, tels que les Plans locaux d’urbanisme (PLU) et les Schémas de cohérence territoriale (SCoT).

Les ZAE émergent sous ce volet comme un levier de stratégique de la sobriété foncière. La réflexion doit porter sur :

  • leur impact dans l’artificialisation des sols ; 
  • l’adoption de pratiques de gestion plus durables pour garantir leur sobriété foncière ; 
  • la transformation des friches urbaines
  • la requalification des ZAE existantes.

Pour assurer plusieurs cycles de vie sur un même foncier, les modèles innovants comme les baux à construction s’annoncent prometteurs dans le sillage de l’objectif ZAN. À titre d’illustration, la ville de Rennes prévoit la création de 700 à 800 logements sur d’anciennes friches, en utilisant le bail réel solidaire pour éviter la spéculation foncière. Une approche circulaire de l’aménagement vouée à se démocratiser.

Acquérir et protéger le foncier naturel

L’acquisition et la protection du foncier naturel constituent un axe parallèle essentiel dans la stratégie ZAN. Ces notions s’intègrent aussi dans les documents de planification territoriale.

Pour faciliter la préservation active des zones sensibles, les collectivités disposent par ailleurs d’outils adaptés, tels que la possibilité de contracter des prêts à très long terme. Cette approche permet d’envisager d’importantes acquisitions, comme celle d’un bassin versant pour protéger durablement les ressources en eau potable.

 

La Banque des Territoires s’engage pour la sobriété foncière

Des financements adaptés aux besoins des collectivités locales 

La Banque des Territoires accompagne les collectivités vers la sobriété foncière grâce à une gamme d’outils financiers spécifiquement adaptés à leurs enjeux et besoins.

Parmi ces solutions phares, on retrouve :

  • le Prêt Gaia, un dispositif de financement à très long terme (40 à 60 ans) avec un taux attractif pour les projets de renaturation, de recyclage urbain et de développement du logement social ;
  • le co-investissement dans les projets de renouvellement urbain ;
  • la création de foncières communales ou intercommunales pour faciliter la gestion durable et maîtrisée sur le long terme.

Un appui en ingénierie et des consignations pour des projets fonciers durables

Au-delà du soutien financier, la gestion du foncier repose sur une vision technique et environnementale. C’est pourquoi la Banque des Territoires a également la possibilité d’apporter une expertise technique approfondie aux collectivités.

Cet appui en ingénierie peut prendre la forme de plusieurs dispositifs :

  • le co-financement de diagnostics territoriaux pour identifier précisément les besoins fonciers des territoires ;
  • un accompagnement personnalisé dans l’élaboration de stratégies foncières à long terme ;
  • la gestion des compensations et expropriations nécessaires à la maîtrise foncière (consignations) ;
  • le soutien à des initiatives locales innovantes telles que les projets de renaturation des littoraux pour prévenir les risques de submersion marine.

FAQ : Questions/réponses

Comment les collectivités locales peuvent-elles concilier développement urbain et sobriété foncière ?

Plusieurs solutions sont à la portée des collectivités locales : densifier des zones déjà urbanisées, réhabiliter les friches industrielles et promouvoir la rénovation des bâtiments existants. Autant d’actions répondant aux besoins de développement tout en limitant l’étalement urbain et l’artificialisation des sols.

Quels sont les principaux défis pour atteindre l'objectif de zéro artificialisation nette d'ici 2050 ?

L’objectif Zéro artificialisation nette (ZAN) s’accompagne de plusieurs défis. Les collectivités doivent repenser les modèles d’aménagement de leur territoire, surmonter la réfraction au changement et mobiliser des financements adaptés. Aussi, toutes les parties prenantes – y compris les propriétaires fonciers – cherchent un mode de fonctionnement adapté pour se coordonner, tant dans la prise de décisions que dans la mise en œuvre des actions.

Comment la renaturation des sols contribue-t-elle à la sobriété foncière ?

L’artificialisation a eu – et a encore – de nombreux impacts négatifs sur l’environnement. La renaturation, qui consiste à restaurer les sols artificialisés en espaces naturels, permet d’améliorer plusieurs aspects écologiques : biodiversité, gestion de l’eau ou encore stockage du carbone, entre autres. C’est ainsi que cette pratique compense les effets négatifs de l’artificialisation et soutient l’objectif de sobriété foncière.

Quelles sont les implications économiques de la sobriété foncière pour les propriétaires ?

La sobriété foncière peut entraîner une revalorisation des terrains situés en zones urbanisées, au détriment des terrains en périphérie non destinés à l'urbanisation. Les propriétaires doivent donc être attentifs aux objectifs ZAN et aux enjeux d’aménagement et de renaturation des sols, pour adapter leurs stratégies en conséquence.

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