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Biodiversité : le programme Nature 2050 catalyse les projets

Dressant un bilan après deux ans de déploiement du programme Nature 2050, CDC Biodiversité qui le porte est optimiste : les contributeurs affluent et les projets associant notamment des collectivités avancent bien. L'objectif d'attirer de nouveaux acteurs vers des actions de restauration de la biodiversité et d'adaptation des espaces naturels au changement climatique, sur lequel est revenue le 2 octobre lors d'un séminaire annuel cette filiale de la Caisse des Dépôts, est bien parti pour être atteint.

Où en est le programme d'action Nature 2050, cet outil de financement innovant de la transition écologique porté par CDC Biodiversité, filiale de la Caisse des Dépôts ? "Depuis son lancement fin 2016, il progresse et suscite une dynamique avec 26 projets en cours de réalisation sur une surface de près de 600 hectares, et de nouveaux défis comme celui de définir des indicateurs pour évaluer l'impact et la pertinence des actions menées", a salué Éric Lombard, directeur général de la Caisse des Dépôts, lors du colloque consacré le 2 octobre à son avancement.
Soutenu par un éventail diversifié de partenaires dont trois régions (Occitanie, Paca, Île-de-France), quelques villes ou métropoles (Sevran, Saint-Étienne, Grand Paris), des établissements publics (agences de l'eau, Épamarne) et deux parcs naturels régionaux (Marais poitevin, Périgord-Limousin), ce programme incite les acteurs économiques et les collectivités à s'engager sur des actions menées - d'où son nom - jusqu'en 2050.

Rythme de croisière et répartition territoriale

"Financé par des entreprises et des acteurs économiques désireux d'agir dans et pour les territoires où ils opèrent, il attire une trentaine de contributeurs avec pour l'heure plus de trois millions d'euros collectés et l'objectif de stabiliser autour d'un million d'euros collectés chaque année", escompte Jean Clinckemaillie, chef de projets à CDC Biodiversité. Sur les deux tiers des seize premiers projets engagés, des actions et travaux ont débuté dans la plupart des régions métropolitaines même si certaines (Grand Est, Bretagne) manquent à l'appel. Nul projet n'est prévu dans les outre-mer.
Un équilibre est respecté entre petits et grands projets et entre les divers enjeux de biodiversité en ville, de restauration des continuités écologiques ou des zones humides, de préservation des écosystèmes marins ou des espaces forestiers. Mais aussi de transition agricole : un sujet sur lequel, Éric Lombard l'admet, "les efforts doivent être accentués".

Quand l'agroforesterie s'enracine

Cela tombe bien : le second train des dix nouveaux projets fraîchement adopté en comporte six de nature agricole, qui visent à réintroduire l'arbre au cœur des exploitations. Retenus dans le cadre du concours Arbres d'avenir, ils sont directement portés par les exploitants, parfois regroupés comme dans la Drôme pour un projet commun d'agroforesterie de grande ampleur (6.500 arbres à planter sur 30 hectares pour diviser de grandes parcelles).
Planter des arbres dans les cultures ? Un viticulteur languedocien, lauréat l'an dernier du concours, est venu témoigner que cela marche : "Nous allons faire pousser une forêt sur un dixième de ce domaine situé entre l'étang de l'Or, les Cévennes et encerclé par l'urbanisation. 2.000 arbres y seront plantés avec de nombreux avantages pour le paysage, la biodiversité", motive Adrien Tréchot (Enclos de la Croix). Autre partenariat fructueux, celui noué avec le Centre national de la propriété forestière (CNPF) qui débouche dans le Lot sur un changement de pratique sylvicole. En outre, la réflexion débute pour intégrer ces projets forestiers dans la démarche du label bas-carbone (voir notre article dans l'édition du 3 juillet 2018).

Mosaïque d'actions et appropriation locale

Une autre nouvelle action soutenue dans les Pyrénées-Atlantiques consiste à restaurer et maintenir de la biodiversité en améliorant le franchissement des poissons sur près de 220 hectares du bassin de l'Adour. Même esprit dans le bassin versant de la Haute-Vienne, en Limousin, drainé par les rivières Isle et Dronne dont le lit naturel va être rétabli, avec à la clé la création d'une prairie humide.
Ainsi, la mosaïque de contributeurs, partenaires et projets qui se construit patiemment donne à ces derniers une visibilité croissante. Élus et acteurs locaux y sont associés. C'est le cas à Sevran (Seine-Saint-Denis) où la renaturation de la friche Kodak, projet phare de Nature 2050, implique l'exécutif local. Mais aussi à Saint-Étienne (Loire) où ce dialogue se concrétise dans la création d'un verger conservatoire et la renaissance d'un bois communal, ancien site minier hissé (et oublié) sur une colline.
De même à Bugnicourt (Nord), où la commune et l'agglo du Douaisis ont contribué à la renaturation d'une parcelle préservée de l'urbanisation et transformée en un pré-verger de 133 arbres fruitiers régionaux à vocation pédagogique, "un site exploité raisonnablement, accueillant des animaux et ouvert aux locataires, riverains et acteurs locaux", détaille Amandine Rostan, chargée de projets politique de la ville chez Habitat du Nord. Sa création a coûté 93.000 euros. L'engagement d'entretien dure cinq ans. "Réfléchissons tous ensemble au devenir de ce site qui est mis au service du territoire, des habitants et publics scolaires", ajoute-t-elle.

Un modèle qui séduit

"Les bailleurs sociaux comme Immobilière 3F,  CDC Habitat et Domofrance ont beaucoup apporté à Nature 2050", rebondit Antoine Cadi, directeur recherche et innovation à la CDC Biodiversité. "Si ce partenariat avec Nature 2050 intéresse une collectivité comme la nôtre, c'est dans une logique de complémentarité avec nos propres réseaux et actions. Cette possibilité de s'engager pour un projet local et à long terme, et de mobiliser des fonds privés, nous a séduits", témoigne Valérie Raimondino, chef du service mer et littoral à la région Paca.
Dernière collectivité à se rallier à la démarche, la métropole du Grand Paris (MGP) lance un appel à projets Nature 2050 : "Outre notre compétence Gemapi, l'autre levier pour agir et garantir plus de nature est le Scot ou schéma d'aménagement de la métropole en cours de d'élaboration. Nous voulons renaturer les villes de la métropole et regagner d'ici vingt ans les 1.500 hectares de pleine terre - agricole ou espaces verts - qui ont été perdus et artificialisés", conclut Daniel Breuiller, vice-président de la MGP délégué à la mise en valeur du patrimoine naturel et paysager, à la politique de la nature et à l'agriculture en ville.

Baie de l'Aiguillon : le grand ménage débute
Exemple d'opération bénéficiant d'un gros coup de pouce du programme Nature 2050 : celle de restauration, entre terre et mer, dans les vasières littorales entre la Vendée et la Charente-Maritime, d'un riche écosystème et d'habitats naturels pour les oiseaux d'eau migrateurs, impactés depuis des années par des gisements d'huîtres abandonnés. "Ces pièges à sédiments recouvrent la vasière. Pour intervenir sur 120 hectares de milieux saumâtres, en discontinu et fonction des marées, il faut du savoir-faire et du matériel adapté", souligne Dominique Aribert, directrice du pôle conservation de la nature de la LPO cogestionnaire avec l'ONCFS de la réserve. Cette action expérimentale est menée dans le cadre de Life. Après une phase d'instruction réglementaire et des études préalables qui ont pris du temps, les travaux vont enfin débuter cet automne. M.B.