Environnement - Bilans de gaz à effet de serre : les collectivités font leurs comptes
L'heure du décompte a sonné : début 2013, un tiers seulement des collectivités avaient rempli leurs obligations en matière de bilans réglementaires de gaz à effet de serre (GES). Proche de celui du bilan carbone, un outil précurseur de l'Ademe, cet exercice de réalisation nécessite d'opter pour une méthodologie et de s'y tenir. "Ainsi qu'un portage politique fort", a ajouté Tatiana Lecossais, qui suit ce dossier à Nantes Métropole, lors d'un colloque de l'Ademe sur les bilans GES qui s'est tenu les 8 et 9 octobre. La définition du périmètre est essentielle. Par exemple, Nantes Métropole a ratissé large et s'est intéressée à la fois aux émissions internes, induites par la combustion d'énergies fossiles dans ses biens propres (périmètre d'émissions dit Scope 1), aux émissions intermédiaires (Scope 2) associées à sa consommation d'électricité, de chaleur, de froid ou de vapeur et à leur transport et distribution et - fait plus rare car cela est facultatif - aux émissions globales indirectement liées à son fonctionnement en tant que collectivité (Scope 3), celles par exemple liées aux livraisons de produits, à la fabrication des biens de production qu'elle utilise ou encore aux déplacements de ses agents avec des moyens autres que sa flotte de véhicules. Avec ce mode de calcul, la communauté urbaine est parvenue au résultat qu'elle ne maîtrise directement que 6% des émissions de GES produites sur son territoire, 94% étant le fait des particuliers et entreprises. "Plus que les chiffres exacts, cela donne un ordre d'idée des enjeux et de la nécessaire implication des acteurs et habitants du territoire", a commenté Tatiana Lecossais. Même constat dans la ville de L'Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne) qui, à partir de bilans réalisés sur un mode volontaire, a conclu que la priorité était de partir des pistes d'actions suggérées par les habitants. "Ils voulaient rénover en priorité la bibliothèque, alors que nous avions pensé en interne commencer par la mairie, elle aussi énergivore. Pour ne pas rater le coche de leur implication, nous avons respecté leurs points de vue", a expliqué Jérôme Noble, chargé de mission développement durable dans cette ville.
Des postes d'émissions aux premières actions
Les bilans ont un autre avantage : ils permettent de mettre le doigt sur des points sensibles. "Le bilan de notre patrimoine et de nos services a montré que l'alimentation arrivait en tête des postes d'émissions, ce qui nous a étonnés. Nous amorçons depuis un travail de sensibilisation avec les cantines et allons jusqu'à parler de consommation de viande, dont la production est très émettrice de gaz à effet de serre. Et ce même si le sujet est délicat à aborder car certains enfants de familles modestes n'en mangent parfois qu'à la cantine", a indiqué Jérôme Noble. Par ailleurs, quid des émissions produites par les délégataires ? A Nantes, elles ne passent plus à la trappe depuis que la ville a lancé il y a deux ans des bilans carbone (une vingtaine en tout) sur ses grands services urbains. "On touche alors à des métiers très divers, cela nécessite un vrai travail de fourmi. Pour chaque service public délégué, un bilan carbone est dressé. Cela nous a permis d'identifier des actions pertinentes à mettre en place sur des domaines jusqu'alors peu visibles, par exemple en lien avec les émissions dues au transport de déchets vers les plateformes où ils sont traités", a relaté Tatiana Lecossais. Le bilan de GES est donc bien un point de départ, reste ensuite à passer à l'action. Avec des outils concrets. "Pour sensibiliser à l'isolation du bâti, la thermographie aérienne suivie par une mise en ligne accessible à tous des données thermiques fait partie des bons outils à manier", a recommandé Sylvie Berline, conseillère municipale en charge de l'énergie à L'Haÿ-les-Roses.
Vers une approche groupée énergie-air-sol
Pour aller plus loin dans cette vision exhaustive sur un territoire donné des émissions de GES et de polluants, la région Nord-Pas-de-Calais élabore dans le cadre d'un programme de deux ans (décembre 2012-décembre 2014) une méthode intégrant les données habituelles mais aussi celles liées à l'air et aux sols. "Cette méthode a vocation à être appropriable par les territoires engagés dans un plan d'action climat territorial (PCET). Elle sera testée début 2014 sur quatre territoires pilotes", a annoncé Agnès Jacques, de l'Ademe Nord-Pas-de-Calais. "Nous nous orientons également vers une prise en compte d'autres polluants, en lien avec le plan de protection de l'atmosphère (PPA) qui est en cours dans notre région", a conclu Raphaël Vial pour la région Nord-Pas-de-Calais.