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Développement rural - "Bilan de santé" de la PAC : les raisins de la colère chez les agriculteurs

Les syndicats sont unanimes pour critiquer l'accord obtenu par les 27 ministres de l'Agriculture sur le bilan de santé de la Politique agricole commune (PAC), jeudi 20 novembre. "Un accord à bas prix", pour la FNSEA. "La maison brûle et les ministres européens mettent de l'huile sur le feu", clame la Confédération paysanne. Pour Jeunes agriculteurs, c'est un "détricotage des outils de régulation du marché". Un constat qui tranche avec la satisfaction des Vingt-Sept au sortir de leur réunion marathon de 14 heures. Réunion qui a permis d'arracher un accord à la majorité qualifiée dans la foulée de l'avis du Parlement adopté le même jour. Pour la France, qui a fait de cette réforme l'une des priorités de sa présidence, avant la grande bagarre budgétaire de l'après 2013, l'accord est présenté comme un succès politique. Il s'agit du premier réaménagement depuis 2003, alors que la PAC représente encore 40% du budget européen. Mais les clivages traditionnels entre pays bénéficiaires (la France en tête) et les pays libéraux comme l'Angleterre ont été respectés pour aboutir à un compromis qui, selon le monde agricole, ne tient aucunement compte du contexte actuel de crise à la fois financière et alimentaire. L'accord prévoit de poursuivre la baisse des aides directes à la production (baisse amorcée depuis 2003) pour les réorienter vers le second pilier de la PAC (aide au développement rural). Les prix et revenus agricoles se verront ainsi davantage liés au marché et moins aux subventions. La mesure qui s'attire les foudres des syndicats est l'augmentation des quotas laitiers de 1% par an jusqu'à leur disparition en 2015 (ces quotas avaient été instaurés en 1984 pour limiter la production). Une décision considérée comme une "ineptie" par la FNSEA "au moment où partout en Europe les producteurs subissent des baisses de prix importantes".
L'autre volet de la réforme est l'augmentation de la modulation des aides (c'est-à-dire la ponction des fonds du premier pilier de la PAC destinée au deuxième pilier) qui va passer de 5% à 10% au cours des cinq prochaines années pour les exploitations percevant plus de 5.000 euros d'aide. Les fonds ainsi dégagés doivent permettre de renforcer les programmes concernant le changement climatique, les énergies renouvelables, la gestion de l'eau et la biodiversité. Mais c'est moins que les 13% demandés par Bruxelles. Un choix qui s'explique par les réticences des Etats qui doivent participer au cofinancement des projets. D'ailleurs, la part du financement des Etats dans ces projets a été ramenée de 50 à 25%, les fonds européens prenant en charge le reste. Ainsi, pour quatre euros versés par Bruxelles, les Etats en verseront un. Le dispositif prévoit un effort supplémentaire pour les grandes exploitations touchant 300.000 euros d'aides pour lesquelles la modulation est fixée à 14%.
Mais l'impact de ces mesures sur l'environnement sera faible au regard des enjeux estiment les syndicats. Pour Jeunes agriculteurs, la dérégulation risque "d'encourager l'augmentation de la taille des exploitations et leur concentration dans certaines zones". Le débat se situe à présent au niveau national avec les négociations qui vont être menées entre le gouvernement et les organisations syndicales pour savoir à partir de ce cadre général sur quels curseurs agir. Principal point : la réorientation des aides des céréaliers vers les éleveurs. Les régions auront aussi leur mot à dire.

 

Michel Tendil

 

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