Archives

Agriculture - Les régions au chevet de la PAC

Les régions se retrouvent à Clermont-Ferrand, jeudi 25 septembre, pour défendre la politique agricole commune (PAC) et demander la régionalisation des aides.

L'air des alpages haut-savoyards n'a pas permis de convaincre les contempteurs de la politique agricole commune (PAC). Les ministres de l'Agriculture des Vingt-Sept étaient réunis lundi et mardi à Annecy pour préparer leur sommet de novembre où sera discuté l'avenir de la plus vieille politique européenne qui totalise encore à elle seule 40% du budget européen. Mais la France, première puissance agricole de l'Union européenne et principale bénéficiaire, a essuyé la fronde de Londres et La Haye qui ont demandé une dérégulation du marché agricole. Autrement dit : la mort annoncée de la PAC. De son côté, la commissaire européenne à l'agriculture, Mariann Fischer Boel, a prévenu : "Les aides directes aux agriculteurs seront réduites" à partir de 2013. C'est dans ce contexte houleux que les régions se retrouvent jeudi à Clermont-Ferrand autour d'une revendication forte : la régionalisation des aides, seul moyen selon elles de faire face à la réduction des crédits et de les rééquilibrer entre les différentes filières, sachant qu'aujourd'hui un quart des aides sont entre les mains de 5% des exploitations. Dans son règlement de mai 2008, la Commission a en effet donné jusqu'au 1er août 2009 aux Etats membres pour choisir entre deux options : garder les modèles des "références historiques" qui ont conduit à l'enrichissement des céréaliers ou opter pour un modèle régional. Un choix déjà fait par une minorité de pays comme l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne et qui a également la faveur de la Commission et du Parlement européen. Mais le gouvernement français s'y oppose, de même que la puissante FNSEA. "Dans un contexte mondial, nos productions doivent être nationales ou européennes mais pas régionales. On va mettre les régions en concurrence, le tout sur fond de surenchères électorales", estime Philippe Pinta, président d'Orama, une union qui fédère trois associations céréalières de la FNSEA.

 

Un "partenariat régional" pour mieux orienter les aides

Difficile de s'attendre à un revirement de la part du gouvernement d'ici 2009. L'enjeu de la rencontre de Clermont-Ferrand est de poser les termes du débat en prévision des "perspectives financières" de l'UE pour l'après-2013 où, espère l'ARF, la Commission pourrait tenter d'imposer la régionalisation. "Nous sommes tout à fait sur la même approche que la Commission européenne, déclare René Souchon, le président du conseil régional  d'Auvergne et président de la commission Agriculture de l'ARF. Si la France ne fait pas le choix de décentraliser, on va garder un système hyper-centralisé en aidant les productions céréalières, un système totalement injuste et inéquitable." Pour les régions, l'enjeu n'est pas la gestion des aides en tant que telle (comme elles l'ont maintes fois demandé pour les fonds structurels) mais leur meilleure répartition. En clair, elles demandent d'être à la tête d'un "partenariat régional" pour orienter les aides plus équitablement aux agriculteurs qui en ont le plus besoin, en particulier les éleveurs et les producteurs de fruits et légumes aujourd'hui réduits à la portion congrue. "Les régions connaissent mieux les réalités du terrain. On ne peut pas traiter indifféremment des éleveurs d'ovins en zones de plaines ou en zones de montagne, à 1200 mètres ou 300 mètres", estime René Souchon, alors que sa région perd 900 exploitations chaque année depuis 2000. Ce n'est pas l'avis de la FNSEA pour qui "c'est la logique même de la PAC qui est en cause". "Est-ce qu'on veut conserver un système de compensation économique ou bien mener un combat territorial et social ?", s'interroge Philippe Pinta. Certes, toutes les régions ne sont pas logées à la même enseigne. Le Centre, première région céréalière d'Europe avec la Beauce, voit sans doute avec nostalgie s'éloigner une manne qui a fait sa richesse. Mais la région s'est préparée dès 2005 au changement avec le schéma régional de développement économique (SRDE) et s'est ralliée à la régionalisation.

 

Préférence communautaire

Dans un avis qu'elle présentera jeudi, l'ARF accuse par ailleurs le gouvernement de ne pas avoir utilisé l'opportunité offerte par la réforme de 2003 (article 69 du règlement européen) d'orienter une partie des aides au profit des modes de culture plus respectueux de l'environnement. Pour le moment, seuls sept pays ont pris ce chemin (Grèce, Finlande, Suède, Italie, Ecosse, Espagne et Portugal). Grenelle de l'Environnement oblige, le gouvernement veut donner des signes et brandit les objectifs du plan "Horizon 2012" : tripler les surfaces consacrées à l'agriculture biologique pour atteindre 6% en 2012. Pour les encourager, le ministre de l'Agriculture, Michel Barnier, vient d'annoncer le déplafonnement des aides à la conversion de l'agriculture conventionnelle vers l'agriculture biologique. Mais l'annonce est accueillie avec scepticisme. Selon la Confédération paysanne, pour atteindre cet objectif, il serait nécessaire de réaliser 6.000 conversions par an, soit la moitié des producteurs "bio" déjà en place. "Il s'agit d'un voeu pieux, c'est un objectif impossible à atteindre en si peu de temps", tranche René Souchon.
Les régions demandent également de repenser le "deuxième pilier" de la PAC, c'est-à-dire les aides au développement rural. Des aides qui bénéficient encore trop largement aux agriculteurs comme le montraient récemment les sénateurs Jean François-Poncet et Claude Belot dans un rapport sur "le nouvel espace rural français". Les régions préconisent de transformer l'actuel PDRH (programme de développement rural hexagonal) en 21 programmes régionaux et de leur en confier la gestion, à l'instar de ce qui se fait en Corse.
Les régions veulent enfin remettre la "préférence communautaire" à l'honneur, jugeant "totalement inacceptables" les propositions de l'OMC de baisse moyenne des droits de douane européens de 54%.


 

Michel Tendil

 

Téléchargements

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis