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Culture - Bibliothèques : onze millions de Français ne disposent d'aucun lieu de lecture publique

L'Inspection générale des bibliothèques estime à 800.000 m2 les surfaces de bibliothèques à construire. Pour y parvenir, elle suggère d'utiliser de manière "proactive" la dotation générale de décentralisation notamment en ciblant les territoires déficitaires (zones rurales et périurbaines, quartiers prioritaires de la politique de la ville) et en s'inscrivant dans le nouveau programme de bibliothèques de proximité. Elle préconise également de renforcer les démarches partenariales de planification entre l'Etat et les collectivités, en s'appuyant particulièrement sur les départements et sur les régions.

Dans un rapport d'activité 2015, l'Inspection générale des bibliothèques (IGB) revient - outre les traditionnels focus sur des établissements nationaux ou territoriaux - sur son rapport, mis en ligne en février 2016, intitulé "L'équipement des communes et groupements de communes en bibliothèques : lacunes et inégalités territoriales". Elle prend soin de rappeler que cette évaluation est la première réalisée depuis trois décennies, autrement dit peu après la mise en place de la décentralisation.

Un bilan mitigé

Le tableau ainsi dressé apparaît mitigé. Côté positif, l'IGB relève que de très nombreuses bibliothèques ont vu le jour depuis quarante ans et que "le retard français en la matière s'est considérablement réduit". Mais, en dépit de ces progrès, le rapport souligne que 55% des communes - représentant plus de onze millions de personnes, soit 17% de la population française - ne disposent d'aucun lieu de lecture publique.
De même, 9.200 lieux de lecture publique - sur les 16.300 que compte la France -, desservant neuf millions de personnes, ne sont que des "points d'accès au livre". Enfin, parmi les 7.100 bibliothèques proprement dites, seule une moitié relève des catégories 1 et 2 (21% de l'ensemble des lieux contre 23% pour la catégorie 3).
En outre, l'IGB observe que "la plupart des équipements des années 1960 à 1990 ont beaucoup vieilli à tous points de vue. Leur adaptation aux besoins, à commencer par l'évolution des usages, appelle des travaux qui vont d'une rénovation légère au transfert dans un autre bâtiment en passant par l'extension et la restructuration". La conclusion de l'IGB est sans appel : "A tous les échelons - national, régional, départemental, intercommunal ou communal -, des inégalités très marquées doivent être relevées quant à l'accès au service public de la lecture".
Le rapport estime les surfaces à construire à près de 800.000 m2, à rapprocher des 2.700.000 m2 construits pour les bibliothèques municipales depuis 1986 avec l'aide de la dotation générale de décentralisation (DGD, concours particulier Bibliothèques), soit une moyenne annuelle sur 30 ans de 90.000 m2.

Mieux flécher la DGD

Face à ce constat, l'IGB rappelle qu'il revient aux communes et groupements de communes de faire les choix nécessaires. Mais, "dans le respect de leur libre administration, il est de la responsabilité de l'Etat, garant de l'égalité sur l'ensemble du territoire national, de continuer à les y aider".
Pour cela, le rapport suggère notamment de mettre en œuvre la Dotation générale de décentralisation "de manière plus proactive", autrement dit en définissant certaines priorités : territoires déficitaires (zones rurales et périurbaines, quartiers prioritaires de la politique de la ville) - avec en particulier un nouveau programme de bibliothèques de proximité à l'instar de celui des Ruches -, bibliothèques dites "stratégiques" (bibliothèques clefs pour un aménagement rationnel du territoire, bibliothèques municipales classées), ou encore accessibilité aux personnes en situation de handicap et conservation des collections patrimoniales.
Le rapport préconise donc de renforcer la place des bibliothèques dans les démarches partenariales de planification entre l'Etat et les collectivités territoriales. Il peut s'agir bien sûr des contrats de plan Etat-régions, mais aussi des schémas départementaux d'amélioration de l'accessibilité des services au public pour l'échelon des départements ou des Scot (schémas de cohérence territoriale) pour les communes et les intercommunalités. Il s'agit également de veiller à une meilleure prise en compte des publics les plus éloignés de la lecture.
En termes de collectivités - et bien que la grande majorité des bibliothèques soient communales ou intercommunales -, l'IGB préconise de s'appuyer particulièrement sur les départements, dont c'est une des compétences obligatoires, et sur les régions.