Habitat - Bailleurs et locataires : le rapport Massin-Laporte privilégie la prudence et l'équilibre
Le 28 février, Isabelle Massin et Patrick Laporte - inspecteurs généraux de l’administration du développement durable et membres du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) - ont remis à Cécile Duflot leur rapport sur "La modernisation des rapports entre les bailleurs et les locataires". Ce document très attendu, commandé à la fin du mois de novembre dernier (voir notre article ci-contre du 3 décembre 2012) et rédigé à l'issue d'une large concertation, va servir de base à l'un des volets du futur projet de loi Urbanisme et Logement, qui doit notamment réformer la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.
Dans un domaine très sensible, où les antagonismes entre bailleurs et locataires prennent vite une tournure polémique, les deux rapporteurs se veulent à la fois prudents et soucieux d'équilibre. Les 55 propositions formulées par Isabelle Massin et Patrick Laporte semblent même un peu en retrait par rapport à certaines pistes évoquées ces dernières semaines. Ainsi, le rapport donne la priorité à une mise en oeuvre effective de la lettre et de l'esprit de la loi de 1989, plutôt qu'à un bouleversement du texte. Il précise également que "les mesures nouvelles proposées en faveur des locataires ne doivent pas avoir pour effet de restreindre l'offre locative".
Exemple de cette recherche d'équilibre : le rapport se prononce en faveur d'un encadrement des loyers - "objectivés par les données fournies par les futurs observatoires des loyers" -, autrement dit en faveur d'une base légale plus solide pour l'actuel dispositif mis en place par Cécile Duflot. Mais, à l'inverse, il ne propose pas de maintenir la fixation du loyer dans le cadre de la relation contractuelle entre le bailleur et le locataire.
Dans le même esprit, le rapport écarte des solutions qui empiéteraient sur les compétences de la justice. Ainsi, les "abus de faiblesse" pratiqués par les marchands de sommeil doivent continuer de relever des tribunaux, même s'il est possible d'envisager des aides pour les propriétaires qui souhaiteraient sortir leur bien du champ de l'habitat indigne. De même, le rapport estime que le non-respect des règles du congé pour vente doit être sanctionné par la justice, mais écarte l'idée d'imposer aux particuliers la vente occupée.
Le rapport est en revanche plus innovant sur d'autres points. Sur la prévention des expulsions, par exemple, il préconise soit de reloger les personnes concernées dans le parc public sans attendre le jugement d'expulsion, soit de proposer au bailleur une intermédiation locative. De même, pour favoriser le logement des jeunes, les rapporteurs suggèrent la mise en place d'un pacte avec les bailleurs sociaux, la construction de logements adaptés et abordables, ainsi que la "régularisation" des différents types de locations meublées, en leur donnant une définition et un statut.
Enfin, d'autres mesures sont renvoyées à une concertation ultérieure. C'est notamment le cas d'un sujet délicat : celui de l'élection, du rôle et du statut des administrateurs locataires au sein d'organismes bailleurs sociaux. Une fois un accord trouvé entre les parties, celui-ci devrait être intégré au Code de la construction et de l'habitat sous la forme d'une ordonnance.