Associations et entreprises de l'ESS dans la crise : "La facture va être lourde"
L'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire salue les efforts "inédits et importants" de l'État en direction des structures de l'ESS, ainsi que ceux des régions, mais attend encore des clarifications pour faciliter l'accès aux aides. Il demande également des "instructions précises" pour sécuriser les employeurs de professionnels en première ligne, dans le contexte de pénurie de protections sanitaires. L'Udes comme le Mouvement associatif plaident pour un maintien généralisé des subventions aux associations, et pour des plans de relance qui devront être concertés.
Après cinq semaines de confinement, l'impact de la crise sanitaire sur les associations et l'économie sociale et solidaire (ESS) commence à être apprécié plus finement. Selon l'enquête menée en mars et avril 2020 par Recherches et Solidarités pour le Mouvement associatif, en lien avec le Réseau national des maisons d'associations, la perte de recettes d'activités pour les associations depuis le début de la crise est estimée à un minimum de 1,4 milliard d'euros, dont 975 millions d'euros pour les associations employeuses. 65% des associations seraient à l'arrêt, jusqu'à 76% dans le domaine du sport (voir aussi notre article du 8 avril 2020 "Covid-19 : les entreprises et associations employeuses du sport ont déjà perdu 1,8 milliard d'euros"). Si le tourisme social et familial et la culture sont aussi particulièrement atteints, de même que les coopératives du BTP, tous les secteurs et tous les types d'entreprises de l'ESS sont touchés, selon l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (Udes) qui tenait une visio-conférence de presse ce 21 avril 2020.
Versement des subventions : une "clarification institutionnelle" est attendue
"Le filet social a joué à plein son rôle pendant cette période", a salué Hugues Vidor, président de l'Udes, se félicitant des "efforts inédits et importants consentis par l'État". Il a toutefois alerté sur les difficultés d'accès aux dispositifs d'aide, à commencer par l'activité partielle, du fait d'un "manque de clarté et d'homogénéité de traitement d'une région à l'autre". De même concernant les fonds d'urgence déployés par plusieurs régions, "il n'est pas encore très simple pour les acteurs de l'aide à domicile d'y parvenir", a ajouté Hugues Vidor, également directeur général de Adessa à domicile. Concernant les prêts garantis par l'Etat, l'Udes salue la diffusion par le gouvernement d'une note clarifiant la définition du chiffre d'affaires des associations et fondations, afin que ces dernières ne se voient pas refuser de prêt bancaire alors qu'elles y auraient droit.
Par ailleurs, "les entreprises de l'ESS doivent pouvoir bénéficier du versement des dotations", a insisté le président de l'Udes, observant à ce stade une grande hétérogénéité des décisions. Le Mouvement associatif demande en la matière un "pacte de sécurisation sur les subventions", impliquant notamment des "versements accélérés des subventions (solde 2019 et avances) et [le] doublement du montant des avances prévues pour limiter les problèmes de trésorerie". L'Udes attend une "clarification institutionnelle" – une instruction globale devrait intervenir "dans les prochains jours", après l'orientation déjà donnée dans l'ordonnance du 25 mars 2020 sur les établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS). Et se tient à la disposition de l'Association des maires de France, de l'Assemblée des départements de France et de Régions de France pour en échanger.
Des inquiétudes sur "l'après-crise", sur les plans sanitaire, social, juridique et économique
L'autre grande difficulté à laquelle sont confrontés les employeurs de l'ESS est celle du manque d'équipements de protection sanitaire pour les personnels et les personnes accompagnées. Dans le contexte de pénurie global, "les employeurs sont demandeurs d’instructions précises, fiables dans le temps et claires de la part des pouvoirs publics", a écrit le président de l'Udes aux ministres des Solidarités et du Travail le 14 avril. Le courrier pointe "le risque d’une menace sur la poursuite de l’activité en raison des conséquences humaines, sociales, sociétales, assurantielles, judiciaires et financières induites" qu'aurait l'absence de directives claires. "Et sur l'après-crise, il faut absolument protéger les professionnels qui sont en première ligne", a insisté Hugues Vidor.
Au moment du redémarrage, "la facture va être lourde" pour les ESMS, a poursuivi le président de l'Udes, évoquant des dépenses nouvelles. À travers différentes enquêtes, l'Udes invite actuellement "l'ensemble des employeurs à préciser leur diagnostic et leur stratégie de reprise", pour adapter l'accompagnement aux différents secteurs. Sur la base de son enquête, le Mouvement associatif demande la mise en œuvre d'un fonds de soutien dédié aux associations, "en complémentarité des autres dispositifs, notamment régionaux, et [qui] interviendrait en soutien au fonctionnement pour des associations". Il propose par ailleurs d'autres mesures de soutien à activer dès 2020, ainsi que l'ouverture d'une discussion sur un "plan de relance post-crise". Pour le président de l'Udes, "l'ESS a toute sa place dans la sortie de crise, il est temps désormais de lui donner la place qui doit être la sienne dans l'économie du pays".
De son côté, le gouvernement a assuré, mardi, que toutes les subventions promises aux associations seraient versées. D'ici quelques jours, une circulaire "demandera à l'ensemble des ministères d'honorer les subventions quand bien même le projet n'aurait pu avoir été mené", a déclaré le secrétaire d'État Gabriel Attal, devant l'Assemblée nationale.
Un "dispositif de secours" pour les très petites entreprises de l'ESS
Christophe Itier, haut-commissaire à l'ESS et à l'innovation sociale, a lancé une aide d’urgence à destination des très petites entreprises de l'ESS (3 salariés et moins) directement menacées par les effets de la crise Covid-19. Doté initialement de 3 millions d'euros (1 million d'euros du haut-commissariat à l'ESS, 500.000 euros de BNP Paribas et 1,5 million d'euros d'accompagnement via le dispositif local d'accompagnement financé par l'État, la Banque des Territoires et les collectivités), ce dispositif permettra l'attribution d'une aide forfaitaire de l'ordre de 5.000 euros et la mise en place d'un plan de redressement avec le DLA. Les professionnels du DLA seront chargés d'identifier les petites structures en grande difficulté et le réseau France active activera le dispositif. Les grandes lignes de cette aide sont présentées dans la dernière mise à jour du document de synthèse des aides ESS élaboré par le haut-commissariat à l'ESS.