Patrimoine - Archives départementales : l'embellie numérique
Avec un taux de 70%, la numérisation dans les services d'archives départementales a fortement progressé. L'enquête statistique annuelle, publiée par les Archives de France, détaillant l'activité du secteur, peut paraître à première vue rébarbative (une longue série de tableaux de chiffres...) mais elle est révélatrice des transformations que connaît la gestion de ces services au passage de la révolution numérique. Elle met aussi en évidence de grandes disparités et parfois quelques situations paradoxales.
La généalogie, "locomotive" de la numérisation
273 millions : ce chiffre représente le nombre total des pages numérisées par les services d'archives départementales en 2011. Les registres paroissiaux et d'état civil représentent environ 65% de l'ensemble, en raison de l'engouement porté à la généalogie. Mais la numérisation se diversifie. Les appels à projets lancés dans le cadre du plan national de numérisation du ministère de la Culture établi en 2010 le confirment : les porteurs de projets de numérisation on fortement diversifié leurs projets avec le traitement de documents relatifs à l'histoire locale, au monde du travail, à la presse locale, aux inventaires de patrimoine. Quant aux images numérisées, le total atteint 5,2 millions, pour un rythme de numérisation sur l'année 2011 de près de 650.000 documents. Elles proviennent de fonds géographiques (cartes et plans), d'architectes et de photothèques généralistes (cartes postales) ou spécialisées (jardins et paysages).
Mais les disparités demeurent importantes selon l'importance donnée aux politiques publiques de gestion du patrimoine. Ainsi, l'Aveyron, avec 288.000 habitants, dispose du fonds numérique le plus important de France avec près de 17 millions de pages (principalement les registres d'état civil), suivi par la Mayenne, la Seine-Maritime (8,9 millions chacune), les Pyrénées-Atlantiques et la Somme. Ceci, alors que l'Ariège, l'Eure-et-Loir, le Gard, le Loir-et-Cher et les Pyrénées-Orientales ne possèdent pas encore de fonds numérisé. La photo connaît une trajectoire similaire, mais on trouve cette fois en tête d'affiche le département de l'Hérault (355.000 photos) suivi par la Savoie (142.000) et le Pas-de-Calais (114.000) tandis que Paris (6.000) ou la Haute-Vienne (3.500) font un peu figure de parent pauvre. Quant à l'Essonne, au Bas-Rhin et au Loiret, ils ne disposaient pas, en 2011, de fonds numérisé.
Diffusion : un site dédié aux archives dans 70 départements
La diffusion en ligne, devenue le corollaire de la numérisation, représente également un volet croissant de l'activité puisque 69% des archives départementales numérisées sont aujourd'hui en ligne avec un taux légèrement plus faible pour les images (62%). Paradoxalement, l'Aveyron, premier au classement de la numérisation, ne diffuse aucun document en ligne, du moins pour l'instant. "L'ensemble des registres d'état civil des communes du département ont été numérisés... La mise en ligne est en préparation mais elle nécessite des travaux de reprise et de corrections, actuellement en cours", est-il précisé sur le site du conseil général. De son côté, la Mayenne est plus avancée puisque le site internet des archives, lancé en 1999, compte aujourd'hui 50% de ses pages numérisées en ligne et 14% des images. A noter que le portail le plus "riche" est celui de la Somme, avec 7,2 millions de pages (un taux de mise en ligne de 99%) et 35.000 images. Un résultat obtenu malgré des crédits de fonctionnement et d'investissement dans la fourchette basse des départements français.
L'intérêt de ces données statistiques est atténué par l'absence d'une exploitation directe sur tableur. Elle permettrait d'effectuer des croisements de données plus poussés entre effectifs, budgets, actions d'animation et de diffusion. Et apporterait sans doute son lot supplémentaire de découvertes surprenantes, à l'image des résultats de la Somme qui, sous réserve d'un inventaire plus approfondi, suggère que la performance ne vient pas systématiquement des services les plus richement dotés. Mais l'esprit de palmarès ne doit pas effacer une réalité plutôt souriante : avec 70 sites dédiés, les archives départementales font aujourd'hui partie des services les plus numérisés de France.