Archives

Finances publiques - AMF : la baisse des dotations doit abonder un "fonds d'investissement" des collectivités

Lors de sa réunion du 15 mai dernier, le bureau de l'Association des maires de France (AMF) ne manquait visiblement pas de sujets appelant à des prises de position. Se devant de respecter le pluralisme politique de l'association, celles-ci sont toutes "des prises de position d'union", a relevé Jacques Pélissard ce 22 mai en réunissant la presse pour un point sur l'ensemble de ces dossiers.
Pour le premier de ces dossiers, celui des dotations de l'Etat aux collectivités, la parole était à André Laignel, premier vice-président délégué de l'AMF et président du Comité des finances locales. Sans doute la question la plus importante, du moins si l'on songe aux sommes en jeu. 1,5 milliard d'euros de baisse prévue par le gouvernement en 2014 et autant en 2015. Un groupe de travail du CFL se consacre actuellement à cet enjeu, et notamment à la question de savoir comment sera calculée la participation de chaque collectivité à cette baisse (lire notre article du 29 avril). L'AMF a évidemment un avis sur cette question : la baisse doit être répartie sur les trois niveaux de collectivités en proportion de ce que chacun perçoit actuellement ; puis la part prélevée sur les communes et les communautés doit à son tour être propositionnelle à ce qu'elles touchent au titre de la dotation globale de fonctionnement.
Mais André Laignel, qui continue de s'interroger sur le bienfondé de cette baisse, demande clairement au gouvernement de border et d'adapter cette décision annoncée en février dernier. Il s'agirait a minima d'écrire noir sur blanc que cette diminution est bien un "effort exceptionnel" demandé aux collectivités pour 2014 et 2015 et est donc "réversible". Il s'agirait aussi de mesurer l'impact réel de cette baisse sur l'économie du pays, sachant que celle-ci affectera nécessairement l'investissement public. "Il faut que le gouvernement se pose la question de l'impact économique, et non pas seulement financier", insiste André Laignel, relevant également que "dans le cas où les collectivités maintiendraient leurs investissements, elles le feraient alors en empruntant davantage, ce qui ne serait pas neutre pour les finances publiques". Et Jacques Pélissard de relever que la baisse des dotations annoncée pour 2014 viendra s'ajouter au fait qu'une année électorale est toujours une année de faible investissement.
Le bureau de l'AMF considère en outre que puisque la France vient de bénéficier de deux années supplémentaires pour ramener ses déficits publics à 3% de la richesse nationale, il serait logique que les collectivités bénéficient elles aussi d'un "étalement dans le temps". La baisse pourrait selon l'AMF être de 1 milliard en 2014 puis autant en 2015 et 2016. Enfin, et surtout, André Laignel demande au nom de l'association "une forme de préciput consacré à l'investissement". Il s'explique : il s'agirait de faire en sorte "que l'économie réalisée soit mise dans un fonds d'investissement à disposition des collectivités". Ce qui reviendrait à flécher 3 milliards d'euros de dotations uniquement vers l'investissement, le bloc local se disant en revanche prêt à faire un effort sur le fonctionnement. Quitte à ce que le gouvernement définisse un certain nombre de champs d'investissement prioritaires. On peut imaginer quelle devrait être la première réaction de Bercy à cette proposition qui consisterait pour lui à renoncer à une économie de 3 milliards sur le budget de l'Etat.

Financer… la réforme des rythmes scolaires

Un autre groupe de travail du CFL, qui s'est d'ailleurs réuni le 21 mai, se penche pour sa part sur la question des dépenses contraintes des collectivités. La direction générale des collectivités locales (DGCL) reconnaît, dans une étude remise aux membres du CFL le 30 avril (voir notre article du 3 mai, avec l'étude en téléchargement), qu'une réforme nouvelle viendra sensiblement alourdir le poids de ces dépenses contraintes à partir de 2014 : l'aménagement des rythmes scolaires, qui devrait coûter environ 600 millions d'euros par an, soit une moyenne de 100 euros par élève (sans compter les quelque 60 millions d'euros supplémentaires à la charge des départements pour les transports scolaires).
On ne s'étonnera guère, alors, que l'AMF fasse de cette réforme l'un des sujets phares du moment en matière de finances communales. L'association, qui a demandé à la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) de prévoir un chiffrage au bout d'un an d'application de la réforme, est en tout cas mobilisée au moment où se poursuit l'examen parlementaire du projet de loi de refondation de l'école. C'est en effet l'article 47 de ce projet de loi qui institue le fonds d'aide aux communes de 250 millions d'euros. Ce fonds d'aide ne sera en principe pas consommé en 2013 puisque seulement 22% des élèves seront concernés par la réforme à la rentrée prochaine (au lieu des 50% escomptés). L'AMF demande par conséquent, a expliqué ce 22 mai Jean Launay, trésorier général de l'association, que le bénéfice des crédits non consommés en 2013 reste ouvert aux communes qui appliqueront la réforme à la rentrée 2014.
Les maires sont également sur leurs gardes concernant une autre source de financement : les caisses d'allocations familiales (CAF). La prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG) de la Cnaf étant en effet encore en cours de négociation avec l'Etat, les modalités de participation de la Cnaf au financement des trois nouvelles heures de périscolaire induites par la réforme des rythmes scolaires restent floues. "Pour le moment, on n'a pas de chiffres", confirme Valérie Létard, vice-présidente de l'AMF, précisant que les communes s'interrogent aussi sur les autres actions (dispositifs financés dans le cadre des contrats enfance-jeunesse, soutien à la parentalité…) dont le financement risquerait, par ricochet, de se voir amputé.

Claire Mallet

A suivre…
Que la réforme de la décentralisation, qui aurait dû commencer par une loi-cadre, s'accompagne d'une étude d'impact financier. Que le fonds d'aide pour les rythmes scolaires reste ouvert en 2014. Que la "double liste" prévue par la loi Valls soit supprimée. Qu'il soit explicitement prévu que la célébration d'un mariage puisse être déléguée à un conseiller municipal. Que le transfert du plan local d'urbanisme à l'intercommunalité reste une option. Que la gestion de la demande de logements sociaux conforte le rôle de la commune... Autant d'autres propositions qui mobilisent actuellement l'Association des maires de France (AMF), sur lesquelles Localtis reviendra dans ses prochaines éditions.

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis