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Environnement - Agriculture biologique : quels nouveaux outils de soutien de la part des collectivités ?

Les collectivités sont-elles suffisamment volontaristes sur le dossier bio ? Pour développer ce type d'agriculture, deux priorités se dégagent : faciliter l'accès au foncier et mettre en cohérence les politiques publiques.

Un colloque s'est tenu fin juin à Strasbourg sur la transversalité de l'agriculture biologique, aussitôt suivi d'une rencontre organisée le 6 juillet à Paris par la Fédération nationale d'agriculture biologique (Fnab). Celle-ci portait sur le soutien qu'apportent les collectivités au développement de la bio. "Un secteur encore très fragile, que les collectivités peuvent aider en veillant notamment sur son volet sociétal ou en misant sur la formation", a expliqué Stéphanie Pageot, productrice de lait bio et membre de la Fnab. Fin 2010, la région Poitou-Charentes a ouvert la voie en lançant un outil : un pôle de conversion bio, initié avec les producteurs et bénéficiant d'un soutien très partagé. En tant que "guichet unique de la bio régionale", cette structure dispense une série de services et agit en amont (structuration de la filière) comme en aval (développement de la consommation locale). Le modèle a séduit : sept pôles de ce type émergent dans d'autres régions. Pour Henri Doublier, administrateur à la Fnab, "ces pôles sont des accélérateurs d'énergies mais entre les actions des collectivités, des agences de l'eau et les plans régionaux, qui eux aussi sont utiles s'ils intègrent bien ces pôles, il faut veiller à ce que la dynamique d'ensemble soit cohérente".
En Poitou-Charentes, le pôle de conversion associe aussi des acteurs économiques. Collectivités, coopératives, chambres d'agriculture et organismes bancaires, une quarantaine de membres adhèrent à sa logique. "Il s'agit de lever des freins, de développer en masse l'agriculture bio pour qu'elle sorte enfin de son statut de niche", précise Benoît Biteau, vice-président de la région Poitou-Charentes. En Rhône-Alpes, l'accent est mis sur la structuration de la filière. "Mais aussi sur l'aménagement, le développement des surfaces et la protection de l'environnement, c'est dans cette perspective que l'agriculture bio peut se développer", ajoute Olivier Keller, à la tête de la commission agriculture de cette région. C'est souvent sur la question d'accès et de coût du foncier que le bât blesse. Dans ce domaine, pour être efficace, mieux vaut que l'intervention des collectivités repose sur des partenariats solides, noués par exemple avec les agences de l'eau ou les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer). Malgré cela, il peut persister sur le terrain des blocages. A l'Agence de l'eau Seine Normandie, un projet pilote de reconversion d'hectares au bio bute ainsi sur le manque d'appui de la chambre d'agriculture locale. Et en Picardie, des désaccords en termes d'objectifs de développement opposent Safer et collectivités, mais aussi les collectivités entre elles (le conseil général mise sur le maraîchage, la région veut élargir). "La difficulté consiste à construire une stratégie territoriale cohérente et qui repose sur une politique de proximité avec les agriculteurs", observe Jean-Louis Cazabon, vice-président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (Apca) en charge de l'agriculture biologique et président de la chambre régionale d'agriculture de Midi-Pyrénées. Une élue d'Auvergne a ajouté que les collectivités n'ont pas vocation à acquérir des terres et ne peuvent pas tout faire, "d'autant qu'elles se heurtent encore souvent sur le terrain aux réticences de la profession".
Autre axe d'action : la formation et la recherche. "Notamment via les lycées professionnels, en misant sur l'agronomie", défend Benoît Biteau. Une région comme l'Ile-de-France met l'accent sur ce point. "Mais en termes de surfaces, elle reste très en retard, avec seulement 1,2% d'entre elles dédiées au bio, alors que l'objectif du Grenelle de l'environnement est de 6%", pointe-t-on à la fédération France Nature Environnement (FNE). Partout, le besoin de moyens se fait aussi sentir. En Aquitaine, l'enveloppe régionale d'aide à l'agriculture biologique est passée de 700.000 euros il y a quatre ans à 2,6 millions d'euros actuellement. La région a fait auditer sa filière et multiplie les appels à projets pour la renforcer. "On rapproche l'offre de la demande, en faisant par exemple se rencontrer des éleveurs qui souhaitent se reconvertir et des transformateurs qui cherchent à collecter du lait bio", raconte Béatrice Gendreau, vice-présidente du conseil régional d'Aquitaine. Enfin, les collectivités peuvent promouvoir et sécuriser les débouchés, en agissant sur leurs politiques achats (c'est le cas à Brest), en lançant des campagnes d'information, etc. "Dans presque toutes les régions, des collectivités introduisent des produits bio et locaux dans leurs circuits de restauration collective", motive Stéphanie Pageot à la Fnab, qui s'apprête à lancer un site internet recensant les bonnes pratiques dans ce domaine. Reste à mieux évaluer, sur un plan non plus seulement financier (coût du repas) mais aussi sanitaire, social, environnemental, l'impact sur un territoire d'un tel changement de pratique.
 

Morgan Boëdec / Victoires-Editions 

Agriculture bio : le crédit d'impôt relevé

Le 8 juillet, Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'Ecologie, a annoncé lors d'un déplacement dans l'Essonne avec le ministre de l'agriculture, Bruno Le Maire, que le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique sera rehaussé à 2.500 euros, contre 2.000 auparavant. Ce crédit est accordé aux exploitants agricoles, dont au moins 40% des recettes proviennent d'activités agricoles relevant d'un mode de production biologique. La ministre a eu beau indiquer que "les petites exploitations vont y gagner", la profession a été déçue par cette annonce, quelque peu mineure au vu des enjeux complexes auxquels font face la filière et les collectivités qui les soutiennent. Pour mémoire, la surface consacrée en France à l'agriculture biologique représente aujourd'hui 3% de la surface agricole utile (SAU) et 4% du nombre d'exploitations, soit la moitié de l'objectif fixé par le Grenelle de l'environnement, de 6% d'ici 2012. Bruno Le Maire a annoncé pour sa part le 8 juillet la prochaine promulgation du décret lançant l'appel d'offres pour les marchés publics de fruits et légumes bio pour la restauration collective qui tiendra "compte de la proximité". M.B.