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Hébergement - Accueil des réfugiés dans les villes volontaires : l'Etat organise la solidarité

Bernard Cazeneuve recevra samedi les maires volontaires pour accueillir des réfugiés dans leur ville. L'Etat promet qu'il assurera l'organisation et le financement. Les associations d'élus anticipent les conséquences de ce grand mouvement de solidarité nationale. Les négociations ne font que commencer.

"Je suis certain que cette réunion de samedi permettra de constater à nouveau, qu'au-delà des sensibilités politiques de chacun et des clivages partisans, la solidarité n'est pas un vain mot dans la République. La solidarité n'est rien sans l'efficacité et pour être à la hauteur de la générosité dont le pays témoigne, l'Etat se mobilise avec rapidité et détermination", a déclaré Bernard Cazeneuve mardi 8 septembre en fin d'après-midi.
Samedi 12 septembre, c'est le jour où le ministre de l'Intérieur recevra les maires des communes qui se sont portées volontaires pour l'accueil de réfugiés. Il a cité et salué les élus des villes de Paris, Bordeaux, Pau, Poitiers, Besançon, Villeurbanne, Evry, Avignon, Cherbourg, Rouen, Lille, Strasbourg, Metz "et tant d'autres" (qui seraient de l'ordre de "plusieurs dizaines"). D'autres communes, de taille plus modeste, seront aussi certainement de la partie, l'Association des petites villes de France ayant appelé ses adhérents à s'inscrire.

"Nous accompagnerons l'Etat dans cette mission", promet l'AMF

La réunion a pour objectif "d'exposer (aux maires) les modalités de l'accompagnement de l'Etat pour un accueil réussi". Le ministre les recevra avec le préfet Kléber Arhoul, coordinateur national chargé de ces questions et "interlocuteur de référence des élus et des préfets sur la question de l'accueil des réfugiés". Deux rendez-vous préparatoires étaient prévus avec des associations d'élus : ce mardi après-midi avec l'Association des maires de France et mercredi matin avec l'Assemblée des départements de France.
A l'issue de cette rencontre préparatoire, François Baroin, président de l'AMF et maire (LR) de Troyes, a d'ores et déjà assuré : "Il y a l'expression d'un volontariat d'un certain nombre de communes qui se disent disponibles (...). Nous accompagnerons l'Etat dans cette mission." A une condition : "Nous avons soulevé la question de la volonté d'accueillir les réfugiés, les naufragés, ce qui est l'honneur de notre pays, pays de la déclaration des droits de l'homme, mais uniquement et exclusivement, dans cette urgence, les réfugiés et les naufragés." Et "c'est à l'Etat d'assurer l'accueil, la mise à disposition des moyens, de négocier avec l'Europe les moyens financiers, de proposer une méthode, des calendriers, des partenaires, une organisation générale."

Les départements de gauche devancent les attentes du gouvernement

Du côté des départements, "les président-e-s de conseils départementaux socialistes, radicaux et communistes prennent également pleinement leurs responsabilités en s'inscrivant dans cette dynamique nationale de solidarité", assure le groupe de gauche de l'ADF, "en mobilisant les services départementaux, en appelant les maires et les familles de leur territoire à offrir aux demandeurs d'asile une solution d'accueil, en soutenant financièrement et en accompagnant les communes, les bailleurs et les associations qui se mobilisent".
Le département du Val-de-Marne, présidé par Christian Favier (PC), ne parle pas financements. Mais il a d'ores et déjà fait savoir : "Nous travaillons à mobiliser les moyens de la collectivité, moyens matériels et humains, aux côtés de l'Etat, des villes qui s'engagent, des associations, des citoyens." Une élue, Fatiha Aggoune, vice-présidente du conseil départemental, est chargée de "coordonner nos actions avec les initiatives que prend d'ores et déjà l'Etat pour l'accueil des réfugiés".

L'Etat est "l'opérateur de l'asile"

Pour l'heure, tout le monde est donc d'accord sur le principe que l'Etat est "l'opérateur de l'asile", selon l'expression de Bernard Cazeneuve. "L'Etat continuera d'assumer pleinement, comme il les assume aujourd'hui, toutes ses responsabilités", assure-t-il de son côté. Selon lui, "ces bonnes volontés doivent être accompagnées par l'Etat, ses moyens dédiés, l'expertise des préfectures, de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, de l'Office français pour l'immigration et l'intégration, et les dispositifs spécifiques concernant le logement qui existent déjà".
Il ajoute : "Il s'agira très précisément pour l'Etat, avec un haut niveau d'exigence opérationnelle, de mettre à disposition des collectivités l'ensemble des outils et des financements nécessaires, de telle sorte à réunir dans des conditions dignes l'accueil des réfugiés persécutés."

Ne pas remettre en cause l'hébergement d'urgence des sans-abri

Si tout cela est possible, c'est parce que "la France est prête". "Et si elle est prête, c'est parce que nous avons notamment réformé l'asile", rappelle le ministre de l'Intérieur (voir notre article du 17 juillet 2015). Certes, mais des voix commencent à s'élever craignant que les efforts engagés en juin (création de places supplémentaires en Cada/centres d'accueil des demandeurs d'asile, réduction des délais de traitement des dossiers, création de 11.000 places d'hébergement supplémentaires) pourraient "rapidement se révéler insuffisants face à l'ampleur de cette crise humanitaire", comme le soulignent les petites villes qui "souhaitent que ces moyens puissent être pérennisés le temps nécessaire à la résolution de cette crise et sans remettre en cause les outils consacrés à la prise en charge des plus précaires, notamment pour ce qui concerne l'hébergement d'urgence des personnes sans-abri".

La Fnars invite les collectivités volontaires à contacter les associations de son réseau

Même discours à la Fnars (Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale) qui regroupe près de 900 associations dont la plupart des Cada en France, et qui rappelle qu'"actuellement, seul un tiers des demandeurs d'asile a accès à une place en Cada, comme le prévoit pourtant la loi". "Face à l'urgence de la situation, la Fnars réitère sa demande de création d'au moins 20.000 places supplémentaires en Cada, d'un renforcement des plateformes de premier accueil des demandeurs et de nouvelles capacités d'accompagnement pour répondre à la crise de manière concrète et durable", déclare-t-elle dans un communiqué.
Par ailleurs, la fédération "soutient et encourage (...) les initiatives locales, venant des maires et des collectivités locales visant à ouvrir des centres d'accueil". Et ajoute : "Nous les invitons à se mettre en contact avec les associations qui accueillent et accompagnent au quotidien sur les territoires les personnes migrantes souvent en grande difficulté sociale."

Quelques semaines pour se préparer à accueillir le premier millier de réfugiés

Lors de sa déclaration, Bernard Cazeneuve a également apporté des précisions sur le millier de réfugiés que le président de la République s'est engagé à accueillir "dans les meilleurs délais, pour soulager les efforts actuellement accomplis par l'Allemagne". Des équipes de  l'Ofpra et de l'Ofii se sont rendues lundi à Munich "pour identifier, en lien avec les autorités allemandes, jusqu'à un millier de personnes en besoin manifeste de protection". "Uniquement des ressortissants syriens, irakiens et érythréens, c'est-à-dire des personnes en urgent besoin de protection", a-t-il précisé.
Ces personnes seront orientées "dans les prochains jours" depuis l'Allemagne vers une dizaine de centres d'accueil provisoires situés en Ile-de-France "ou à proximité". Ils resteront dans ces centres quelques semaines, le temps que leurs demandes d'asile soient instruites par l'Ofpra. "Dès que le statut de réfugié leur aura été reconnu (...) des offres de relogement sur le territoire national, en lien avec les communes volontaires, pourront être effectuées", a-t-il poursuivi avant d'annoncer que "les préfets prendront contact avec les collectivités concernées dans les prochaines heures, dès que la liste des sites aura été finalisée".

Valérie Liquet avec AFP

L'Afpa propose d'héberger 2.000 réfugiés

L'Afpa, premier organisme de formation professionnelle en France, a proposé mardi d'accueillir "plus de 2.000 réfugiés dans ses hébergements dès les prochains jours".
L'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, qui dispose de 15.000 places dans ses centres d'hébergement pour loger ses stagiaires, dit y avoir "recensé les places libres" et se déclare "prête à accueillir 2.000 personnes" réfugiées, précise-t-elle dans un communiqué. Cet accueil, souligne l'organisme, se fera "sous la responsabilité des associations chargées de prendre en charge ces réfugiés". L'Afpa dispose au total de 200 sites à travers le pays.
"Dans la crise humanitaire sans précédent provoquée par cet afflux de réfugiés dans toute l'Europe depuis des mois, l'Afpa assume son rôle d'utilité sociale dans le service public de l'emploi en offrant un hébergement sécurisé et immédiatement disponible à ces personnes en détresse", explique l'organisme qui forme chaque année 140.000 salariés et chômeurs.
Une fois la situation de ces réfugiés "stabilisée", l'Afpa "proposera à l'Etat une offre de services adaptée aux compétences et aux besoins professionnels de ces personnes".