Accord députés-sénateurs sur le projet de loi énergie et climat
Lors de la commission mixte paritaire (CMP) réunie jeudi 25 juillet au matin, députés et sénateurs sont parvenus à un accord sur le projet de loi énergie-climat. Mais le Collectif sénatorial Urgence climatique, sous la houlette de Ronan Dantec, a jugé le compromis "décevant".
Réunis en commission mixte paritaire (CMP) en pleine canicule, députés et sénateurs sont parvenus jeudi 25 juillet au matin à un accord sur le projet de loi énergie et climat. Le projet de loi actualise les objectifs de la politique énergétique de la France, notamment en prévoyant d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050, une baisse de 40% de la consommation d'énergies fossiles d'ici à 2030, contre 30% précédemment, et la fermeture des dernières centrales à charbon en 2022. Il décale de 2025 à 2035 la réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production électrique. Il pérennise aussi le Haut conseil pour le climat et prévoit un dispositif progressif de rénovation énergétique des "passoires thermiques", sujet qui a enflammé les débats dans les deux chambres.
Dans un communiqué, Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique, a salué cet accord, en rendant hommage à "l'état d'esprit constructif des rapporteurs et des deux chambres" et à l'"engagement" de son prédécesseur, François de Rugy, "dans l'élaboration et la discussion de ce texte. "Avec le projet de loi Energie-climat, nous nous donnons à la fois un cap clair vers la neutralité carbone et les moyens pour l'atteindre, a-t-elle déclaré. Cet accord obtenu aujourd'hui est une excellente nouvelle pour le climat et les Français, afin que les avancées de ce projet de loi entrent en vigueur dans les meilleurs délais."
"Symbole fort"
Le rapporteur à l'Assemblée Anthony Cellier (LREM) s'est félicité auprès de l'AFP de cet accord, soulignant le "symbole fort" que cela survienne "au moment où la planète nous envoie un deuxième message" avec le retour de la canicule. Il vante un texte "au bénéfice du climat, du système énergétique et de la facture des Français". La commission des Affaires économiques du Sénat a également salué ce compromis. Réaffirmant son attachement à l’objectif de neutralité carbone de la France en 2050, elle se félicite d'avoir "renforcé les objectifs de la loi en faveur des énergies renouvelables et notamment en matière d'éoliennes en mer, d'hydroélectricité, d'hydrogène et de biomasse" et qu'"une loi fixe désormais tous les 5 ans les priorités de la France en matière de transition énergétique". Elle souligne aussi que le Sénat a souhaité "accompagner les collectivités territoriales dans la transition énergétique et renforcer leurs capacités d’investissement et de valorisation dans la production d’énergies renouvelables issues de leurs territoires".
Sur le sujet des logements énergivores, qui concernent quelque sept millions de ménages, le texte de compromis est revenu à la version de l'Assemblée, selon Anthony Cellier. Le rapporteur s'est également félicité, comme la commission sénatoriale, que l'accord prévoie pour les parlementaires un "rendez-vous quinquennal sur la politique énergétique", jugeant "très important que le Parlement soit remis au centre".
Déception du Collectif sénatorial d'urgence climatique
En revanche, le compromis a été jugé "décevant" par le Collectif sénatorial Urgence climatique, dont quatre membres ont participé à la CMP ¬ - Jean-Pierre Moga, sénateur du Lot-et-Garonne, Angèle Préville, sénatrice du Lot, Jean-François Longeot, sénateur du Doubs et Ronan Dantec, sénateur de Loire-Atlantique. "La disparition, à la demande de l’Assemblée nationale, d’amendements emblématiques comme la nécessité de discussion approfondie, tous les cinq ans, dans la loi précédant la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), de la Stratégie nationale bas-carbone par grands secteurs (et non leur fixation par décret) ou la capacité des parlementaires de saisir le Haut conseil pour le climat, donne le sentiment étrange que la question climatique ne sera pas au coeur des travaux parlementaires dans les prochaines années", déplore-t-il. Il regrette aussi que l’amendement qu'il avait porté sur le classement en logements indécents des logements les plus énergivores n’ait pas été retenu. "Cet amendement d’appel, dont nous connaissions les difficultés d’application, avait comme objectif de souligner l’absence d'opérationnalité des politiques de rénovation thermique, en l’absence de contrainte et financement précis." Il cite néanmoins l'adoption de plusieurs mesures qu'il a soutenues comme la possibilité pour les organismes HLM d’organiser des projets d’autoconsommation ou l'intégration, dans le rapport relatif à la contribution des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) et des schémas régionaux de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) aux politiques de transition écologique et énergétique, de l’évaluation du soutien apporté par l’État à leur mise en œuvre. "Au-delà de cette déception globale, y compris les reculs de la CMP sur les objectifs de développement des énergies renouvelables, nous savons tous que c’est bien en loi de finances que se dessine la réelle ambition de la politique énergétique et climatique. Notre collectif sera donc particulièrement vigilant sur les propositions que l’État portera lors du prochain PLF", prévient-il.
Les conclusions de la CMP doivent encore être approuvées par les deux assemblées pour que le texte soit définitivement adopté, ce qui n'interviendra qu'après l'été. Dans sa version de compromis, le texte devrait notamment revenir dans l'hémicycle à l'Assemblée à partir du 16 septembre.