Congrès des maires - Accès aux soins : hôpitaux, le maillon faible ?

"Quel maillage hospitalier pour répondre aux besoins urgents d'accès aux soins ?" Au moment même où le Premier ministre présentait le plan "Investir pour l'hôpital", ce 20 novembre, les élus locaux ont échangé autour de cette question dans le cadre du Congrès des maires. Difficultés, inquiétudes et attentes ne manquent pas. Leurs marges de manoeuvre sont étroites.

Difficile d'imaginer aujourd'hui un Congrès des maires sans un débat autour de l'accès aux soins. À l'occasion de la 102e édition de cette manifestation, l'Association des maires de France (AMF) n'a pas failli à la règle en organisant, le 20 novembre, un forum intitulé "Quel maillage hospitalier pour répondre aux besoins urgents d'accès aux soins ?". Un thème d'actualité particulièrement judicieux, au point que le forum a été rattrapé, pour ne pas dire bousculé, par la conférence de presse du Premier ministre sur la présentation du plan "Investir pour l'hôpital" (lire notre article de ce jour). Un télescopage expliquant l'absence d'Agnès Buzyn, de Frédéric Valletoux, le président de la Fédération hospitalière de France (et maire de Fontainebleau), et de la directrice générale de l'offre de soins, représentée par son adjointe.

Une exclusion qui ne passe pas

Cette situation n'a pas empêché les élus présents à la tribune et dans la salle de faire passer un certain nombre de messages. Plus que des propositions, les intervenants, représentant principalement des villes petites ou moyennes (Vierzon, Saint-Claude, Laon, Cherbourg, Douai, La Ville-aux-Clercs, Saint-Jory-de-Chalais…), comme les élus dans la salle, ont fait état d'un certain nombre d'inquiétudes et d'attentes fortes, doublé d'un sentiment d'impuissance. Comme l'a expliqué Isabelle Maincion, rapporteure de la commission santé de l'AMF, "les maires alertent depuis longtemps" sur les difficultés qui ont mené à la crise actuelle. "Les maires n'ont pas de compétences en matière de santé, mais ils essaient de pallier les carences en aidant les professionnels de santé à s'organiser."

Un investissement qui les rend d'autant plus amers sur le sort qui leur est fait dans les hôpitaux depuis la loi HPST (hôpital, patients, santé et territoires) du 21 juillet 2009, qui les a exclus des conseils d'administration pour les reléguer à la présidence d'un conseil de surveillance dépourvu de tout pouvoir réel. Outre un vif ressentiment chez les élus concernés face à cette "mise à l'écart", cette situation aboutit parfois à des relations tendues avec les directeurs, quant à eux au contraire confortés par la loi HPST. Éric Delahaye, maire de Laon depuis 2017, a ainsi raconté son étonnement de devoir monter une réunion à l'hôtel de ville avec les chefs de services de l'hôpital pour évoquer la stratégie de l'établissement, le directeur refusant que la question soit discutée en conseil de surveillance. D'autres témoignages font état de conseils de surveillance annulés faute de sujets à inscrire à l'ordre du jour ou du refus de certains maires de présider le conseil devant l'absence de toute marge de manœuvre.

ARS : du mieux, sauf fermetures de services

Le ressentiment sur cette mise à l'écart des élus est tel qu'ils en tiennent presque des propos aimables sur les agences régionales de santé (ARS), avec lesquelles les relations ont pourtant pu être difficiles autour des fermetures de services. Le maire d'Avranches a notamment invité les communes concernées à se saisir des opportunités offertes par le comité territorial des élus locaux (CTEL), instance de concertation avec les ARS.

Sans surprise, les fermetures de services restent néanmoins un point dur, qui mobilise très fortement les élus locaux, avec des résultats aléatoires selon le contexte. Jean-Louis Millet, le maire de Saint-Claude (Jura), a ainsi apporté un témoignage très éclairant sur le sort de son hôpital, pourtant situé dans un territoire fortement impacté par les aléas climatiques.

Prudence sur les hôpitaux de proximité

Les élus abordent donc avec une prudence certaine la perspective des hôpitaux de proximité, instaurés dès 2016, mais relancés par la loi Santé du 24 juillet dernier (voir notre article ci-dessous du 29 juillet 2019). La prudence porte sur le nombre d'hôpitaux de proximité (600, 500, 200 ?), mais aussi sur la perspective de les voir réduits au seul service de médecine, donc sans chirurgie, ni obstétrique. La directrice adjointe de l'offre de soins s'est toutefois voulue rassurante, en listant une série d'activités qui devraient leur être ouvertes. La méfiance est également présente vis-à-vis des groupements hospitaliers de territoires (GHT), et tout particulièrement des grands GHT, rassemblant jusqu'à dix ou douze établissements et dans lesquels les petites hôpitaux se sentent progressivement privés de toute marge de manœuvre sous l'effet de la mutualisation d'un certain nombre de fonctions support. La situation est évidemment différente pour les élus des hôpitaux référents, qui assurent la coordination du GHT.

Enfin, le forum a mis en évidence une préoccupation partagée par pratiquement tous les élus : les difficultés croissantes de recrutement de médecins et personnels hospitaliers, doublées des difficultés – plus anciennes – sur l'installation des médecins libéraux. Les témoignages ont abondé sur ce point. À défaut d'une "convergence des luttes" avec les personnels hospitaliers, les maires et les élus locaux considèrent qu'une réponse durable passe nécessairement par un effort sur l'attractivité des hôpitaux. Une attractivité qui passe elle-même par une revalorisation des rémunérations, même si des actions locales sont toujours possibles, comme le dispositif "Les paradis de Cherbourg" déployé par la ville auprès de internes.

 

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