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Sécheresse - 54 départements soumis à des restrictions d'usages de l'eau

La sécheresse constatée depuis le mois d'avril continue à s'aggraver et à s'étendre sur une grande partie du territoire. Selon le bilan actualisé le 27 mai par le ministère de l'Ecologie, 54 départements métropolitains sur 96 sont désormais concernés par des mesures restreignant certains usages de l'eau.  Il y a une semaine, le ministère faisait état de 42 départements concernés par au moins un arrêté préfectoral de restriction. Vingt et un départements sont aujourd'hui classés en niveau 3, c'est-à-dire concernés par les mesures les plus fortes et quatre départements (Ille-et-Vilaine, Loire, Paris et Yvelines) sont par ailleurs placés en situation de vigilance. Les restrictions d'eau limitent les usages jugés non prioritaires pour les particuliers (arrosage, lavage de voitures, remplissage des piscines) et peuvent aussi encadrer l'irrigation agricole. Seuls l'extrémité de la Bretagne, la frange Est du pays, le Massif central et les rivages méditerranéens échappent pour le moment à ces mesures. Une nouvelle réunion du "comité sécheresse", rassemblant usagers de l'eau (agriculteurs, industriels), élus et experts (Météo France, Bureau de recherches géologiques et minières) doit se réunir au plus tard à la mi-juin. 

Aides aux éleveurs : l'Eure et le Maine-et-Loire prennent des initiatives

La FNSEA, premier syndicat agricole français, a d'ores et déjà demandé à l'Etat d'apporter son aide aux éleveurs, premières victimes de cette sécheresse exceptionnelle à cette époque de l'année, tout en écartant un nouvel impôt sécheresse comme celui décidé lors de la canicule de l'été 1976. Dans certains départements particulièrement touchés, des mesures spécifiques sont déjà prises par les autorités locales. Le département de l'Eure, par exemple, a élaboré une convention avec les organisations agricoles pour autoriser les éleveurs à faucher, à la place des services du département, les accotements plats et larges de plus de 1,50 mètre et à récupérer l'herbe pour nourrir leurs animaux. La mesure ne s'appliquera pas aux carrefours ni sur les portions de routes trop sinueuses, pour des raisons de sécurité. Dans le Maine-et-Loire, la préfecture a autorisé le fauchage anticipé de zones classées Natura 2000 et abritant des oiseaux nicheurs. Dans les territoires protégés Loire-Amont et Loire-Aval, où niche notamment le râle des genêts, un oiseau en voie de disparition, le fauchage pourra être avancé de 15 jours mais restera soumis à déclaration et à un cahier des charges rigoureux.

L'approvisionnement en électricité sous surveillance

Le gouvernement vient pour sa part d'annoncer la création d'une "cellule de veille" sur l'approvisionnement en électricité, alors que la sécheresse a d'ores et déjà fait chuter la production des barrages hydrauliques et qu'elle menace celle des centrales nucléaires. "Cette cellule rassemble les administrations compétentes en matière d'énergie ainsi que RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité", a indiqué le ministère de l'Energie dans un communiqué. "Elle rendra compte au gouvernement de l'évolution" de l'équilibre offre-demande d'électricité et "proposera les mesures nécessaires pour assurer la sécurité d'approvisionnement", a-t-il ajouté.
Le ministre Eric Besson réunira "dans les prochains jours, l'ensemble des acteurs concernés pour faire un point complet de la situation". Le ministère a noté en effet que "la sécheresse en cours conduit à des débits inférieurs à la normale dans de nombreux cours d'eau, ce qui entraîne une diminution de la production hydroélectrique, et touche également les moyens nucléaires et thermiques qui sont refroidis par ces cours d'eau".
La production des centrales hydrauliques a chuté de 29% en avril sur un an, tombant à son plus bas niveau depuis 1976 pour cette période de l'année, selon le dernier bilan mensuel de RTE. En cumul depuis le 1er janvier, la production hydraulique, deuxième source d'électricité après le nucléaire avec environ 12% de l'électricité française, est en baisse de 22,9% par rapport à 2010. Le problème est d'autant plus crucial que la consommation d'électricité a tendance à augmenter en été en raison du développement des systèmes de climatisation. Des pics de consommation sont alors observés vers 13h00 quand la chaleur est à son maximum.
RTE, qui est responsable de l'équilibre offre-demande d'électricité, sera particulièrement attentif au débit mais aussi à la température des cours d'eau. Pour leurs besoins en refroidissement, les centrales nucléaires pompent en effet de grandes quantités d'eau qu'elles rejettent plus chaude dans le cours des rivières.
En cas de températures trop élevées, les réacteurs peuvent donc se voir obliger, par la réglementation, de ralentir ou d'arrêter leur production afin de préserver la faune aquatique.
"Des dispositions dérogatoires peuvent éventuellement être prises, lorsque cela est justifié, pour équilibrer l'offre et la demande d'électricité", a précisé toutefois le ministère. En outre, en cas de pénurie, l'Hexagone peut importer de l'électricité produite dans les pays limitrophes de la France. Dans cette optique, l'arrêt des sept plus vieux réacteurs d'Allemagne à la suite de la catastrophe de Fukushima n'est pas une bonne nouvelle, l'Allemagne étant en temps normal le premier fournisseur d'électricité de la France.
EDF se dit pour sa part "vigilant" et affirme se préparer à l'arrivée de l'été. "La sécheresse que nous connaissons actuellement en France n'a aucune conséquence sur la sûreté des installations, ni sur la fourniture d'électricité de nos clients", a affirmé une porte-parole à l'AFP. Le groupe assure avoir "tiré les enseignements des canicules de 2003 et de 2006" dans le cadre d'un plan "aléas climatiques". EDF a ainsi limité au maximum le nombre d'arrêts pour maintenance dans ses 14 réacteurs (sur 58) situés en bord de mer, afin de préserver la capacité de production de ces centrales qui ne sont pas affectées par la sécheresse.