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Energie - 1er juillet 2007 : tous les nouveaux sites achètent leur gaz au prix du marché

Libéralisation du marché de l'énergie oblige, la France a dû avancer sur le dossier sous le regard averti de Bruxelles. Etat des lieux avec la DGCCRF.

Certains acheteurs publics se demandent ce qu'il va vraiment se passer le 1er juillet 2007 ! Il faut dire que, depuis le premier paquet de directives européennes en 1996 jusqu'à aujourd'hui, les rebondissements n'ont pas manqué : législation et réglementation française pléthorique, deuxième paquet de directives, décision du Conseil constitutionnel du 30 novembre 2006, lois de 2006 et 2007... un aller-retour incessant entre les fervents défenseurs des tarifs réglementés qui tentent de gagner du temps et les gardiens exclusifs de la libre concurrence. Actuellement, deux systèmes de prix coexistent : les tarifs réglementés, revus tous les ans par le ministre en charge du dossier et réservés aux opérateurs historiques, et les prix du marché qui fluctuent en fonction du prix du pétrole.
Lors d'un séminaire Apasp consacré à l'achat d'énergie le 10 mai, Sébastien Basset, responsable gaz et électricité à la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), a déclaré : "A la date d'aujourd'hui, le mieux est de s'appuyer sur les dernières dispositions : la décision du Conseil constitutionnel, la loi du 7 décembre 2006 et la loi du 5 mars 2007... en attendant la suite des événements."

 

Retour possible jusqu'au 1er juillet

La loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie établit une règle simple : à compter du 1er juillet 2007, tous les consommateurs (publics ou privés) auront la faculté d'acheter leur énergie au prix libre du marché. "Cela veut dire, a rappelé Sébastien Basset, que les acheteurs publics peuvent donc continuer à acheter, après le 1er juillet,  leur énergie à des tarifs réglementés." Si par principe, le choix pour les prix du marché est irréversible, la loi de 2006 a prévu un tarif de retour : tous les professionnels qui ont fait jouer leur éligibilité peuvent, d'ici le 1er juillet prochain, demander le retour au tarif réglementé. Le tarif de retour est alors valable deux ans non renouvelables.
Donc rien ne change ? Le Conseil constitutionnel a supprimé une faculté ouverte à la fourniture duale par un opérateur historique : Gaz de France ne pourra pas proposer un tarif réglementé en électricité comme en gaz. Si l'acheteur public veut garder en électricité comme en gaz le tarif réglementé, il devra donc faire appel à chaque opérateur dont c'est la production principale. Qu'en est-il des nouveaux sites ? La loi du 5 mars 2007 relative au droit au logement opposable permet aux nouveaux raccordés en électricité de bénéficier du tarif réglementé jusqu'en 2010 car l'électricité est considérée comme un service essentiel. Mais il n'en est pas de même pour le gaz : tout nouveau site devra se lancer sur le marché concurrentiel au 1er juillet 2007. Retardée, l'ouverture à la concurrence semble, à terme, inexorable.


Pourquoi se lancer ?

A la question "faut-il se lancer dès aujourd'hui et faire appel aux prix du marché ?", le spécialiste de la DGCCRF est bien en mal de répondre : "On constate que les prix du marché connaissent une augmentation deux fois moins importante qu'en 2006, mais il est vrai, même si l'électricité d'EDF est essentiellement nucléaire, que les prix de l'électricité, comme ceux du gaz, sont indexés sur le gaz (car le gaz est nécessaire pour les autres modes de fabrications de l'électricité) et donc sur le cours du pétrole." Les acheteurs devront-ils donc jongler avec les fluctuations quotidiennes des marchés de l'énergie ? Il leur sera toujours possible d'atténuer le risque financier en demandant à leur fournisseur un prix fixe ou un prix mixte (une partie fixe et une partie indexée sur le marché). Pour la sécurité d'approvisionnement, à l'inverse, Sébastien Basset assure qu'il n'y a aucun problème car des dispositifs prévoient de faire appel, en cas de défaillance, à un fournisseur de deuxième recours. Quelle sont les capacités de négociation des acheteurs ? Pour le responsable gaz et électricité à la DGCCRF, elles devraient dépendre du niveau de leur consommation : "Au-dessous de 36 kwh, toute discussion semble difficile."
Enfin, la première des interrogations demeure : que va faire la Commission européenne ? Les articles 3 des deux directives de 2003 donne de l'espoir en reconnaissant un service public du gaz et un service public de l'électricité, mais ces dispositions seront-elles suffisantes pour permettre à l'Etat français de préserver les tarifs réglementés ? Comment Bruxelles va-t-elle apprécier la distinction faite pour les nouveaux sites entre l'achat de gaz et l'achat d'électricité ? Quelles seront les nouveautés du troisième paquet de directives en cours d'élaboration ? Autant de questions qui incitent certains acheteurs à conclure en souriant... qu'il est urgent d'attendre !

 

Clémence Villedieu