Younous Omarjee, le discret porte-voix des ultramarins et des territoires oubliés

Très souvent dans l'ombre imposante de Jean-Luc Mélenchon, avec sa silhouette menue, Younous Omarjee n'a jamais attiré la lumière à lui. Mais discrètement, l'élu de la France insoumise a su s'imposer au sein du Parlement européen où il siège depuis 12 ans jusqu'à se faire élire vice-président, le 16 juillet, au second tour de scrutin, avec 311 voix sur 609 exprimées. Il fait partie des 14 vice-présidents du Parlement amenés à travailler aux côtés de la présidente Roberta Metsola reconduite au perchoir le même jour (avec une large majorité de 562 voix sur 699). C'est elle qui précisera le portefeuille de chacun d'eux. 

Younous Omarjee est le seul représentant français de ce bureau qui comporte notamment deux Italiens, deux Espagnols, deux Roumains et deux Allemands. Ce qui n'était pas arrivé depuis le départ de Sylvie Guillaume (S&D), vice-présidente de 2014 à 2019. A noter toutefois la présence de Fabienne Keller (Renew) parmi les 5 questeurs du Parlement. Mais le député devient surtout le premier habitant d'une région ultrapériphérique – en l’occurrence La Réunion - à occuper une telle fonction au sein du Parlement européen. "Avec mon élection, c’est aussi La France qui revient à la vice-présidence de notre Assemblée. Et c’est aussi la première fois dans l’histoire, qu’un ultramarin occupe une telle responsabilité", s'est-il enorgueilli sur X. Lorsque la Réunionnaise Huguette Bello (LFI) avait été pressentie pour Matignon, il avait eu cette saillie : "Les journalistes parisiens semblent découvrir Huguette Bello ! Cela dit l’invisibilisation habituelle, continue, permanente des élus ultramarins sur la scène médiatique nationale. En politique comme dans le reste des secteurs de la société, le racisme structurel rend les choses un peu plus compliquées pour nous !" 

"La cohésion c'est le principe même, fondamental, de l'idée européenne"

Et ses premières prises de positions depuis son élection vont vers la politique de cohésion en proie à des incertitudes quant à son avenir (voir notamment notre article du 24 juin). Thème qu'il connaît sur le bout des doigts puisqu'en 2019, il avait été nommé président de la commission du développement régional (Regi) chargée du suivi de la politique de cohésion. "Je lance l'alerte. Les menaces sont lourdes sur le démantèlement et l’affaiblissement de la politique de Cohésion", a-t-il déclaré après son élection, avant d'être légèrement rassuré par les déclarations d'Ursula Von der Leyen le 18 juillet, indiquant devant le Parlement vouloir "défendre une politique de cohésion forte" (voir notre article du 18 juillet). "Nous veillerons à ce que cet engagement soit respecté", a-t-il réagi sur X. Ce sera l'un des enjeux du prochain congrès des régions, les 25 et 26 septembre, à Strasbourg.

Cette sensibilité pour les régions fragiles ou isolées, il l'avait notamment exprimée lors du 10^e sommet des régions et des villes, qui s'était tenu à Mons en Belgique, au mois de mars. "La cohésion c'est le principe même, fondamental, de l'idée européenne. (…) Nous sommes convaincus que tous les Européens doivent épouser les mêmes conditions de vie qu'ils se trouvent au Nord, au Sud, à l'Est, à l'Ouest, à la périphérie ou à l'ultra-périphérie. Et le maintien des dimensions territoriales pour prendre en compte les îles, pour prendre en compte les régions ultrapériphériques, pour prendre en compte les régions faiblement peuplées ou les régions montagneuses est extrêmement important", avait-il affirmé.

Alors que la commission Regi avait plaidé pour une "macro-région" méditerranéenne et pour une stratégie pour les îles méditerranéennes, Younous Omarjee a salué "une victoire" après qu'Ursula von der Leyen a également annoncé, le 18 juillet, un futur commissaire chargé de la Méditerranée.

Le travail de reconfiguration du Parlement européen n'est pas terminé. Les commissions doivent tenir leur première réunion le 23 juillet pour élire leur président.