Volet recettes du PLF 2024 – Les sénateurs peaufinent les contours de France Ruralités Revitalisation

Dans le cadre de l'examen de la partie recettes du projet de budget pour 2024, adopté jeudi 30 novembre, les sénateurs ont apporté de nombreuses modifications au dispositif France Ruralités Revitalisation, censé prendre la suite des zones de revitalisation rurale. Certaines répondent aux engagements pris par la Première ministre devant les maires, la semaine dernière.

Fervents défenseurs des zones de revitalisation rurale (ZRR) – avec plusieurs rapports et propositions de loi à leur actif – les sénateurs ont eu la main leste sur la réforme en cours, lors de l'examen du projet de budget pour 2024, adopté jeudi. Et, parfois, avec l'appui du gouvernement. Après que les députés avaient été privés de débats suite à l'utilisation du 49-3, une série d'amendements est en effet venue compléter l'article 7 du texte qui prévoit la création de France Ruralités Revitalisation (FRR), le nouveau dispositif présenté par la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, Dominique Faure lors du congrès des maires ruraux à Alpe d'Huez.

Pour rappel, France Ruralités Revitalisation sera issu de la fusion de trois zonages : les ZRR, mais aussi les bassins d’emploi à redynamiser (BER) et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (Zorcomir). Comme proposé par les sénateurs, le gouvernement a retenu un double niveau de zonage : un dispositif socle et un "FRR +" destiné aux communes les plus vulnérables appartenant à une intercommunalité confrontée "sur une période d'au moins dix ans à des difficultés particulières, appréciées en fonction d'un indice synthétique".

Des critères d'éligibilité assouplis

En revanche, le gouvernement a préféré un maintien de la maille intercommunale, malgré les distorsions que cela peut créer entre communes équivalentes. Pour intégrer le zonage, une intercommunalité devra répondre à une double condition : une densité de population inférieure ou égale à la densité médiane nationale des intercommunalités de France métropolitaine ; un revenu disponible médian par unité de consommation inférieur ou égal au 35e centile des revenus médians par établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de France métropolitaine. Comme l'avait promis Elisabeth Borne lors du congrès des maires la semaine dernière (voir notre article), cette dernière condition, beaucoup plus restrictive qu'auparavant, a été supprimée, marquant un retour aux deux critères qui prévalaient jusqu'ici avec les ZRR. Plusieurs amendements, dont un émanant du gouvernement, sont allés dans ce sens. Cette évolution permettra de faire entrer 4.000 communes de plus dans le zonage, soit un total de 17.600 communes au lieu d'environ 13.400 en l'état actuel du PLF, avait indiqué la Première ministre devant les maires.

Deux amendements sénatoriaux sont par ailleurs venus limiter le classement en "FRR +" aux communes de moins de 20.000 habitants. L'un émanant du groupe LR prévoit d'aller au-delà de 20.000 habitants pour les communes "qui ne sont pas intégrées dans une métropole ou une communauté urbaine, situées dans un département dont la densité de population est inférieure à 33 habitants par kilomètre carré et dont le revenu médian est inférieur à la médiane des revenus médians par unité de consommation". Un amendement centriste va dans le même sens mais impose un maximum de 30.000 habitants.

Par ailleurs, un amendement centriste prend en compte la situation des "îles-communes", telles que Bréhat ou Ouessant, pour lesquelles il est proposé un classement communal et non intercommunal.

Les sénateurs ont voulu prendre en compte les handicaps des communes de montagne en permettant le classement des communes de moins de 20.000 habitants situées dans un territoire "peu dense", respectant un "critère de revenu assoupli" et "dont la majorité de la population réside en zone de montagne".

Nomadisme libéral

Les sénateurs ont également voulu desserrer les conditions d'éligibilité aux exonérations fiscales rattachées au zonage, alors que là aussi la réforme gouvernementale se voulait plus restrictive.

Trois amendements identiques (LR, SER et Union centriste) prévoient d'intégrer les reprises d’activité aux dispositifs FRR et FRR+, alors qu'elles en avaient été exclues dans la réforme. Une telle restriction aurait été "dommageable" au maintien des petits commerces en milieu rural et "source d’incompréhension au niveau local", ont-ils considérés.

En revanche, un amendement RDPI (ex-LREM) vise à lutter contre les effets d'aubaine observés dans les ZRR avec les professions libérales ("nomadisme libéral") : ainsi il ne sera plus possible de solliciter les aides plusieurs fois successivement, par simple changement d'adresse.

Le sénateur du Cantal Bernard Delcros (Union centriste) a souhaité apporter une réelle "plus-value" au classement en "FRR+" par rapport au dispositif socle, en permettant à une entreprise installée depuis plus de cinq ans dans le zonage, de bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés pendant une durée de trois ans. L'objectif est de soutenir les commerçants qui participent "de façon continue et durable au maintien de la vie dans nos villages les plus ruraux".

A noter enfin un amendement LR qui rend éligibles au FCTVA (fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée) les investissements immobiliers en faveur de l’accès aux soins pour l’ensemble des communes rurales et non plus seulement celles classées en zone de revitalisation.

A voir à présent ce que le gouvernement décidera de retenir ou non. La réforme est censée entrer en vigueur le 1er juillet 2024. Les ZRR, qui devaient prendre fin au 31 décembre, seront prolongées jusque-là.

 

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