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Valoriser le foncier disponible avec les acteurs de l'ESS : un guide à l'usage des collectivités

Le château de Nanterre, la friche La Belle de mai à Marseille, les occupations temporaires de la plaine de l'Ourcq... en milieu urbain, des collectivités cherchent actuellement à valoriser leur patrimoine foncier vacant - y compris de façon temporaire - tout en en facilitant l’accès aux acteurs de l'économie sociale et solidaire. Le RTES en a tiré des leçons dans un guide récent.

Comment les collectivités peuvent-elles soutenir les acteurs de l'économie sociale et solidaire (ESS) dans l'implantation de leurs activités, dans un contexte urbain souvent tendu ? Comment les entreprises de l'ESS peuvent-elles de leur côté aider les collectivités à valoriser certains sites laissés vacants pour des raisons diverses ? C'est l'objet du guide sur "L'accès au foncier des acteurs de l'ESS", récemment publié par le Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire (RTES) en partenariat avec le Commissariat général à l'égalité des territoires.

Première étape : mieux connaître ce patrimoine vacant

À partir de l'analyse d'une quinzaine d'exemples - initiatives ou politiques conduites par des collectivités - et d'un séminaire qui a eu lieu à Rennes en novembre 2018, le RTES identifie six leviers dont les collectivités disposent pour favoriser cet accès au foncier des acteurs de l'ESS. La mise à disposition de leur patrimoine foncier suppose déjà une bonne connaissance de ce dernier. Le RTES suggère aux collectivités de passer pour cela par des "collaborations inter-services (développement économique, vie associative, patrimoine, aménagement, etc.)".

Deuxième levier : dans les projets de renouvellement urbain dont elles ont la maîtrise d'ouvrage, les collectivités peuvent "intégrer les attentes des acteurs de l'ESS". Autre possibilité : se saisir de l'opportunité des "temps de vacance immobilière", dans le cadre de projets de réaménagement, pour développement une "politique d'urbanisme transitoire".

Via l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) dédié "Tempo'", l'établissement public territorial Est Ensemble valorise ainsi depuis 2016 ses friches dans le cadre du projet de réhabilitation de la plaine de l'Ourcq. L'occupation temporaire de différents sites permet à des structures, notamment associatives, de tester un projet s'adressant au grand public dans le champ de l'économie circulaire, de l'agriculture urbaine, de la santé et du bien-être, de la culture et du sport. Une quinzaine de structures lauréates ont ainsi pu accéder à un site et bénéficié d'une subvention pour payer les charges courantes et le projet d'animation. Pour dégager une enveloppe globale de 85.000 euros par AMI, Est Ensemble a bénéficié de financements de la région, au titre des ZAC et du PIA 2 dans le cadre du dispositif "Villes durables" avec la Caisse des Dépôts.

Des opérateurs spécialisés dans la valorisation du foncier pour des projets d'intérêt général

Quatrième levier mis en avant par le RTES : la possibilité pour les collectivités, très fréquemment sollicitées sur ce thème, d'apporter des "réponses plus cohérentes" aux structures de l'ESS. Ainsi "les collectivités peuvent favoriser la coopération et la mutualisation d’espaces entre structures, voire servir d’intermédiaire de confiance avec des propriétaires privés".

Autre piste qui est liée à la précédente : s'appuyer sur des acteurs spécialisés dans la valorisation du patrimoine au profit de projets d'utilité sociale. C'est le cas de la foncière Etic, qui a notamment pris en charge le projet de réhabilitation du "château de Nanterre" – ancienne usine de dentifrice devenue un temps siège de l'entreprise Natalys -, avec la conception, l'aménagement et la commercialisation d'un espace désormais dédié à l'alimentation responsable et à l'innovation sociale. Pour cela, "la ville a mobilisé sa SEM locale 'la Semna', comme outil de portage du foncier, puis travaillé sur un montage juridique intégrant la Sem comme actionnaire minoritaire de la SCI en s'associant" à deux investisseurs, l'un public avec la Caisse des Dépôts et l'autre privé avec Etic, explique Patrick Jarry, maire de Nanterre, dans le guide.

Le RTES met en avant un autre opérateur : la société coopérative d'intérêt collectif (scic) Plateau urbain, spécialisée dans la valorisation du "foncier intercalaire" pour des projets d'intérêt général. La scic est notamment l'un des partenaires du projet socio-culturel "Les grands voisins", sur le site de l'ancien hôpital Saint Vincent de Paul à Paris. Dans ce cas, c'est l'établissement public foncier d'Ile-de-France qui détient le foncier et le met à disposition à des porteurs de projets, avec trois partenaires que sont Plateau urbain et les associations Aurore et Yes We Camp.

La Scic privilégiée pour des lieux partagés sur le long terme

Sixième levier identifié : les collectivités peuvent "s'impliquer dans des lieux partagés structurés en Scic". Ce modèle serait actuellement celui des "projets d'implantation de lieux partagés à long terme (supérieur à trois ans)". Le fait, pour une collectivité, d'être sociétaire de la Scic lui permettrait ainsi "d'avoir une maîtrise partielle et un droit de regard sur la gestion et les activités présentes". Le RTES cite les exemples du Solilab à Nantes, du Phares à L'Île-Saint-Denis ou encore de la friche La Belle de mai à Marseille.

Le RTES consacre un chapitre entier à "la mise en œuvre de stratégies territoriales d'accès au foncier", avec des exemples concernant Lille, Rennes, Nantes et Strasbourg et des "préconisations" concrètes. Le guide s'achève sur un point sur des notions juridiques et financières – propriété du bâtiment, modalités contractuelles, … -, avec une présentation de foncières solidaires telles que la Scic SARL Villages vivants dédiée à la revitalisation des centres-bourgs ruraux.

Le RTES conclut par un appel à étendre au champ de l'ESS "l'expérimentation des organismes fonciers solidaires, permettant de dissocier la propriété du foncier et la propriété du bâti pour lutter contre la spéculation foncière (mais qui ne concernent à l’heure actuelle que le logement)".