Vaccination : les écarts entre départements restent importants mais se resserrent
Les "cartographies départementales de la vaccination" réalisées par l'Assemblée des départements de France (ADF), basées sur les données de Santé publique France, mettent notamment en évidence des écarts entre territoires dans le taux de couverture vaccinale de la population générale, qui peuvent s'expliquer par une plus forte proportion de personnes âgées dans les départements ruraux. Des écarts sur la vaccination des personnes âgées sont toutefois eux aussi visibles.
L'Assemblée des départements de France (ADF) met en ligne une nouvelle version de ses "cartographies départementales de la vaccination". Celle-ci présente les données au 4 mars 2021, soit environ deux mois après le début effectif de la campagne nationale de vaccination. En l'occurrence, il ne s'agit pas de données remontées par les départements, mais d'une exploitation de celles fournies quotidiennement par Santé publique France et mises en ligne sur le site data.gouv.fr Le collationnement effectué par l'ADF permet néanmoins d'accéder facilement à un état des lieux territorial de la vaccination contre le Covid-19 et aux écarts entre départements.
Un "phénomène de rattrapage"
L'ADF accompagne en outre cette publication d'"éléments d'analyse". Il apparaît ainsi que 5,2% de la population française, tous âges confondus (sachant que les enfants n'ont pas vocation à être vaccinés), avait reçu au moins une dose de vaccin à la date du 4 mars 2021. Ce taux représente une hausse de 0,7 point en une semaine. Après la forte mobilisation du weekend du 6 et 7 mars, ce taux avoisinait même les 6%, soit près d'un point supplémentaire.
L'ADF précise que l'écart-type entre les moyennes départementales et cette moyenne nationale (dispersion autour de la moyenne nationale) est de 1,51, ce qui traduit des disparités territoriales de déploiement de la vaccination. Cet écart-type est stable par rapport à la dernière date de recueil des données. L'ADF relève également une sorte de "phénomène de rattrapage", les départements où la couverture vaccinale était la plus faible la semaine précédente étant ceux qui ont administré le plus de doses depuis lors. De même, "il semble pour l'instant que la continuité du parcours vaccinal soit assurée de façon relativement homogène sur le territoire". Autrement dit, la proportion de personnes ayant reçu leur deuxième dose par rapport à l'ensemble des personnes ayant reçu la première présente un écart-type faible et une moyenne stable depuis une semaine, aux alentours des 50%.
Autre enseignement de portée générale : la très forte prédominance du vaccin de Pfizer/BioNTech (84,8% des injections), très loin devant ceux d'AstraZeneca (9,5%) et de Moderna (5,7%). Cette domination s'explique à la fois par le fait qu'il a été le premier autorisé par les autorités sanitaires et qu'il est celui utilisé dans les Ehpad, qui constituaient la cible de départ ultra prioritaire.
Départements ruraux versus départements urbains
Les cartes mises en ligne par l'ADF mettent néanmoins en évidence des écarts significatifs entre départements. Il faut considérer à part le cas de DOM, où à peine plus de 1% de la population a reçu une première dose, ce qui s'explique par un début de campagne plus tardif et par des difficultés logistiques. En métropole, il apparaît que les départements ruraux et faiblement peuplés sont les plus avancés dans l'administration du vaccin, alors que les grands départements urbains semblent en retard. Cela peut s'expliquer notamment par la forte proportion de personnes âgées – et donc de publics prioritaires – dans les départements ruraux.
Parmi les cartes présentées, plusieurs fournissent des données brutes (nombre total de premières doses administrées, de deuxièmes doses, de doses cumulées...) et présentent donc peu d'intérêt en termes de comparaisons. En revanche, le taux de couverture vaccinale de la population générale pour la première dose met en évidence des écarts entre territoires. Ce taux va ainsi de 2,5% en Seine-Saint-Denis (département avec une population jeune), 2,7% en Seine-et-Marne et 3,2% dans l'Oise et la Haute-Savoie à 8,2% dans l'Allier, 7,7% dans le Jura et 7,6% dans la Creuse. Il en est de même, de façon logique, pour le taux de couverture vaccinale avec la seconde dose, où l'on retrouve la Seine-Saint-Denis à 1,3% et la Seine-et-Marne, l'Ain et la Haute-Savoie à 1,6%, face à la Creuse à 5,4%, le Cantal à 5,3% et l'Orne à 5,1%.
Des écarts difficiles à expliquer sur les Ehpad
Le plus surprenant reste cependant les écarts sur les personnes âgées, cibles prioritaires quelle que soit la situation sociodémographique du département. Ainsi, le taux de couverture vaccinale réelle (avec la deuxième dose) en Ehpad montre une France coupée en deux entre l'Ouest et l'Est. A l'ouest d'une ligne Dunkerque-Perpignan, on observe les taux les plus élevés : 80% dans l'Orne, 78% dans les Pyrénées-Orientales, 76% dans le Calvados, 74% dans la Manche, 73% en Charente-Maritime... A l'inverse, les taux les plus faibles s'observent à l'est de cette ligne : 36% dans l'Ain, 39% en Haute-Savoie, 40% dans les Alpes-Maritimes, 42% en Haute-Saône... A l'est, seules les Ardennes font exception avec un taux – record national – de 88% de vaccinations complètes en Ehpad. Cette répartition laisse penser que ces écarts ont peu à voir avec la typologie et la démographie des départements (de nombreux départements ruraux et âgés sont à la traîne), ni avec la gravité de la situation épidémiologique (cas des Alpes-Maritimes à seulement 40% ou du Pas-de-Calais à 47%). Ils renvoient sans doute plutôt à des problèmes locaux dans l'organisation de la vaccination en Ehpad.
Si on élargit le taux de couverture vaccinale réelle (deux doses) à l'ensemble de la population de plus de 75 ans, on observe d'ailleurs que la césure Est-Ouest disparaît, au profit d'une répartition qui place les départements ruraux en tête, à l'image du Jura (31%), du Cantal, du Doubs et de l'Orne (27%), de l'Indre (26%) ou de la Creuse (25%). A l'inverse, l'Isère, le Var, le Pas-de-Calais, l'Ardèche, l'Aude et la Dordogne plafonnent à 11%, le Gard, les Bouches-du-Rhône, les Alpes-Maritimes, les Yvelines, l'Ain et la Sarthe à 13%.