Ehpad : après la vaccination, les fédérations appellent à un "pacte de responsabilité partagée"
Alors que près de 83% des résidents en Ehpad ont, selon le ministère de la Santé, reçu une première dose de vaccin, les Fédérations d'établissements pour personnes âgées demandent un assouplissement des règles applicables afin de restaurer la vie sociale au sein des établissements : visites, sorties, etc. Le tout devant se discuter localement et pour chaque établissement. La ministre déléguée Brigitte Bourguignon demeure pour l'heure très prudente. Sauf que depuis... le Conseil d'Etat vient de suspendre l'interdiction des sorties.
Alors que l'heure est au maintien du couvre-feu et aux menaces de reconfinement, les Ehpad semblent engagés dans le chemin inverse. Premières victimes de la pandémie, avec le plus grand nombre de décès au sein des établissements ou après transfert à l'hôpital, ils connaissent aujourd'hui une nette amélioration de leur situation sanitaire. Au point que les fédérations d'établissements demandent un assouplissement des règles applicables en Ehpad.
Associer étroitement les conseils de la vie sociale
Selon le ministère des Solidarités et de la Santé, la campagne de vaccination lancée à la fin du mois de décembre 2020 commence à porter ses fruits : près de 83% des résidents en Ehpad et en USLD (unités de soins de longue durée) ont reçu une première dose de vaccin contre le Covid-19 et 57% ont déjà bénéficié de la seconde dose. Dans un communiqué du 2 mars, les Fédérations d'établissements pour personnes âgées – FHF, Uniopss, Fehap, AD-PA... – demandent donc un assouplissement des règles applicables, afin de restaurer la vie sociale au sein des établissements. Les signataires proposent pour cela à Brigitte Bourguignon, la ministre déléguée chargée de l'autonomie, un "pacte de responsabilité partagée".
Les fédérations rappellent en effet que "les Ehpad et USLD sont les premiers lieux collectifs en France où la grande majorité des personnes se trouve être vaccinée". Ils estiment donc qu'"il est devenu urgent de clarifier les possibilités d'adaptation des restrictions mises en place depuis près d'un an". Pour cela, les décisions doivent résulter d'un processus démocratique de discussion locale pour aboutir à un 'pacte de responsabilité partagée'". Les signataires mettent notamment en avant l'importance de l'information des résidents et des familles et donc, en amont, des Ehpad. En particulier, le conseil de la vie sociale (CVS) de chaque établissement "doit être régulièrement informé de la situation et de son évolution, associé à la réflexion et consulté sur les mesures envisagées".
Visites, repas, sorties...
Concrètement – et dès lors que tous les résidents qui le souhaitent ont pu recevoir les deux doses de vaccin –, les assouplissements pourraient consister à autoriser à nouveau différentes démarches, "sans condition de fréquence ou de durée" : visites des familles en chambre et dans les espaces collectifs dédiés, prises de repas de résidents avec leur famille dans une salle de restauration dédiée, possibilité pour les familles de toucher leur proche "moyennant le strict respect des consignes de lavage des mains et de port du masque", sorties en extérieur et sorties en famille des résidents, organisation de repas plus conviviaux en salle de restauration entre résidents de différentes unités. Les fédérations estiment qu'"il apparait néanmoins nécessaire de maintenir les mêmes précautions que pour la population générale de stricte application des gestes barrières".
Si les mesures de restrictions, à titre collectif ou individuel, devaient être maintenues, cette décision devrait faire l'objet "d'une formalisation et d'une motivation sur la base d'une évaluation bénéfices / risques, sachant que les conséquences psychosociales du maintien de ces restrictions doivent être comparées au risque résiduel existant à l'issue de la campagne de vaccination".
Brigitte Bourguignon : "il y a un signe d'espoir très fort"
Enfin, les fédérations d'établissements se veulent prudentes, en précisant – dans la logique d'une approche plus territoriale de la lutte contre la pandémie – que "la décision d'assouplir les mesures de restrictions sera fonction de la situation sanitaire nationale et locale, des éventuelles mesures nationales prises face à une évolution défavorable de l'épidémie et de la situation propre à chaque établissement".
Brigitte Bourguignon n'a pas encore pris officiellement position sur les propositions des fédérations professionnelles. Le 1er mars, donc juste avant le communiqué de ces dernières, elle a simplement affirmé sur RTL que, grâce à la vaccination, "il y a un signe d'espoir très fort". Pour la ministre, l'allègement du protocole sanitaire dans les Ehpad est désormais "le but que nous poursuivons tous". Elle est toutefois restée prudente en indiquant que "l'objectif est de bâtir ensemble le chemin des retrouvailles. On doit le bâtir progressivement". Brigitte Bourguignon pourrait préciser ses intentions lors de deux déplacements prévus dans le Lot et en Ille-et-Vilaine les 4 et 5 mars.
Petit retournement de situation qui devrait largement peser dans la balance en faveur des fédérations. On apprenait ce 3 mars en fin de journée que le juge des référés du Conseil d'État a décidé de suspendre l’interdiction de sortie des résidents d'Ehpad, sachant que les recommandations diffusées par le ministère des Solidarités et de la Santé prévoient que "les sorties dans les familles et pour des activités extérieures sont suspendues jusqu’à nouvel ordre". "Cette interdiction totale est disproportionnée, car la majorité des résidents ont été vaccinés et la vaccination a démontré ses effets positifs. Les mesures adéquates peuvent donc être prises au cas par cas par les directeurs d’établissement", résume dans son communiqué le Conseil d'Etat, qui avait été saisi par les enfants d’une résidente. S'appuyant d'ailleurs sur les chiffres du ministère quant à la part de résidents vaccinés, je juge considère que "certaines sorties, notamment celles des résidents ayant été vaccinés, peuvent être compatibles avec la sécurité de l’ensemble des résidents et du personnel dès lors que des mesures adéquates de protection sont définies. Référence : décision en référé n°449759 |