Environnement - Une protection des sols européens a minima
Lors de sa session plénière du 14 novembre, le Parlement européen a adopté en première lecture le projet de directive définissant un cadre pour la protection des sols au niveau européen par 496 voix pour, 161 contre et 22 abstentions. Les amendements ne renforcent pas des mesures environnementales définies pour le moment a minima et ce vote, qui fait suite à de nombreuses discussions, se montre nettement plus favorable aux Etats membres. Il correspond aussi davantage aux attentes des propriétaires de friches industrielles et des agriculteurs qu'à celles des associations environnementales.
Point positif, la directive en cours d'adoption devrait permettre, pour la première fois, la définition au niveau européen de mesures de prévention mais aussi de remise en état des sols dégradés. Mais les parlementaires européens ont veillé, plus encore que la Commission, à ne pas aller vers l'affrontement avec les Etats membres. Ils ont allégé les mesures trop contraignantes à leur égard, en particulier vis-à-vis des Etats disposant déjà d'une législation en la matière. Parmi les mesures qui devraient arranger les Etats, les délais laissés pour identifier des zones prioritaires de protection (cinq ans à partir de l'adoption de la directive), répertorier les sites pollués (six ans) et élaborer des stratégies réparatrices (sept ans). Les Etats ayant une législation peu favorable aux mesures de protection des sols - dont la France- seront exemptés de la première étape.
Le sol, contrairement à l'air ou à l'eau, ne semble pas représenter un intérêt communautaire suffisant pour les parlementaires, d'où la définition a minima des "sites contaminés", définis par le Parlement européen comme posant un "risque significatif à la santé humaine ou à l'environnement" et la marge de manoeuvre totale laissée aux Etats concernant les politiques agricoles.
Si les députés souhaitent laisser la protection des sols dans le domaine étatique et non européen, le citoyen européen pourra cependant encore compter sur quelques mesures de protection a minima précisées dans la directive. Ainsi les acquéreurs de terrains devront être informés des activités présentes et passées sur le site et se voir fournir toute information disponible sur les niveaux de concentrations des substances dangereuses dans le sol. Les zones aéroportuaires, portuaires et militaires ont été ajoutées par les parlementaires comme étant des zones dans lesquelles la manipulation des substance dangereuses a eu lieu.
La directive continuera-t-elle à être vidée de sa substance pendant le processus législatif ? On peut, dès maintenant, se poser la question de l'efficacité d'une législation au niveau européen, qui, à force de ménager les sensibilités étatiques, laisse trop de place aux bonnes pratiques et au flou juridique.
Gwenaelle Radosevic / Welcomeurope
Les obligations fixées par la directive
Les Etats membres devront établir un inventaire national, ouvert au public, des sites contaminés, avec la possibilité de créer des répertoires régionaux qui devront être mis à jour au moins tous les cinq ans pour inclure les nouveaux sites contaminés et exclure les sites assainis. Selon la définition ajoutée par les députés au texte initial de la Commission, "un site contaminé " devra être compris comme "tout site où sont présentes - sur ou dans le sol - des substances dangereuses engendrées par l'activité humaine et présentant un risque significatif pour la santé". Cinq ans après la transposition de la directive, les Etats membres devront identifier les zones prioritaires devant faire l'objet d'une protection spéciale contre l'érosion, le déclin de la matière organique, la perte de biodiversité notamment. La liste de ces zones sera révisée tous les dix ans.
Six ans après la transposition en droit national, les Etats membres devront avoir localisé au minimum les sites qui ont hébergé ou hébergent des activités affectant les sols comme les activités susceptibles de causer des accidents industriels majeurs, les installations d'exploitation minière ou des décharges de déchets.
Il appartiendra également aux Etats de veiller à ce que les sites contaminés sur leur territoire soient assainis, selon les priorités à fixer par leurs soins ou qu'ils auront déjà eux-mêmes établies. Pour les opérations d'assainissement, les eurodéputés souhaitent que les Etats membres soient encouragés à utiliser les meilleures techniques disponibles. Aujourd'hui, on estime à près de 40 milliards d'euros par an les coûts réultant de la dégradation des sols sur le territoire de l'UE.
Xavier Sidaner / Victoires-Editions avec Europa Press