Archives

Commande publique - Une erreur matérielle constatée dans l'offre d'un candidat, peut-elle être qualifiée d'oubli voire d'absurdité ?

Un candidat à un marché public peut-il, de lui-même ou sur invitation du pouvoir adjudicateur, rectifier une erreur purement matérielle et ce, sans risquer l'élimination de son offre de ce seul fait ? Dans un arrêt du 21 septembre 2011, le Conseil d'Etat répond par l'affirmative mais limite cette possibilité à une hypothèse bien précise.
En l'occurrence, un pouvoir adjudicateur avait engagé une procédure d'appel d'offres en vue de la passation d'un marché à bons de commande. Un groupement d'entreprises avait présenté une offre dont l’un des nombreux prix unitaires avait attiré, par sa faiblesse, l’attention du pouvoir adjudicateur. Interrogé sur ce point, le candidat avait admis avoir commis une erreur sur le prix, qui était de 220 euros au lieu des 22 euros indiqués et avait apporté les modifications nécessaires. Dès lors, la commission d’appel d’offres avait écarté la proposition du groupement sans l’examiner au motif du non respect du principe de l'intangibilité de l'offre.
Le juge des référés, saisi par le candidat évincé, pose une exception à cette règle et annule la procédure de passation. En effet, le magistrat considère que "eu égard au caractère très marginal de la prestation concernée et à l'incidence négligeable de cette rectification en cause sur le montant global de l'offre de l'intéressée", une telle modification ne méconnaît pas les dispositions de l'article 59 du Code des marchés publics.
Les magistrats du Palais-Royal, bien que n'approuvant pas entièrement la position des juges du fond, reconnaissent également une exception à ce principe, tout en l'encadrant strictement. En effet, le Conseil d'Etat considère que si les dispositions de l'article 59 "s'opposent en principe à toute modification du montant de l'offre à l'initiative du candidat ou du pouvoir adjudicateur, ce principe ne saurait recevoir application dans le cas exceptionnel où il s'agit de rectifier une erreur purement matérielle, d'une nature telle que nul ne pourrait s'en prévaloir de bonne foi dans l'hypothèse où le candidat verrait son offre retenue".

Qu'est-ce qu'une erreur purement matérielle?

Lors de ses conclusions sur cette affaire, le rapporteur public a tenté de définir l'erreur purement matérielle. Selon lui, il s'agirait "d’erreurs qui comportent, en quelque sorte, en elles même la rectification qu’elles appellent", telles que les absurdités ou les incohérences (un prix sans rapport avec la réalité du coût, une contradiction entre les différents documents de l'offre comme entre le bordereau de prix unitaire et le détail quantitatif estimatif mentionné dans l'acte d'engagement) mais aussi le simple oubli. Dans l'affaire en cause, les magistrats avaient constaté que l'erreur matérielle pouvait tout aussi bien être présentée comme un oubli qu'une absurdité. En effet, compte tenu de la nature de la prestation, c'est-à-dire le transport, le stockage et le traitement d'un mètre cube de déchet dangereux, le montant de 22 euros est sans doute une absurdité. Mais, il s'agit tout aussi bien d'un oubli, celui d'une partie de la prestation correspondant au stockage et au traitement des déchets pour un montant de 198 euros. Or, ajouter un zéro à 22 euros ou lui additionner 198 euros, donne exactement le même résultat.

Référence
Conseil d'Etat, 21 septembre 2011, Département des Hauts-de-Seine, n° 349149
 

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis