Un paysage vivant et diversifié grâce à l’engagement de tous (67)

« Ce prix représente pour nous une fierté et une reconnaissance de notre travail collectif. Car comme l’être humain est partie intégrante de l’environnement à la manière d’un puzzle, nous avons toujours mené nos réalisations en rassemblant tous les acteurs : habitants, agriculteurs, professionnels du tourisme, élus… Nous visons le consensus dynamique, intelligent et constructif au service de notre territoire », précise Jean-Bernard Pannekoecke, président de la communauté de communes de la vallée de la Bruche, distinguée par le concours « Capitale française de la biodiversité ». Pour fabriquer une vallée plus accueillante avec des espaces diversifiés: prairies, pâturages, forêts, centres urbains vivants, villages cohérents…- telle qu’elle est aujourd’hui, les élus ont mis en œuvre un plan ambitieux visant à redessiner les paysages des champs et des villes, en les « ménageant » plutôt que les « aménager » à tout crin.

Des friches requalifiées

Côté urbain, la communauté de communes a mené une politique de requalification des friches industrielles. À titre d’exemple, au début des années 2000, la filature Steinheil au centre de la commune de Rothau a été rachetée par la communauté de communes. Montant de l’opération (achat, mise en sécurité, démantèlement, démolition, requalification) : 6 millions d’euros financés à hauteur de 30 % par l’État, la région et le département. « Nous avions besoin de retrouver un paysage sain et dépollué et d’intervenir avant toute pollution de la rivière », explique l’élu. Les 3,5 hectares ainsi libérés ont laissé place à des terrains à aménager. « Dans une vallée où l’espace est contraint, il importe de l’utiliser de manière pertinente pour faire du développement économique, de l’habitat, permettre la sécurisation de la traversée du village, aménager les bords de rivière… », dit Jean-Sébastien Laumond, chargé de mission Paysage Environnement à la communauté de communes.

Retrouver des paysages agricoles vivants passe par le maintien d’un tissu d’acteurs dans la vallée. Mais pour avoir agriculteurs et éleveurs, encore faut-il des terres. Là encore l’intelligence collective a irrigué l’action à travers l’association foncière pastorale, un outil qui a permis de sensibiliser et de regrouper des parcelles appartenant à de multiples propriétaires. Sur trente ans, 21 associations ont été créées, soit 550 ha (4 000 parcelles) de terrains privés fédérés pour 2 900 propriétaires concernés. Rouvrir les espaces a représenté une entreprise de grande ampleur pour déboiser, dessoucher, et retrouver des prairies permanentes, de la ripisylve (formations végétales qui se développent sur les bords des cours d'eau), des vergers… « Aujourd’hui, notre paysage est à la fois ouvert et vivant et il offre une biodiversité qui joue aussi un rôle alimentaire essentiel car des pâturages de qualité induisent des produits de qualité », résume Jean-Bernard Pannekoecke.

Sentiers plaisirs

Aux habitants de la vallée, ce paysage apporte outre de bons produits, un espace naturel ouvert à la lumière et au soleil qui concourent à leur mieux-être. Aux touristes, il propose une reconnexion avec la nature : « nous visons un tourisme responsable en phase avec nos valeurs de respect et de symbiose avec la nature. » Pistes cyclables, ligne de chemin de fer longeant la vallée vont dans ce sens, mais aussi drive fermiers, fermes auberges, marchés paysans… Parmi les propositions aux touristes, l’office de Tourisme de la Vallée de la Bruche organise les « sentiers plaisirs », sorties thématiques, guidées par les habitants des villages, qui font figure de symbole. Ils rencontrent même un tel succès qu’il est maintenant nécessaire d’y réserver sa place. « Les sentiers plaisirs sont un bel exemple de cette complémentarité : ils portent à la connaissance des visiteurs la vie de notre territoire transmise par des habitants passionnés. En cela, les sentiers plaisirs concourent à la dynamique dans les villages et créent du lien social ». Pendant l’été 2022, 109 sorties accompagnées par 60 bénévoles ont été proposées sur l’ensemble de la vallée.

Le paysage de demain

Qui dit « vivant » dit « en mouvement ». Aussi, s’agit-il d’observer l’évolution des paysages et de la guider. Quelle forêt pour demain ? Autour de ce thème, une vingtaine d’élus et des propriétaires privés ont participé, en octobre dernier, à une journée de formation organisée par la communauté de communes. « Nous avons commencé à replanter de l’arbre agroforestier et champêtre, de la haie. Nous pensons en termes de fluidité entre toutes les entités : de l’arbre dans la prairie, de la prairie dans la forêt », explique Jean-Sébastien Laumond. Autre question majeure, la ressource en eau. À n’en pas douter, l’esprit de coopération et la fédération des énergies, guideront les acteurs vers les réponses les plus adéquates