Archives

Environnement - Un état des lieux préoccupant

L'édition 2010 du rapport sur l'environnement en France publiée le 5 juin par le Commissariat général au développement durable (CGDD) fait apparaître un bilan contrasté. Si la qualité de l'air continue à s'améliorer, la situation reste préoccupante pour les eaux souterraines, les eaux côtières et la biodiversité tandis que l'artificialisation des sols se poursuit.

"Replacé dans une perspective de long terme, le bilan de l'environnement en France au début du XXIe siècle apparaît contrasté", prévient l'édition 2010 du rapport sur l'environnement en France publié par le Commissariat général au développement durable (CGDD) le 5 juin à l'occasion de la journée mondiale de l'environnement. Réalisé tous les quatre ans, ce panorama complet présente des analyses statistiques articulées en vingt chapitres organisés en trois parties. La première sur l'état de l'environnement fait le point sur l'eau, l'air, le sol, l'occupation des sols, la mer et le littoral, la biodiversité, le changement climatique et l'énergie. Une deuxième partie passe en revue les pressions sur l'environnement, avec un bilan de l'impact de "l'agriculture, la foresterie, l'industrie, les transports, l'étalement urbain, les ressources et les déchets, les ménages". Quant à la dernière partie, intitulée "l'environnement dans l'économie et la société", elle porte sur "les enjeux exposés aux risques majeurs, les opinions et les pratiques environnementales des ménages, l'économie, ainsi que les formations et l'insertion professionnelles".
Les données de ce rapport datent pour l'essentiel de 2007. "Dans beaucoup de domaines, il manque encore aujourd'hui des données pour les années 2008 et 2009", souligne le CGDD. Le rapport 2010 dresse donc "un état des lieux statistique à l'aube du Grenelle de l'environnement sans s'engager sur le terrain de l'évaluation", insiste-t-il.

 

Meilleure qualité de l'air

Pour le CGDD, "le compartiment atmosphérique est sans doute celui où la situation de l'environnement français est la plus favorable". Alors que les émissions des six gaz à effet de serre (GES) couverts par le protocole de Kyoto ont augmenté au niveau mondial de 24% de 1990 à 2004, celles de la France ont diminué de 5,6% au cours de la même période. La qualité de l'air des villes s'est aussi "sensiblement améliorée" de 2000 à 2008, note le rapport. "L'examen des milieux aquatiques laisse également apparaître une relative amélioration de la situation pour les eaux superficielles", souligne-t-il, et des " améliorations relatives" sont par ailleurs à signaler dans la gestion des déchets, avec une stabilisation de la consommation intérieure de matières et une limitation de la production de déchets industriels, notamment.
Dans le domaine des déchets comme dans celui de la gestion des eaux, les investissements importants qui ont été consentis (installations de dispositifs de recyclage, d'assainissement, etc.) expliquent largement les améliorations constatées, relève le CGDD. Dans celui des transports, l'exigence croissante des normes Euro couplée au développement d'écotechnologies (pots catalytiques, par exemple) est selon lui la principale cause de réduction des émissions d'oxydes d'azote des transports routiers. Le rapport cite aussi le secteur des déchets comme un autre exemple de l'"interaction vertueuse entre une norme exigeante, sans cesse perfectionnée (loi de juillet 1975 sur l'élimination des déchets, directive-cadre européenne sur les déchets d'octobre 2008, suites du Grenelle de l'environnement) et l'essor de filières industrielles de collecte et de traitement (ex. filières spécialisées dans le traitement des huiles usées, des piles et accumulateurs, des déchets d'équipements électriques et électroniques)".

 

L'artificialisation des sols s'accentue

Mais "de nombreuses difficultés persistent", souligne le rapport du CGDD qui constate que "sur plusieurs points, le bilan environnemental demeure préoccupant, voire se détériore". Il insiste ainsi sur le "degré de pollution relativement élevé" des sols, des eaux souterraines et des eaux côtières. La contamination des sols a des origines diverses : pollution anthropique au plomb due au trafic routier, phosphore dans l'espace agricole du fait de l'accumulation des engrais, cuivre dans les zones viticoles. La pollution des eaux souterraines a tendance à s'accroître. "De 1997 à 2007, on observe à la fois un moindre pourcentage de points de mesure de la qualité des eaux souterraines avec des teneurs inférieures à 10 mg/l (48% contre 56%) et un plus grand pourcentage de points avec des teneurs supérieures à 50 mg/l (6% contre 4%)", constate le CGDD qui estime aussi que "l'évolution de la qualité des eaux côtières, particulièrement en Atlantique du Nord-Est, ne semble pas non plus favorable sur longue période".
Le rapport met aussi en exergue la persistance de l'artificialisation de l'espace, dans la continuité des tendances observées depuis 1990. Entre 2000 et 2006, les espaces artificialisés ont progressé de 82.000 hectares - soit une augmentation relative de 3%. Cette évolution s'est faite pour l'essentiel au détriment des terres agricoles et dans une moindre mesure (10.000 hectares) des espaces semi-naturels, de plus en plus fragmentés. Le phénomène est imputable à l'extension du tissu urbain et du réseau des infrastructures. Ainsi, souligne le rapport, "l'influence de l'accroissement des réseaux routier et ferroviaire de large emprise est notable (…) avec une augmentation de 1.300 ha/an sur la période 2000-2006". Rapporté à sa surface, ce type d'occupation des sols représente la plus forte progression relative sur la période (+19%). Le rapport pointe aussi "le processus continu et cumulatif d'étalement urbain" qui paraît "assez mal maîtrisé", avec des "couronnes d'urbanisation grandissantes". "Sur les 71 principales aires urbaines métropolitaines, la distance moyenne de construction neuve au centre de l'aire se monte à 13 km sur la période 2000-2008 après s'être stabilisée autour de 11 km durant la période 1980-1990", constate-t-il. La dynamique actuelle d'étalement urbain rejoint ainsi celle observée à la fin des années 1980. L'augmentation du nombre de ménages et "la recherche d'un plus grand confort par agrandissement des logements participent à l'explication du phénomène d'artificialisation des sols", analyse le CGDD.

 

Pression de plus en forte sur le littoral

Certains espaces sont naturellement plus fragiles que d'autres et le rapport met une nouvelle fois en garde contre la forte pression qui s'exerce sur le littoral. Particulièrement riche sur le plan naturel, il présente actuellement une densité de population 2,5 fois plus importante que la moyenne avec un écart qui ne cesse de creuser - le nombre de m2 construit par habitant y est trois supérieur à la moyenne nationale en 2006. Le CGDD s'inquiète aussi de l'urbanisation des zones inondables : de 1999 à 2006, le nombre de logements dans ces zones a augmenté de 8%, soit au même rythme qu'ailleurs.
Enfin, l'état de la biodiversité n'est pas non plus jugé satisfaisant : si les surfaces protégées ont augmenté, l'état de conservation des habitats d'intérêt communautaire n'est pas bon pour plus de 50% des sites dans les domaines biogéographiques atlantique et continental et le diagnostic est tout aussi préoccupant pour la flore.
"L'environnement en France paraît encore trop considéré de manière sectorielle, fragmentée, conclut le CGDD. Les efforts consentis par les différents acteurs sont encore très variables. Il reste à traduire dans les faits la vision globale et partagée portée par le Grenelle de l'environnement visant un développement économique susceptible d'apaiser les relations de l'homme avec son milieu sur le long terme." L'évolution des comportements sera aussi déterminante car, comme le note par ailleurs le rapport, "un décalage de perception existe entre l'idée générale que se font les Français de la nécessité de protéger leur environnement et la réalité de leurs pratiques".


Anne Lenormand
 

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis