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Rapport 2002-2006 - L'environnement dans tous ses états

L'édition 2006 du rapport sur l'environnement en France, publié tous les quatre ans par l'Institut français de l'environnement (Ifen), montre une réduction des risques de pollution industrielle et une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre. Mais l'Ifen pointe de nouveaux problèmes liés aux pollutions diffuses et aux effets de l'étalement urbain.

En 500 pages, l'édition 2006 du rapport de l'Ifen dresse un état des lieux sur l'environnement en France qui se veut à la fois très précis et accessible à un public extrêmement large, comme l'a souligné le 17 octobre, Bruno Tregouet, directeur de l'Ifen, lors de la remise du document à Nelly Olin, ministre de l'Ecologie et du Développement durable. Ce rapport traite de manière transversale des deux problèmes majeurs que sont le changement climatique et l'érosion de la biodiversité et aborde des sujets nouveaux par rapport à l'édition 2002 : la pression exercée par les ménages ou par les activités tertiaires sur l'environnement, l'influence de l'environnement sur la santé ou encore les inégalités sociales face à la dégradation de l'environnement. 
"De manière générale, les situations les plus critiques de forte pollution localisée se sont beaucoup améliorées", a souligné la ministre de l'Ecologie lors de la présentation du rapport. Les émissions des six principaux gaz à effet de serre (GES), responsables du réchauffement climatique, sont "à peu près stables", note l'Ifen. Depuis 2000, elles sont inférieures aux exigences du protocole de Kyoto. Les transports, qui restent responsables du quart des émissions de GES, ont réussi depuis 2002 à stabiliser leur part et le secteur industriel a considérablement réduit la sienne. En revanche, l'habitat et le secteur tertiaire voient leurs émissions augmenter. "Pour diviser par 4 les émissions de GES d'ici à 2050, des baisses substantielles sont attendues dans les transports et l'habitat", prévient Bruno Tregouet.
Si la qualité de l'air des grandes et moyennes agglomérations s'est améliorée depuis 2002 grâce au renouvellement du parc automobile et à la généralisation du pot catalytique, les pollutions liées au transport restent préoccupantes et ce, d'autant plus que la circulation automobile augmente, souligne l'Ifen. Les concentrations des particules fines, qui sont les plus nuisibles pour la santé, celles d'oxyde d'azote ainsi que les composés organiques volatiles - tous deux à l'origine de l'ozone - demeurent élevées dans l'air des agglomérations, à proximité des axes de circulation.

Des progrès à faire sur les énergies renouvelables

En matière d'énergie, le rapport de l'Ifen montre que la France accuse encore un retard sur les énergies renouvelables. 13% de l'énergie primaire produite sont d'origine renouvelable - 1/3 d'électricité fournie à 90% par l'hydraulique et 2/3 d'énergie thermique (bois-énergie, biocarburants, pompe à chaleur, déchets urbains). La France a le deuxième gisement éolien d'Europe mais sa production, bien qu'en hausse de 61% en 2005, reste encore marginale. "Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir pour satisfaire aux objectifs européens de 2010", prévient Bruno Tregouet. A cette échéance, la France s'est en effet engagée à produire 10% de ses besoins énergétiques à partir d'énergies renouvelables, contre 6% en 2005, et 21% de sa consommation d'électricité, contre 11% en 2005.
La ressource en eau est toujours très sollicitée, avec des prélèvements qui s'élevaient à 34 Md m3 en 2001. Si ceux de l'industrie ont nettement diminué depuis une trentaine d'années, ceux destinés à l'alimentation en eau potable continuent à augmenter tandis que la pression de l'irrigation continue à être importante par endroits. Le rapport de l'Ifen fait état d'une stabilisation des nitrates dans les cours d'eau mais cette amélioration ne s'est pas encore répercutée dans les eaux souterraines. Quant aux pesticides, ils restent présents dans la plupart des cours d'eau et dans une grande partie des nappes.
De nouveaux polluants font aussi leur apparition. On les retrouve aussi bien dans l'air (produits phytosanitaires en limite des zones urbaines) que dans les cours d'eau (micropolluants tels que les médicaments ou les cosmétiques provenant des stations d'épuration, rejets industriels comme la dioxine ou les composés bromés).
Le rapport s'intéresse pour la première fois aux pressions des ménages sur l'environnement. Si 22% des Français placent l'environnement en tête de leurs préoccupations, leurs pratiques restent en décalage avec leur sensibilité environnementale, remarque l'Ifen. Depuis trois ans, la production des déchets par les ménages semble se stabiliser mais le volume reste élevé (353 kg par habitant et par an). Autre impact fort sur l'environnement : les 4/5 des déplacements des ménages se font en voiture particulière.

Des espaces naturels grignotés

L'Ifen dresse aussi un constat alarmiste sur le recul des espaces naturels. Lotissements, zones d'activités et routes grignotent de plus en plus la nature et menacent la biodiversité. "Les zones artificielles couvrent désormais 8% du territoire métropolitain alors que, dix ans auparavant, elles n'en couvraient que 7%", a relevé la ministre de l'Ecologie. "Cette augmentation peut paraître faible, mais cela représente chaque année 60.000 hectares perdus", a-t-elle ajouté.
 Si les forêts voient leurs surfaces progresser, les terres agricoles, et surtout les prairies, sont les principales victimes de cette "artificialisation des sols". Le phénomène, qui a démarré dans les années soixante, se concentre sur la grande périphérie des villes et le littoral, note l'Ifen. La ministre de l'Ecologie a assuré qu'elle présenterait avant la fin de l'année un "plan de reconquête"  des espaces naturels, sans préciser quel type de mesure était envisagé pour lutter contre cet étalement des villes.
La première victime de ce recul de la nature est la biodiversité : peu d'espèces sont en voie d'extinction en France, mais beaucoup sont menacées. C'est le cas de 14% des espèces de vertébrés, et des espèces hier banales pourraient devenir rares, comme les populations d'oiseaux communs, qui ont reculé de 27% depuis 15 ans en milieu agricole.
Enfin, autre sujet de préoccupation détaillé par l'Ifen : la forte croissance démographique dans les communes exposées aux risques majeurs. Ainsi, les trois quarts de la population française résident aujourd'hui dans des communes exposées aux inondations et les collectivités exposées aux séismes, feux de forêts, cyclones, tempêtes ou avalanches attirent elles aussi de plus en plus d'habitants.
  

Anne Lenormand

 

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