Un climat d’incertitude qui pèse sur les artisans du bâtiment

Le ralentissement de l’activité des artisans du bâtiment enregistré l’an dernier se poursuit en 2023. Une contraction de -0,5% en glissement annuel à la fin du premier semestre qui inquiète la Capeb, laquelle dénonce un soutien de l’Etat "pas à la hauteur" des enjeux.

"On s’y attendait", confirme la président de la Capeb (Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment) Jean-Christophe Repon. L’activité des entreprises artisanales du bâtiment s’est contractée de -0,5% sur un an au 1er semestre 2023, une première depuis trois ans. Une chute entraînée principalement par les mauvaises performances enregistrées sur le marché du neuf depuis plusieurs trimestres, explique le dirigeant qui souligne que le repli atteint même -1,5% au 2d trimestre 2023.

Les causes de ce repli sont connues, rappelle la Capeb dans une note trimestrielle qui évoque pêle-mêle la croissance des taux d’intérêt, l’augmentation des coûts de construction (+26% en 2022) ou encore le niveau toujours élevé du foncier. Résultat des courses, entre juin 2022 et fin mai 2023 le nombre de permis de construire délivrés chute de -18% en moyenne nationale et même de -28,8% en Bretagne, par exemple. En parallèle, le nombre de mises en chantier baisse de -11,1%, impactant directement l’activité de la construction. A l’échelle régionale, souligne la Capeb, "le tableau est contrasté" au 2d trimestre avec par exemple +1% en Auvergne-Rhône-Alpes, +0,5% en Paca ou encore en Corse, tandis que le recul est plus marqué dans sept régions métropolitaines et notamment en Occitanie (-2%).

Au vu de ces performances, Alain Chouguiat, directeur des affaires économiques de la Capeb prévient que la croissance du secteur en 2023 devrait se situer "au bas de la fourchette" des prévisions réalisées il y a quelques mois, soit proche de -0,5%. Très loin des +2,4% enregistrés en 2022 ! "Et en 2024 nous allons continuer de baisser, davantage dans la construction que dans la rénovation énergétique", anticipe le dirigeant qui estime ce recul autour -1%.

"Les mesures de soutien ne sont pas à la hauteur des ambitions"

"Les mesures de soutien ne sont pas à la hauteur des ambitions", regrette pour sa part Jean-Christophe Repon qui fustige la disparition programmée du bouclier tarifaire sur les questions énergétiques ainsi que la complexité des aides qui ne favorise pas la demande. S’ajoute à cela une difficulté récurrente pour les entreprises artisanales "à être qualifiées alors que les objectifs affichés sont élevés", constat validé par Qualibat qui confirme des chiffres en baisse en 2023. Au final, les entreprises artisanales du bâtiment peinent à maintenir leurs carnets de commandes à des niveaux satisfaisants. Ce qui se traduit déjà par une augmentation au 2d trimestre 2023 de +36,4% du nombre de défaillances (2.744 au total), "légèrement au-dessus de la même période en 2019".

Des besoins de recrutement difficiles à cerner

Sur un an, l’emploi stagne (+0,1%), soit environ 1.000 emplois créés, même si les intentions d’embauches ne faiblissent pas par rapport au semestre précédent : "en fait, il est difficile de cerner les besoins tant les incertitudes sont grandes" et les difficultés de recrutement récurrentes, souligne le président de la Capeb. Les dirigeants d’entreprises artisanales sont d’ailleurs près de 27% à déclarer avoir cherché de nouveaux collaborateurs lors du premier semestre. Et ils sont presque aussi nombreux (20%) à réitérer leurs requêtes pour la seconde moitié de l’année alors que les licenciements ou non-renouvellements de contrats progressent en parallèle.

Dans ce contexte, les représentants de la Capeb semblent ne plus savoir à quel saint ministériel se vouer : "c’est ça la difficulté, explique Jean-Christophe Repon, on parle à Bruno Le Maire, Olivier Dussopt, Carole Grandjean ou au nouvel arrivant Patrice Vergiete ?" "Nous avons fait des propositions fortes ces derniers mois qui avaient l’air de faire leur chemin, rappelle le président de la Capeb, mais aujourd’hui on ne voit rien venir en matière d’arbitrage !" Le dirigeant en appelle donc à l’organisation rapide "d’Assises du bâtiment" afin de trancher sur ce qu’il convient de faire par exemple sur l’accompagnement de la rénovation énergétiques des bâtiments. Domaine dans lequel les perspectives de progression de l’activité (+2% sur un an) sont les plus notables mais où les besoins en formation sont criants.

 

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