Un bistrot coopératif, source d’attractivité à Locmélar (29)
À Locmélar, le dernier commerce a fermé il y a 10 ans. En 2019, le Mélar Dit – un « bistrot, et pas que… » – a ouvert ses portes dans l’ancien presbytère racheté par la mairie. Constitué sous forme de société coopérative d’intérêt collectif, il compte 27 associés, aux premiers rangs desquels se trouvent la municipalité et des citoyens du village.
Recréer une dynamique en centre bourg via l’implantation d’un commerce. Si le modèle a le vent en poupe – fort du soutien des pouvoirs publics – il reste synonyme de prise de risques pour les petites communes. Comment faire ? Maire de Locmélar, plus petite commune du canton de Sizun (Finistère), Bruno Cadiou en est persuadé : « pour que la mayonnaise prenne, c’est avant tout une histoire de personnes, car il faut que les ambitions de la municipalité et les porteurs de projets matchent ». Ce qui implique aussi « de prendre le temps de bien baliser son projet, ensemble ».
Florian Jehanno opine. En 2017, à la recherche, avec sa compagne Margot Neyton, d’un village où « créer un lieu de convivialité », il a posé ses valises à Locmélar. Un choix ne devant rien au hasard pour ces deux trentenaires. Issus de l’économie sociale et solidaire et de l’éducation populaire, ils ont, durant plus de six mois, fait un tour de France pour explorer les initiatives, rencontrer des municipalités et peaufiner leur concept de « bistrot, et pas que… ».
Fonctionnement « collectif »
« Outre le fait de pouvoir disposer d’un local, ce qui nous a séduits, c’est la réflexion autour de la revitalisation du centre bourg, déjà bien engagée par la municipalité et associant les habitants », explique Florian Jehanno. En 2015, la commune avait en effet acquis l’ancien presbytère du village, sans projet prédéfini, sauf l’envie d’y implanter un lieu de convivialité pour les habitants, associés à la réflexion via questionnaires et réunions publiques.
En 2017-2018, le jeune couple présente son concept aux riverains et entend leurs attentes. Une association, Les amis du bistrot, regroupant une trentaine d’habitants, est créée pour porter le projet. Ce « bistrot, et pas que… », nommé Le Mélar Dit, mêlera café, épicerie locavore et espace de spectacles et de rencontres.
La réflexion sur les statuts juridiques du lieu associe elle aussi les deux porteurs du projet, la municipalité et les habitants. Très vite, le choix se porte sur la création d’une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), associant collectivité, associations et particuliers.
La SCIC compte d’abord 19 sociétaires (27 aujourd’hui) : ses salariés (Florian Jehanno et Margot Neyton, rejoints depuis peu par une troisième personne), la municipalité, des habitants, des producteurs locaux, trois clubs Cigales d’investisseurs solidaires, l’association Les Amis du bistrot…
De l’accompagnement
« Nous nous sommes fait accompagner par l’Association de développement de l’économie sociale et solidaire du pays de Morlaix et surtout par l’Union régionale des SCOP et SCIC pour la rédaction des statuts et la répartition des rôles de chacun », explique Florian Jehanno. Coût de l’accompagnement : environ 1 000 euros – un investissement précieux, d’autant, souligne Bruno Cadiou, « que nous, municipalité, nous n’y connaissions rien. Et que cela nous a permis, au passage, de développer de nouvelles compétences. »
La mairie prend à sa charge la rénovation du bâtiment lancée fin 2018, son isolation écologique, et les demandes de subventions ; Florian Jehanno et Margot Neyton, s’occupent de l’aménagement intérieur et de tout ce qui relève de l'activité pure de la SCIC. Cette dernière bénéficie d’un loyer modéré, 250 euros par mois, qu’elle verse à la municipalité.
Animation retrouvée
Ouvert le 21 juin 2019, le Mélar Dit a à peine quelques mois pour se roder avant la crise Covid. Une période complexe, traversée « grâce au soutien des habitants » qui ont continué à fréquenter le coin épicerie resté ouvert.
La crise passée, l’activité du lieu a repris. Épicerie d’un côté, coin bistrot de l’autre, spectacles en tous genres débordant l’été sur la place du village, accueil d’activités à l’étage, du Pilate au cours de chant… Le Mélar Dit a pris ses marques. Son modèle économique reste fragile, porté par les spectacles estivaux. Mais « nous l’avions anticipé », pointe Florian Jehanno, saluant au passage « la vraie prise de risque de la commune ». Une prise de risque réfléchie – « d’ailleurs, même si ce n’est pas du tout à l’ordre du jour, il a été prévu qu’en cas d’échec la mairie puisse transformer le local en logement, raison pour laquelle nous disposons d’une salle de bains ».
Bruno Cadiou sourit. Le Mélar Dit, c’est pour Locmélar, « une animation retrouvée », s’amplifiant tranquillement via le bouche-à-oreille et les réseaux sociaux. « Moi, je travaille à Brest, et quand je dis que je suis de Locmélar, les gens me répondent, ‘ah oui, là où il y a le Mélar Dit’. Aujourd’hui, la commune est connue au-delà des frontières du canton !
Le financement du projet
Outre l’acquisition de l’ancienne maison paroissiale (cédée par le doyenné de Landivisiau pour 28 000 euros), la municipalité a pris en charge la réhabilitation et la mise aux normes du bâtiment, accueillant aujourd’hui le Mélar Dit. Le coût de ces travaux – 254 000 euros - a été subventionné à 75 % par l’Europe (fonds Leader), l’État, la région (dispositif « dernier commerce ») et le département.
L’aménagement intérieur et investissement de départ – environ 54 000 euros - ont été pris en charge par les deux porteurs de projet, qui, outre un apport personnel de 4 000 euros chacun, ont bénéficié d’un financement participatif (11 075 euros), de dons de matériel, d’un prêt de la coopérative de finance solidaire la NEF, et de prêts à taux zéro de trois clubs Cigales d’investisseurs solidaires.
Commune de Locmélar
Bruno Cadiou
Le Mélar Dit
Florian Jehanno
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